[Sommaire Doazit] [Henry de Laborde]


Recopié d'après l'Armorial des Landes, du Baron de Cauna, Tome III ; 603p. ; Paris, chez Dumoulin ; Bordeaux, typographie Ve Justin, Dupuy et Comp. ; 1869 ; pages 455 à 603.
— Publié aussi en tiré à part : Relation véritable des choses les plus mémorables ... ; Bordeaux ; Ve Dupuy ; 1869 ; in 8° de 132 pages. (Revue des questions historiques ; 1870 ; p.626).
— Publié encore, sous le titre de « Relation véritable des évènements de la Chalosse (1638-1670) », (par) Henry de Laborde Peboué de Doazit, extrait de Armorial des Landes, livre III-B par le baron de Cauna ; Éd. PyréMonde / Princi Negre ; Mounenh en Biarn ; 2007 ; 160 p.; ISBN 2.84618.476.3.

D'après la Revue de Gascogne (tome XI - 1870 ; pp.144-145), "On trouve dans le département des Landes plusieurs copies plus ou moins fidèles de ce manuscrit(*), dont l'original appartient à M. de Labeyrie, chef de division au ministère des finances et membre correspondant de la Société historique de Gascogne. L'édition que nous annonçons a-t-elle été faite sur l'original, ou sur une de ces copies dont nous parlons, et dans ce dernier cas a-t-on collationné avec l'original ? Nous n'en pouvons rien dire.
Paul T."
(*) Léonce Couture (Revue de Gascogne ; tome IX - 1968 ; p.187) dit, avoir vu une copie du manuscrit de Henri de Laborde Péboué, chez feu M. Monlezun et une autre chez M. Lugat, curé-doyen de Villeneuve de Marsan.

 

Présentation du journal de Henri de Laborde, par Léonce Couture.

Relation Véritable...

Table

Errata et Notes


RELATION VÉRITABLE,

des choses les plus mémorables passées en la Basse-Guienne depuis le siège de Fontarabie, qui fut en l'an 1638, et particulièrement des désordres et troubles arrivés aux sièges de Saint-Sever, Tartas, Ax ou Dax depuis ledit jour.

PAR HENRY DE LABORDE PEBOUÉ , DE DOAZIT.

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 Le 15 juin 1638, M. le. prince de Conti fesait descendre ses armées pour aller assiéger Fontarabie. Le régiment de Tournay passa à Doazit et y font de grands ravages en passant, et logèrent à Larbey et à Caupenne. Ces gens violèrent femmes et filles et maltraitèrent et attachèrent plusieurs personnes, et prenant ce qu'ils trouvaient dans leurs maisons. Alors la barrique de vin valait 18 livres et dans deux mois valut 30 liv.

Le siège se posa à Fontarabie le 26 de juin, et y demeura trois mois, à cause d'une continuelle pluie et le grand secours qu'à l'ennemi donna. M. le Prince et M. Labalette, fils à M. d'Épernon, furent contraints de lever le siège et se retirer. Et en retournant, les cavaliers de M. d'Epernon demeurèrent à Doazit dix-huit jours et y firent de grands dommages, car il fallait faire tous les jours cotises pour les nourrir.

Le roy ce France était pour lors conseillé par M. le Cardinal de Richelieu qui étoit un fort bon esprit. En ladite année 1638 il y eut assez de vin ; il se vendait pour la Toussaint à 16 liv. la barrique ; mesure froment à 14 s. ; blé à 18 s. ; mais la pluie continua jusqu'au 15 de décembre dudit an, ce qui fut cause que à peine pouvait-on semer le froment, mais Dieu permit qu'il fit beau temps et qu'il y eut assez de froment en l'année 1639.

p.455

(*) Recopié par Ph. Dubedout, d'après l'Armorial des Landes, tome III, publié en 1869, par le Baron de Cauna. Les numéros de page se rapportent à cette publication.

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En ladite année 1639, le temps était si fort et si chaud que les raisins se brûlèrent par les vignes ; la barrique de vin se vendait au mois d'août 24 liv. Il y demeura grande quantité de vin vieux, mais il y en eut fort peu de nouveau en cette année 1639. La barrique de vin se vendait du commencement à 24 liv., et à Noël la barrique de vin valait 30 liv. ; tout le monde criait la rareté du vin. La mesure de froment se vendait 20 s., mesure blé à 15 s.

