PETITE HISTOIRE DE MONGET |
D'après les archives de la mairie
et les cahiers paroissiaux,
par
L'Abbé Raphaël Lamaignère
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1930
[Sommaire Doazit]
[Raphaël Lamaignère]
Petite Histoire de Monget (Landes)
Sur une colline aux pentes abruptes et caillouteuses, dominant fièrement par 143 mètres d'altitude les poétiques régions du Bas-Béarn; face à la chaîne des Pyrénées qui coupe, au loin, l'horizon de sa dentelle de cimes et de monts, se dresse le village de Monget.
Il confine, par Malaussanne, Montagut et St-Médard, aux Basses-Pyrénées, auxquelles il était primitivement rattaché, avant la création, en 1790, des départements français. Au point de vue religieux, il appartenait, à cette même date, au diocèse de Lescar.
D'où vient l'étymologie de ce nom ?
Pour les uns, il dériverait du mot gascon: mounyéttes, le pays des haricots; - pour d'autres, il signifierait petite montagne, en raison de sa situation géographique qui lui permet de surplomber hardiment les vallées du Luy de France et de la Rance; - pour le plus grand nombre, enfin, Monget tirerait son nom du voisinage de l'ancienne abbaye de Pontaut, dont les moines (lous mounyes) faisaient valoir les terres qu'ils y possédaient en propre.
Cette explication nous a toujours paru historiquement plus plausible; et c'est elle qui mérite d'être retenue, de préférence à toute autre.
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Monget, tant au point de vue civil que religieux, comprend les deux quartiers distincts: le Bourg, et Burgaux. C'est ce qui ressort des Registres de la Mairie qui remontent à 1737, et de l'Ordonnance de Mgr Lannéluc, évêque d'Aire, érigeant Monget en succursale, le 5 janvier 1847.
Fondation.
Suivant la tradition, c'est sur le plateau de Baillé, à Mant, que fut bâtie, à une époque qu'il nous est mal aisé d'indiquer, l'agglomération de Monget, ou mieux ce qui, un jour, devait devenir le Monget d'aujourd'hui.
Il y avait, en ces temps reculés, en ce Baillé de Mant, une chapelle et un cimetière dont on trouve encore des restes importants. On prétend même qu'un animal de ferme, fouillant le sol de son groin, mit, il y a quelques années, dans le champ même des morts, un pot rempli de pièces d'or... Ceci valait assurément mieux pour son maître que la meilleure des truffes du Périgord...
La colonie aurait été détruite pendant les guerres de partisans; et les habitants s'en furent transporter leurs pénates par-delà le Luy et la Rance, dans le "Bos" de Burgaux.
Les fortifications de campagne et les ruines d'une antique chapelle érigée dans l'enclos de Peyrondine (appartenant à la famille Raté), nous permettent d'accréditer cette opinion. - Peut-être aussi faut-il voir un souvenir de cette fondation, dans le nom de rue que porte encore le chemin, parsemé de maisons, qui traverse le quartier de Burgaux, en direction de Montagut.
L'emplacement du "Baillé" était à peine abandonné par ses occupants, que la convoitise des voisins s'exerça de partout.
En 1446, Monget fut, légalement, déclaré seul et authentique propriétaire des lieux précédemment habités par lui. Mais, en 1453, une sentence judiciaire, rendue par le vicomte de Carmain, seigneur de Navailles, en donna l'usufruit à Mant, à charge pour la paroisse de tenir 24 chênes à la disposition des moines bernardins de Pontaut.
Dès lors, s'ouvrent des procès retentissants entre les deux localités, procès qui vont durer plus de 200 ans.
Le 24 décembre 1554, le Parlement de Bordeaux déposséda les Mantois qui, fiers de leur prestige, s'étaient portés à des excès sur leurs proches voisins. Ainsi, la force, ici-bas, n'a qu'un temps; et, tôt ou tard, le bon droit finit par triompher. - Le seigneur de Monget, profita immédiatement de la décision qui venait d'être prise en sa faveur; et, pour bien marquer sa prise de possession, fit construire au "Baillé" une grande et importante tuilerie.
