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RAPHAËL LAMAIGNÈRE |
Ph.DUBEDOUT
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articles de Ph. D.]
C'est au bourg de Doazit, dans la maison appelée "Au Junat", que naquit Jean-Baptiste-Raphaël LAMAIGNÈRE, le 13 août 1887; fils aîné de Jean-Edmond Lamaignère (cultivateur, sacristain) et de Catherine Persillon. [famille]
Il fréquente d'abord l'école communale de Doazit, mais à peine âgé de 10 ans, il perd son père. En 1900, il entre en classe de 5ème au Petit Séminaire d'Aire, puis en 1905, au Grand Séminaire d'Aire qui est fermé en décembre 1906 suite à la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat. Les séminaristes se réfugient alors en janvier 1907 au château de Poyanne. Là, bien que ne cachant pas ses opinions royalistes, il participe à la semaine de grève déclanchée pour protester contre l'exclusion de Dagouassat de St-Vincent-de-Paul et Lafourcade de Léon, à qui on reproche leur tendance silloniste.
Ordonné prêtre en 1911, il quitte Poyanne en juillet, pour être "professeur de silence" (surveillant) au collège de Dax. En 1913, il est nommé vicaire de Peyrehorade, mais survient la guerre de 14-18. Il fut versé dans le service armé, et affecté au 87ème Régiment d'Artillerie Lourde, en garnison à Tarbes. Il partit ensuite vers le front en 1917 et combattit dans le secteur de Verdun et autres lieux, jusqu'à son retour, après l'Armistice de 1918, où il reprit son vicariat de Peyrehorade.
En 1921, il est nommé curé de Peyre et de Monget. Sa mère décède la même année, il perd ainsi sa dernière attache familliale avec Doazit.
En avril 1931, il est nommé curé de St-Aubin, où il restera 18 années. Il a également en charge la paroisse de Larbey. Cette dernière paroisse, le 16 janvier 1938, fut le théâtre d'un grand meeting révolutionnaire pour protester contre le renvoi de deux métayers. 34 autobus et plus de 80 voitures de manifestants ! Les remous s'en firent sentir jusqu'à St-Aubin, où le coq de notre curé - qui ne dut pas rester sur sa réserve - fit les frais de cette agitation.
Il écrit surtout à l'approche de la soixantaine, et c'est bien sûr au travers de ses poèsies qu'il nous livre ses états d'âme. Il consacre plusieurs textes à ses souvenirs d'enfance à Doazit, à sa période scolaire, et plus largement "au temps de d'auts còps". Il garde la nostalgie des années passées, de sa maison natale et de ses anciennes paroisses, Peyrehorade et surtout Peyre, où avec le recul tout lui paraît idyllique, sans doute par opposition à St-Aubin. Il ne cesse de s'apitoyer sur l'état religieux de sa paroisse: "Lous omis soun descougnats", répète-t-il. "Curé de St-Aubin, que-p plagnem touts, praubin !..." Le marché noir pratiqué par ses ouailles, puis ses démêlés avec les associations locales n'arrangent pas les choses. Il envie ses confrères dans d'autres paroisses (Peyre, Habas, Montaut, Peyrehorade...) : "Au bos peys, de ségu, que ba mielhe". Son insistance sur ce point nous laisse imaginer le soulagement que dut lui apporter sa nomination pour Herm en février 1949, où il décédait deux ans plus tard, le 27 mai 1951, non sans avoir trouvé le temps, comme il le fit à chacun de ses postes, d'écrire une monographie de sa paroisse.
L'abbé Raphaël Lamaignère est enterré dans l'allée centrale du cimetière d'Herm.
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Raphaël Lamaignère en 1912 |
Le Félibre
Elevé dans l'ambiance gasconne qui régnait alors dans le bourg de Doazit, puis émule de ses oncles - Isidore et Louis Lamaignère étaient membres de l'Escole Gastou Fébus - , c'est tout naturellement qu'il pratique et cultive sa langue maternelle.