Au commencement de l'an 1640 il y eut bien des cris(*) d'argent, et c'est à cause qu'une partie de l'argent se trouva rogné. Il y eut plusieurs personnes d'accusées, et à Pau furent accusés un prêtre et un orfèvre. On commença alors à peser l'or et l'argent, et continua longtemps.

Au mois d'août 1640 la barrique de vin valait 44 liv., et mesure de froment 20s., mesure de blé 15s. ; il n'y avait alors d'argent qu'en pièces d'Espagne, et le tout se pesait. En cette année 1640 il y avait eu assez de froment mais il y eut peu de millet à cause du débordement des rivières qui les gâta, ce qui fut cause qu'il devint cher, car mesure de froment valait à Saint-Martin 25 s., mesure de blé 20 s en l'an 1640 il y eut assez de vin et se vendait la première barrique à 27 liv. et après, au mois de d'avril de l'an 1641, il s'en trouva à 25 liv. Mesure de froment à 30 s. mesure de blé valait alors 24 s.

Le 19 avril 1641 il y eut une grande gelée qui fit un grand dommage aux vins, mais il n'y eut pas autant de mal qu'on le croyait.

Au mois de mai 1641, le grain haussa, car mesure de froment valait 40 s., et mesure blé 31 s. Mais, par la grâce de Dieu, ça ne dura que 15 jours, et se retourna peu à peu. Au mois d'août 1641, la barrique de vin ne valait que 15 liv. et mesure de froment 22. Mais en septembre, mesure froment valait 32 s. mesure blé 27 s.

La vendange de l'an 1641 il y eut assez de vin et en y demeura grande quantité du vieux. Il y eut assez de millet en Chalosse, mais en la Lande il y en eut que fort peu. Mesure de blé valait à Saint-Sever 20 s. le 19 octobre, mais personne n'achetait point de vin.

p. 456

(*) (Ph. Dubedout :) Voir note en page 603, et le mot "descride" en page 517 : il faut lire "descri d'argent".

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Au commencement de l'an 1642, la barrique de vin valait 12 liv., mesure de blé de Saint-Sever à 18 s., et à l'avril 1642, la barrique de vin ne valait que 10 liv. ; et en juillet 1642 barrique de vin valait 12 liv. ; mesure de froment à :38 s., mesure de blé à 23 s. Pour lors fit une longue pluie qu'on ne put y semer le millet, car il dura longtemps qu'il pleuvait toujours sans en passer un seul jour.

En septembre 1642, la barrique de vin de vendange 15 liv. l'on fit une grande quantité de vin sur le pays, qui fut cause que le vin se vendit tout.

Cette année il y eut fort peu de millet, qui fut cause que le vin haussa un peu ; mais il y eut bien assez de vin. A St-Martin 1642 mesure de froment à 32 s., mesure blé, 23 s., mesure millet 18 s., barrique de vin 15 liv. mais il n'y eut point du tout du vin qui fut cause qu'il n'y avait point d'argent sur le pays de Chalosse.

En ce temps, M. le cardinal Richelieu mourut, ce qui fut cause que la France souffrit de grands maux.

En janvier 1643, mesure de froment valait 35 s., mesure de blé 25 s., mesure de millet 23 s. ; et si passa grandes famines, car barrique de vin ne valait que 10 liv., et personne n'en achetait aucune pièce.

En février1643, il y eut un grand débordement des rivières qui emporta tous les ponts de Bayonne et fit grand domage. En ce temps, un marchand bladier de campagne qui venait du marché de Montaut, fut tué par des gens inconnus qu'on n'a jamais seu trouver. Mesure de blé valait pour lors 38 s.

En mars 1643, mesure de blé valait 20 s. à Saint-Sever, la barrique de vin à 13 livres. Sur la fin dudit mars, mesure de blé valait à Saint-Sever 37 s. ; barrique de vin 14 liv. et il y avait déjà grande pauvreté dans le pays, car en la moitié des maisons il n'y avait point de pain, et en mai 1643, mesure de froment valait 3 liv., mesure de blé 45 s. et si passait déjà grand faim.