Mais, l'effervescence grondait toujours au coeur des populations rivales, trop rapprochées pour éviter les conflits. A telle enseigne, qu'en 1724, les habitants de Mant chassèrent à nouveau, et par la violence, les indigènes qui, obstinément rivés à la terre de leurs aïeux, n'avaient pas voulu émigrer à Burgaux.
Craignant de sérieuses échauffourées et des incidents dont les suites ne laissaient rien présager que de grave, la Cour des Eaux et Forêts ordonna, tôt après, le partage par moitié des terrains en litige, entre Mant et Monget.
Nouvelle alerte en 1777. - A cette date, dame Marie Dabadie, baronne de Monget, mariée à M. le Baron Dambidan de Crouzeilles, conseiller au Parlement de Navarre, se fit adjuger les immeubles, et obtint le remboursement de 53 000 francs perçus, dans l'intervalle, par les deux communes en cause.
Enfin, lorsqu'éclata la Révolution de 1789, et qu'eut commencé l'émigration de 1792, tous les biens seigneuriaux furent séquestrés, puis affermés par l'Etat, qui les vendit bientôt aux familles, désireuses de les exploiter pour leur compte personnel.
On raconte que les Actes du procès de 1777 furent cachés dans un tonneau par le baron lui-même, au moment où celui-ci s'en allait en exil. Cependant, un de ses métayers reçut l'ordre de les faire brûler, précaution alors très utile, en ces époques où tout ce qui sentait la suspicion pouvait amener des surprises fâcheuses. Or, notre brave paysan ayant, un jour, allumé un grand feu, se débarrassa des papiers du baron, en les jetant dans le brasier flamboyant. Et l'histoire ajoute qu'alors que se consumaient, en crépitant, les parchemins seigneuriaux, l'homme des champs crut voir tout-à-coup comme des esprits qui donnaient une âme à la liasse à demi consumée; et, quittant tout, il s'en fut, à toutes jambes, appeler sa femme et ses enfants, espérant ainsi échapper à l'emprise du Diable.
Le Vieux Monget.
Aux avancées du village, sur la colline qui surplombe le cours sinueux de la Rance, se trouve un ancien terrassement qui passe pour avoir été un petit camp romain, dont le but était de mettre à l'abri de toute surprise, le Château de Monget.
Cet ouvrage, que le temps a respecté, et contre lequel est adossée la maison de Néboudon, mesure 25 mètres de long sur 6 de large.
On dit que les anciens curés de Monget ne s'arrêtaient jamais en ces lieux sans se découvrir, et faire une prière pour ceux qui, jadis, y étaient tombés dans de dures batailles.
La maison seigneuriale.
Les Mongetois, fixés comme nous l'avons vu, dans les bois de Burgaux, essaimèrent bientôt, et, vers le quinzième siècle, vinrent fonder le village, avec son église et son cimetière. Il leur paraissait plus sûr d'abandonner des régions désertes, et d'aller se grouper à l'ombre du château dont les murs leur étaient une garantie.
Ce château, puissamment construit, était habité en 1694 par les Dambidan de Crouzeilles. On y voit encore, surmontant un portail de service, la girouette à fleurs de lis, signe du titre de noblesse portée par les seigneurs de l'endroit.
Après le séquestre des biens ordonné par la Convention, en 1790, le domaine fut acheté par la famille de Hourquerie, qui, plus tard, le céda aux Dupin de Juncarot. - Depuis 1893, le château de Monget appartient à la famille Lafitte, venue de St-Sever.
Il y a là un manoir véritablement princier, avec son escalier monumental, ses salles spacieuses, ses fenêtres élevées et nombreuses, avec ses boiseries massives le long des murs; avec, surtout, ses multiples dépendances, aux toitures hardies, et aux appartements conçus selon les besoins de l'époque. - On y montre aussi, dans les écuries mêmes, un emplacement spécial qui, d'après la tradition, recouvrirait les corps de deux soldats protestants, morts ou tués à Monget en 1569, pendant les guerres de Religion.
La population.
Ici, comme partout, il nous faut pleurer sur la dégénérescence totale de la localité: les berceaux, depuis déjà longtemps, n'y équilibrent plus le nombre des cercueils qui, chaque année, s'alignent côte à côte.