En 1947, il demande à son tour son adhésion à l'Escole Fébusienne, cédant à la pression du Docteur Louis d'Uzer de Mont-de-Marsan, du Colonnel Michel Ferron de Pau, à celle quelques années plus tôt, de Césaire Daugé, et d'autres de ses confrères de qui il reçoit des compliments élogieux: "Quelle maîtrise dans la prosodie ! Daugé est enfoncé, Isidore Salles égalé !". Cependant, l'accueil de Simin Palay, alors capdau de l'Escole est un peu plus réservé; il lui reproche poliment son manque d'originalité dans les sujets: "Quoan de cops, despuch Virgile an parlat de las brougnes ? E qu'ey ço qui s'en pot dise de mielhe que ço qui s'en ey dit ?".
Une seule de ses poèsies sera publiée dans les Reclams de Biarn e Gascougne: "Batères", écrite en août 1947 sous le pseudonyme de "Yan de Yunat".
Il est vrai que la grande majorité de ses écrits ne sont pas destinés à la publication: des peguessotes adaptées et mises en vers, des sonnets et pièces pieuses, des souvenirs, des compliments adressés à tel ou tel,... toujours mis en vers. Beaucoup d'humour, des expressions savoureuses et colorées donnent un réél plaisir à la lecture de cette langue parfaitement maîtrisée.
René Cuzacq dit deux mots
sur Raphaël Lamaignère dans son "Histoire de
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Raphaël Lamaignère en 1924 |
Œuvre écrite de Raphaël LAMAIGNERE :
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* PETITE HISTOIRE DE MONGET. D'après les archives de la mairie et les cahiers paroissiaux. (Etude publiée en 1929 et 1930 dans le Bulletin Paroissial "Le Clocher de Peyre-Monget".) |
* LA PAROISSE DE SAINT-AUBIN, pages d'Histoire locale d'après les documents officiels. (Bonne Presse du Midi, Vaison-la-Romaine, Vaucluse 1938) |
* LA PAROISSE ET L'EGLISE DE LARBEY. Notes recueillies pour un petit essai d'Histoire Locale, 1940. |
* POYALER ET SON CHATEAU. Notes 1940. |
* DOAZIT AUX TROIS EGLISES, essai de reconstitution d'Histoire Locale Religieuse d'après les documents officiels, 1941. |
* LE VIEUX LARBEY. Etude Historique 1942. |
* L'EGLISE SAINT-PIERRE DE BROCAS. 1943. |
* PETITE ETUDE SUR LES NOMS PATRONYMIQUES DES FAMILLES DERIVES DU GASCON. 1943. |
* JEAN D'ARCET. 1947. |
* HERM. Histoire locale de la paroisse et de l'église. (Manuscrit 1951. Publié en 1973 avec notes de l'abbé Lesbats, à l'imprimerie Castay, Aire-sur-Adour) |
* DICTIONNAIRE DE RIMES GASCONNES. (Manuscrit sans date) |
* PIÈCES DE THÉÂTRE (3): |
* RECUEIL DE
POESIES ET PIECES DIVERSES, réunies en 1948, dont les principales parties
sont : [Extraits des poésies de R. Lamaignère, concernant DOAZIT,
avec traduction] |
* CANTAS traditionaus recuelhudas (e a còps adobadas) preu R. Lamanhèra. |
* ISTOERÒTAS tad arríder |
Comme on peut le constater, à l'exception des monographies de Peyre, Monget, St-Aubin et Herm (posthume) ainsi que de quelques poèmes publiés ici ou là, toute son œuvre est restée manuscrite. Les monographies et les études d'onomastique ont été déposées en 1989 à la société de Borda*2 par son frère, l'abbé Louis Lamaignère, en retraite à Habas, tandis qu'il a conservé Dictionnaire de rimes et Recueil de poésies.
A Nouste [graphie normalisée] |
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Pr'ou bourg amistous de Doazit |
Més, un your, dou téyt aymadiu |
24 de sétéme 1948 Raphael Lamaignère. |
1- Histoire de
2- cf. Bulletin de
3- Pour les pièces de théâtre, voir :
Claude ALRANQ, Répertoire du théâtre d’Oc
contemporain (1939-1996), éd. Domens, Pézenas, 1997, pp. 149-151.