Et pourtant, Monget fut, jadis, un centre important auquel avait été accordé le privilège d'un tribunal, qui rendait des sentences sans appel, et duquel ressortissaient les communes des environs.
En 1789, on y comptait plus de 500 âmes, en 1840, nous n'en trouvons plus que 359; en 1929, nous arrivons péniblement à 155.*1 Ces chiffres sont tristement éloquents, et nous dispensent du moindre commentaire.
Pour mieux illustrer cette douloureuse déchéance, nous donnons ici la liste des maisons démolies, dont se souviennent encore les plus de soixante ans, et celles que nous voyons actuellement fermées. (Celles-ci sont marquées de l'astérisque *.)
Pierrine Pérè Magret Audine * Castagnet Chinan Coulot Crestia Mounicq * Pargadot Arnaud-Pèye * Lacoste Castera * |
Patin Peyroulicq * Aulè * Cette Crabè Hournè Hourtina Billocq Basset Lubet Prat Cousturè |
Paul Ménaout Pradon * Hustè Haou Téoulè Herrère Tourtera Poublanc Larribaigt Coundou Labergerasse |
Mouliè Nougué Arbins Pascal Pécoste Priou * Treytin Saougot 1 Saougot 2 Guillas Coustè Lubeigt |
Au total: 49 maisons. Actuellement, Monget ne compte plus que 44 foyers, et n'est bientôt plus que l'ombre de lui-même...
La Paroisse.
Notre travail documentaire n'embrasse, à proprement parler, que le côté religieux de Monget. On nous excusera de nous confiner dans les seuls événements qui intéressent son histoire, présentée sous cet angle: il nous a été impossible de trouver ailleurs, de quoi faire un tout complet, comme nous l'aurions voulu et souhaité grandement.
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Il ne nous reste, dans nos Archives, aucune pièce officielle, nous permettant de connaître la date exacte de l'érection de Monget, en paroisse. Cependant, il n'est pas téméraire de supposer qu'un curé y était déjà à demeure au XVe siècle, à cette même époque où les habitants de Mant chassèrent leurs voisins qu'ils jugeaient trop encombrants sur les terres du "Baillé". - D'ailleurs, certaines pierres discoïdales qui jalonnent encore le cimetière, et que les archéologues font remonter au XIVe siècle, confirment notre opinion.
Dès les premières années du XVIIIe siècle, les documents se précisent; et nous connaissons, dès lors, les noms des divers curés qui desservirent Monget.
L'abbé Arnaud de Junca, frère du Baron (1737-64).
M. Lacroix (1764-83). - M. Dastugues (1783-91).
-- De 1791 à 1851, c'est à dire pendant soixante ans, la paroisse demeure sans titulaires, et le service religieux est assuré par les curés de Peyre.
M. Lagot (1851). - M. Lafosse (1851-65). - M. Lafitte (1866-70). - M. Siard (1871-72). - M. Laloubère (1872-76). - M. Abbadie (1877-78).
-- De 1878 à 1880, la paroisse reste sans curé.
M. Darribère (1880-82). - M. Hontanx (1882-1884).
-- De 1884 à 1893, nouvel interrègne.
M. Passicos (1893-97) transféré à Urgons. - L'abbé Cazaumayou (1897-1901), nommé à Meilhan, curé actuel de Pontonx-sur-Adour. - M. Sylvain Lafitte (1901-1921), curé actuel de Haut-Mauco. - M. Raphaël Lamaignère (1921-31)*2, curé résidant à Peyre, chargé du service de Monget, devenu "annexe".
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L'abbé Dastugues, se réfugia en Espagne, en 1792. A son retour de la terre d'exil, il fut nommé curé de Peyre, avec charge de Monget et Burgaux. Cette situation d'un curé non résidant, Monget étant désormais rattaché à Peyre, devait durer plus d'un demi-siècle.
C'était pourtant l'époque, où le sentiment religieux, un instant bouleversé par la Révolution et les suites dramatiques que nous connaissons, ne demandait qu'à reprendre ses droits. Les pouvoirs publics eux-mêmes, entrant dans les vues de leurs administrés, s'efforcèrent, à maintes reprises, d'apporter remède aux maux dont souffraient les familles.
C'est ainsi qu'en 1808, le maire Dumartin sollicita de l'Autorité diocésaine dont le siège était alors à Bayonne, la faveur d'avoir un curé ou, tout au moins, un vicaire, auquel il assurait un revenu annuel de 300 francs en nature. Le sous-préfet de St-Sever appuya la demande, et fit ressortir en haut lieu que Monget possédait une église fort convenable, à deux autels, ainsi qu'une maison commune bâtie en 1787, qui pourrait occasionnellement servir de presbytère.
A son tour, en 1810, l'abbé Labayle, doyen de Hagetmau, pria son évêque de laisser fonder à Monget "la Chapelle", sous la juridiction du curé de Peyre. Mais, jamais n'intervenait la décision si ardemment souhaitée.
En 1840, enfin, Mgr Lannéluc fit savoir au maire, M. de Juncarot, qu'il avait résolu de mettre fin au veuvage de l'église, et que Monget était érigé en succursale. On devine avec quelle satisfaction joyeuse et reconnaissante, la nouvelle fut accueillie.
Six ans plus tard, une Ordonnance royale du 15 septembre 1846, confirmée par décret épiscopal du 5 janvier 1847, accordait la faveur que nul bientôt n'espérait plus.
Le premier curé en date fut l'abbé Lagot, vicaire de Pouillon, qui prit possession de son poste, le 10 juillet 1851.
L'Eglise de Monget.
Elle a pour patron St Jacques le Majeur, et fut bâtie par les seigneurs de l'endroit, lorsque au XVIIe siècle, fut fondé le village.
Celle-ci n'a, pour ainsi dire, aucun cachet artistique. Elle ne comprend qu'une nef, flanquée d'une rotonde latérale, dédiée à la Sainte Vierge; sa longueur totale est de 20 mètres, la largeur de 5,70 m. - Deux vitraux sortis de la Maison Bergès, de Toulouse, représentant St Joseph et St Jacques, donnent au sanctuaire une lumière douce et tamisée; quatre grisailles, de facture plus moderne, percent les murs de la nef.
Dans le petit oratoire, reposent les anciens châtelains de Monget. En 1927, la municipalité, entrant généreusement dans nos vues, a remis à neuf le petit édicule.
Dans le sanctuaire, on peut admirer un magnifique tabernacle, ayant appartenu à l'ancien autel "Renaissance" de l'église. - Ce tabernacle avait pu être enlevé à temps, et soustrait, en 1793, à la fureur des révolutionnaires. En 1840, l'évêque d'Aire, en tournée de Confirmation à Mant, monta jusqu'à Monget, et trouva ce meuble si précieux, qu'il en ordonna, d'urgence, la restauration. Ce ne fut qu'en 1859, que la Fabrique, possédant quelques disponibilités, put traiter avec M. Carrère, doreur à Hagetmau.
Le Clocher.
Ce fut primitivement une tour carrée, très basse. Elle renfermait deux cloches, dont l'une fut enlevée en 1790 par le gouvernement révolutionnaire, et transportée à Saint-Sever, appelé alors Mont-Adour.
En 1798, la foudre tomba sur le clocher dont elle ne fit que des ruines. Devant cette tragique situation, les pouvoirs constitués ordonnèrent une immédiate réfection, et l'entreprise fut confiée à deux ouvriers de l'endroit: Jean Pébeliè, du Plassot, et Fortis Lamane, de Roubicon. Peu de temps après, la tour était relevée, à la satisfaction générale.
En 1808, la commune décida l'achat d'une seconde cloche, du poids de trois quintaux; mais les délibérations n'allèrent pas plus loin. Si bien que Monget en est toujours à attendre une réalisation, que d'autres, plus heureux peut-être, pourront saluer après nous.
L'unique cloche paroissiale fondue en 1849 porte cette inscription: Parrain: Laborde Pierre Lacabanne; marraine, Marie Moncade Lapierre. Bernard Dantxoréna, desservant à Peyre-Monget. - St Jacques, priez pour nous. - Delestan et Malet, priez pour nous.
En 1887, M. Bancons, architecte à Vielle, fut chargé d'établir un devis pour la construction d'un clocher neuf, à flèche, abat-son, palier, et porche extérieur. La commune, secouant cette fois sa torpeur de jadis, et désirant par un geste d'honneur réveiller dans la localité une profitable émulation entre tous, ouvrit une souscription qui donna 680 francs en argent, et 330 fr. en prestations et dons en nature. L'Etat promit un secours de 5 000 francs, sur les 6 000 demandés.
Cinq ans plus tard, en 1892, le nouveau clocher de Monget, dressait fièrement vers le ciel sa fine et élégante silhouette. Mais, la politique y réclamait aussi ses droits: et le maire d'alors, farouchement attaché au régime par toutes les fibres de son âme, faisait apposer une pierre avec les deux initiales R F , troisième du nom, et de laquelle il tenait de nombreuses et insignes faveurs...
Le Presbytère.
L'abbé Arnaud de Junca, curé de Monget en 1737, et frère du baron, habitait la maison, dite encore de "Junca", occupée actuellement par la famille Dumartin. C'est une demeure de magnifique structure, aux appartements élevés où le jour pénètre par des baies et des fenêtres dignes d'un manoir seigneurial; on peut y admirer une charpente dont l'agencement constitue une véritable merveille d'art, et qui fait honneur aux ouvriers de l'époque. On conserve encore dans la maison, une belle chambre qu'on appelle toujours: la crampe dou curè.
Sous M. L'abbé Lacroix, le presbytère se trouvait à Lapierre, propriété actuelle de la famille J. Péré, a plus de 800 mètres de l'église.
L'abbé Dastugues se trouvant par trop isolé de l'agglomération, et ayant à traverser chaque jour des chemins difficiles et tortueux à travers un vallon, acheta de ses deniers la cure actuelle, dans le bourg, à quelques mètres seulement du lieu saint. Mais, la commune voulait avoir son presbytère. - A cet effet, elle jeta son dévolu sur Malagouarre (Christine), maison de belle apparence, toute voisine de la précédente. Malheureusement, ses démarches ne purent aboutir. Ceci se passait en 1817.
A la mort de M. Dastugues devenu curé de Peyre, la municipalité acheta aux héritiers tout le domaine, avec ses dépendances et ses terres, au total, 1 hectare, 28 ares et 92 centiares. Mais, la maison demeura inoccupée jusqu'en 1850.
En 1832, le maire y fixa la salle des délibérations.
Le dernier occupant du presbytère de Monget fut l'abbé S. Lafitte qui, en 1907, obtint de l'Evêché, après certaines difficultés d'ordre pastoral, l'autorisation de s'en venir habiter Peyre, devenu vacant par le départ pour Meilhan de l'abbé Cazaumayou.
L'immeuble fut loué par des particuliers, jusqu'au jour où nous pûmes nous-même, après entente avec le maire, nous y réserver un appartement tout à fait indépendant et gratuit, pour les besoins de notre ministère.
Vie paroissiale.
Nous savons assez peu de choses sur les temps troublés de la Révolution et de la Terreur à Monget. Là, cependant, comme partout dans le pays, la persécution sévit sur les insermentés, et sur tous ceux qui prétendaient rester fidèles aux lois de la conscience chrétienne.
Le curé de l'époque, l'abbé Dastugues, préféra l'exil à la prestation du serment constitutionnel qu'on lui demandait. Il demeura huit ans en Espagne, et ne revint à Monget qu'après la tourmente, en 1800. A cette date, il fut transféré à Peyre où il mourut en 1829, à l'âge de 84 ans. Son corps repose, sous le porche de l'église, devant la porte d'entrée.
Pendant que Monget souffrait de l'absence de son curé, le desservant de St-Médard, resté à son poste malgré la rigueur des temps, s'occupa du troupeau demeuré sans pasteur. Il venait, sous des habits d'emprunt, dire la messe dans les granges de Loustaou, et réconforter de sa parole les fidèles de la paroisse. Qui nous dira ce que devaient avoir de recueillement et de sombre tristesse, ces réunions nocturnes, en ces heures graves où l'attachement à sa foi était regardé comme un crime digne de mort ! "Loustaou" servait également d'asile à l'abbé Monge, curé de Peyre et aux trois frères Ducournau, du Placiat, de Monségur, qui, traqués par les patriotes, se cachaient habituellement dans les bois du Luy, entre Mant, Peyre et Monget.
On montre encore dans ces parages, une fontaine qui a gardé le nom de : la houn dous curès.
Le 25 juillet 1792, fête de St-Jacques, patron de Monget, des malfaiteurs pénétrèrent de nuit par effraction dans l'église, et dérobèrent le calice dans un placard de la sacristie. Quand le curé constitutionnel de Bassercles, M. Porte, se présenta pour dire la messe, on constata également que le tabernacle avait été défoncé, et que la lunule, et le ciboire avec la Réserve avaient disparu. Une enquête fut immédiatement ouverte, mais demeura sans résultat.
En 1793, la Convention décréta la réquisition des objets du culte, pour les besoins de la nation.
On raconte qu'en cette circonstance, un nommé Cette fut chargé d'aller remettre au Tribunal du district à St-Sever, l'une des deux cloches de l'église. Le procureur, croyant se trouver en présence d'un "suspect", dit à l'étranger d'un ton bourru et sans réplique :"Vous êtes un aristo, vous ! Vous irez à la guillotine... Simplement ! Comme les autres !..." Le paysan, plus mort que vif, réussit cependant à se faire entendre... "Ça va, ça va, lui répliqua le syndic, aujourd'hui nous avons une loi; demain il y en aura une autre... Et il faudra obéir ! Va-t-en, citoyen ! Retire-toi, et dis partout : ça ira !" (Archives de Peyre.)
Le 15 août 1810, eut lieu dans la paroisse la fête de Napoléon 1er. et du rétablissement de la religion catholique en France. La veille, la cloche sonna à la volée pendant une heure, et le garde champêtre parcourut les chemins appelant, au son de son tambour, la population à l'office du lendemain.
L'heure dite, le curé de Peyre vint solennellement chanter la messe à Monget ; puis, s'organisa dans le bourg une procession triomphale, où l'assistance chanta à pleine voix et d'un même coeur, l'invocation : Seigneur, protégez l'Empereur. Puis , le maire Dumartin prononça une harangue, où il rendit hommage à l'infatigable activité, à la prudence et au génie du prince régnant qui avait su ramener la paix au-dedans, et faire trembler aux dehors, les nations dressées contre lui. Il termina, en recommandant à ses administrés, l'économie, l'amour du travail, la sobriété, la tempérance... Le reste du jour, furent organisées "d'innocentes distractions, jusque dans les ombres respectables de la nuit, auxquelles succéda le doux et paisible sommeil des gens de bien..."
Le 7 octobre 1810, l'Abbé Labayle, doyen de Hagetmau, transmit à l'Evêché une Délibération des édiles de Monget, désirant fixer les nouvelles limites de la paroisse. Le territoire devait comprendre : Monget-bourg, Burgaux, la section du Biellé de Mant, avec le moulin et la tuilerie. L'évêché réserva sa réponse... Et il fallut attendre jusqu'en 1850 , pour voir officiellement figurer Monget au nombre des paroisses landaises.
Le 9 juin 1811, eut lieu la fête de la naissance du Roi de Rome, fils de Napoléon.
Rien ne fut négligé, pour en faire un jour de complètes réjouissances. La veille au soir, deux bergers de l'endroit parcoururent les quartiers, en chantant de joyeuses tyroliennes, et en convoquant les familles aux cérémonies du dimanche. A 8 heures, le curé de Peyre, payant toujours de sa personne, monta solennellement à l'autel, et donna lecture d'un mandement où Mgr. Loison, évêque de Bayonne et d'Aire, remerciait le ciel d'avoir donné à la France un enfant, appelé à transmettre aux générations futures la gloire, le génie et les bienfaits de son père. A 3 h. un bal très animé eut lieu, sous les ormeaux du château. Vint ensuite une distribution de pain aux indigents, et le maire fit acclamer par toute l'assistance, l'empereur, l'impératrice et l'enfant que le Ciel leur avait envoyé. Le soir, des feux de joie furent allumés par les habitants sur les divers points de la commune.
Le 2 février 1849, M. Dantxoréna bénit, à Monget, les stations du Chemin de Croix données par l'abbé Lalaude, vicaire de Montaut. Ce jeune prêtre consacrait ses épargnes et ses ressources personnelles à l'embellissement des églises pauvres du diocèse.
En 1850, l'abbé Lagot, vicaire de Pouillon, arriva à Monget, où, d'ailleurs il ne devait que toucher barre, puisque l'année d'après il était transféré à Luxey, celui-ci devait, plus tard, mourir curé de Ste-Eulalie-de-St-Sever. Le jeune curé de Monget se mit résolument à l'oeuvre, et, secondé par le maire, ordonna la réfection de l'entrée de l'église, fit placer les boiseries-banquettes dans le sanctuaire, et pourvut la sacristie des ornements nécessaires à la célébration du culte divin. La chaire date aussi de ce temps.
M. Lagot nous dit qu'en arrivant à Monget, la population, et, en particulier, le quartier de Burgaux, ne manquait jamais de venir assister aux messes de paroisse dites sur semaine, et s'abstenait ce jour-là des travaux dans les champs... heureux temps que celui-là !! Depuis lors, les choses ont bien changé à Monget !... Ne nous croyons-nous pas plutôt, le dimanche, en pleine Sibérie spirituelle ? La cloche du village n'a plus le don de réveiller les coeurs... C'est de l'indifférence totale... C'est l'atrophie de toute énergie religieuse...
L'abbé Lafosse remplaça M. Lagot, et prit possession de la cure, le 10 juillet 1851. Il resta à Monget jusqu'en 1865.
En 1866, arriva M. Lafitte. Quatre ans plus tard, il était déplacé par l'évêché, qui lui donnait pour successeur l'abbé Siard (1870-71).
La même année 1871, Mgr l'Evêque envoya à Monget comme curé, M. Laloubère, ancien missionnaire du Dahomey, et qui, de longues années durant, avait été prêcher l'Evangile aux noirs et leur apprendre à mieux aimer la France. En 1876, le curé reçut son changement pour Gaube, au doyenné de Villeneuve.
Tôt après, parut l'abbé Abbadie, précepteur des enfants du Baron de Cardenau, à Tilh.
En 1878, le curé de Monget fut transféré à Luglon, d'où il revint comme desservant de Peyre, en 1886. "Le temps que j'ai passé à Monget, écrivait celui-ci, a été pour moi un temps de joies et de douces consolations. Je quitte mon poste à regret, malgré l'importance de celui qui m'est offert à Luglon."
De 1878 à 1882, Monget demeura sans curé. L'Administration Diocésaine y envoya alors M. Hontanx, lequel, en 1884, partit pour Castel-Sarrazin. Il mourait en 1924, à Castandet.
De 1884 à 1886, nouvel interrègne.
En 1886, et jusqu'en 1893, certaines difficultés d'ordre administratif, amenèrent l'évêque à supprimer tout service religieux dans la paroisse.
En août de cette même année, l'abbé Passicos, ancien vicaire de St-Martin-de-Seignanx et de Monfort, vint mettre fin à cette douloureuse situation. Arrivé à Monget, le curé trouva beaucoup à faire, mais la besogne ne l'effraya pas. Malgré la pauvreté de la paroisse et le peu de ressources de la Fabrique, il parvint assez vite à restaurer l'église et le presbytère. On lui doit le carrelage du sanctuaire et le passage en céramiques de la nef (1895), ainsi que les peintures du choeur (1896). Grâce à son zèle persuasif, grâce à sa popularité de bon aloi, la paroisse se fit une nouvelle et très heureuse mentalité. Monget connut même alors une certaine gloire, du fait de sa Chorale, qui à cette époque, groupa autour du curé les concours les plus inattendus.
M. Passicos, enfant du pays, puisqu'il était né à Samadet, aimait se mêler à la population. Fervent du jeu de quilles, et doué d'ailleurs d'une force peu ordinaire, il venait, le dimanche, jouer la partie avec les amis de la boule ronde. Et puis, quand arrivait l'heure des Vêpres, joueurs et spectateurs précédaient le curé à l'église, où l'on chantait à plein coeur, et psaumes et cantiques.
En 1897, Mgr transféra à Urgons le curé de Monget, et lui donna pour successeur l'abbé Cazaumayou, vicaire à Roquefort.
Celui-ci fut installé en octobre par le Chanoine Latourette, doyen de Hagetmau.
Toute son attention se tourna vers l'église, et, grâce à l'appui et au dévouement qu'il trouva dans l'institutrice d'alors, Mlle. Lalanne, il procura à la paroisse un dais neuf et complet, qui coûta 300 francs.
En 1900, le curé renouvela une partie du linge de sacristie, et fit placer à l'entrée de la nef les deux petites cuvettes en marbre blanc, pour lui servir de bénitiers. L'année suivante, en 1901, M. Cazaumayou fut transféré à Peyre, et, en 1907, à Meilhan. Il est, depuis 1909, curé de l'importante paroisse de Pontonx.
En août 1901, arriva à Monget, l'abbé Lafitte, vicaire à Miramont.
Un mission fut donnée en 1905, par l'abbé Moncade, (de Lapierre) mort, depuis, doyen de Sore. Celle-ci dura quinze jours, et fut prêchée par MM. Dédeban et Trémon, de Buglose. Elle fut pour la paroisse une source de grâces et de bénédictions: son mémorial est la croix de Péré, aux avancées du village. A cette occasion, Mme Raté, de Peyrondine, donna à l'église le beau cadre de N.D. du perpétuel Secours, appendu aux murs du sanctuaire.
Nous voici à l'année 1906, l'année fatidique pour l'Eglise de France. C'est l'époque des Inventaires et de la persécution religieuse à travers le pays. Monget ne devait pas, lui non plus, échapper à la rigueur des lois.
Le 7 mars, M. Gouraud, percepteur à Samadet, vint dresser l'état des biens de toute nature, détenus par la Fabrique. Le curé, obéissant aux ordres donnés par l'Evêché, lut une énergique protestation, et refusa de faire devant l'envoyé des Domaines, l'estimation du mobilier cultuel.
Après le départ de l'abbé Cazaumayou pour Meilhan, le curé de Monget, gardant toujours son titre canonique, obtint de Mgr Touzet, l'autorisation de venir résider à Peyre.
Nous n'avons pas à raconter ici à quelles difficultés il s'y heurta, de la part de certaines familles; mais il nous est impossible de ne pas souligner que la malignité et des influences occultes qui ne désarmaient pas, furent alors à l'origine d'événements pénibles, où l'on fit intervenir la justice française, mais d'où le curé sortit sans avoir vu sombrer sa réputation... La calomnie en fut pour ses frais, et Dieu qui ne laisse jamais rien d'impuni, ne tarda pas non plus à avoir le dernier mot.
En novembre 1921, l'abbé Lafitte reçut son changement pour Haut-Mauco, et nous passa la houlette, avec charge de veiller sur Peyre et sur Monget.
Pendant notre ministère, nous eûmes le 7 mai 1922, la bénédiction d'une statue du Sacré-Coeur, donnée par Mme Eugénie Massétat, née Dubourdieu, de Peyre. - Le 28 octobre 1923, eut lieu l'inauguration du Monument aux Morts de la Guerre, où des hommes politiques vinrent faire ostensiblement l'apologie de leur parti et exalter la République... En janvier 1924, nous achetons des gerbes de fleurs pour le maître-autel. - Le 9 août 1925, la paroisse assista à la bénédiction d'une statue de St Antoine de Padoue, laissée par Mme Laborde, de Lavallée. - En juillet 1926, Mme Dubourdieu, du Plassot, donne à l'église, pour le grand autel, deux beaux vases en cuivre repoussé, et du linge pour l'oratoire à la Vierge.
En décembre 1929, acquisition d'une étole pastorale noire; et de burettes en cristal (don de Mme Campagne, du Grillon). - En mars 1930, enfin, M. le Maire de Monget nous remettait un appartement au presbytère communal.
En avril 1931, nous quittions Peyre et Monget pour la cure de St-Aubin, remplacé par notre frère, venu de Callen.
1- Depuis lors, le nombre des habitants n'a fait que décliner.
2- De 1931 à 1936, l'abbé Louis Lamaignère. Depuis 1936, le curé de Mant assure la desserte de Monget.