En ce temps là le roi Louis XIII mourut et Louis XIV succéda, qui était fort jeune. En juin 1643, la mesure blé valut déjà 24 s., et la barrique de vin à 16 liv., et en juillet ...

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... 1643, barrique de vin valut 22 liv., mesure de blé 27 s. Pour lors, le millet était fort beau par les champs et y avait eu assez de froment. A la fin d'août 1643, mesure de froment valait 35 s., mesure blé 32 s. , barrique de vin a 16 liv.

Sur la fin d'août on refusa les doubles, et personne n'en voulait aucun que pour deniers.

On parla de rabaisser l'argent, qui fui cause que mesure de froment valut 45s. et mesure de blé 40 ; mais, par la grâce de Dieu ne dura guères.

Au commencement du mois d'octobre 1643. la barrique de vin valait 20 liv., mesure de froment 38 s. mesure de blé 32, et y avait assez de millet qui valait 20 s. Il n'y demeura que fort peu de vin vieux, en n'en y eut que fort peu du nouveau, tellement qu'on criait la rareté du vin.

En ce temps, M. de Labalette retourna en son gouvernement, lequel avait demeuré depuis le siège de Fontarabie, à cause qu'il avait été accusé de trahison audit siège. En novembre 1643, la barrique de vin valait 24 liv., mesure de froment 48 s., mesure de blé 40 s. En décembre 1643, la barrique de vin valait 28 liv.

En ce temps, l'on parla grandement de faire mourir les sorciers, et arriva un commissaire en Chalosse qui en fit mettre grande quantité en prison, mais ce fut une grande affronterie qu'il n'en mourut pas aucun.

En ce temps, on tourna aussi parler de rabaisser l'argent, ce qui fut cause que le vin et le grain haussa un peu. En janvier 1644, barrique de vin valait 30 liv., mesure de froment 58 s., mesure de blé 50 s., mesure de millet 38 s. En février 1644 la barrique vin valait 27 liv., mesure de froment à 46 s., mesure de blé à 35 s., mesure de millet à28 s. ; mais l'argent ne rabaissa point.

A l'avril 1644. il fit forte grêle qui emporta une partie du vin en Doazit. Au 1er juin 1644, mesure de froment 3 liv. 5 s., mesure de blé 52 s., mesure de millet 45 s. et s'y passait de la grande faim ; mais il s'y trouvait du grain à vendre avec argent.

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En l'an 1644, il y eut assez de froment, grâces à Dieu ; il se vendait du commencement à 40 s. la mesure, et bientôt après valut 45 s. la mesure, et mesure de blé 40 s. En ce temps le millet était fort beau par les champs.

Le 29 de juillet 1644, fit grandement grêle pour tout Doazit qui emporta casi tout le vin en Doazit et en quelque autres lieux. Alors barrique de vin valait 12 liv. et ne s'en vendit plus de toute cette année.

En l'an 1644, il y eut assez de vin et tout à fait grandes vendanges, c'est à dire où il n'y avait point grelé. Mesure de froment valait 40 s., mesure de blé 36 s. ; il y eut assez de millet. En octobre 1644, mesure de millet valait 20 s., et en novembre 1644 mesure de froment valait 32 s , mesure de blé 30 s., la barrique vin à 16 liv.

En mars 1645, barrique de vin ne valait que 12 liv., mesure de froment 30 s., mesure de blé 24 s., mesure de millet 16 s. Le temps était fort beau et personne n'achetait point de vin et n'y avait point de vin en Chalosse.

En avril 1645, mesure de froment à 24 s., mesure de blé 17 s., mesure millet 14 s., barrique de vin 16 liv. et le froment était fort beau par les champs.

En juillet 1645, mesure de froment à 20 s., mesure de blé à 15 s., barrique de vin 14 liv. et fesait beau temps. Les vins étaient fort beaux ; la bouteille de vin valait 45 s., et y eut assez de froment.

A la vendange 1645 il y eut grande abondance de vin et n'y demeura point de vin vieux. Le bois de barrique se vendait à 4 liv. 10 s., et le vin vieux valait 20 liv., mesure de froment 24 s., mesure de blé 18 s. Personne n'achetait point du vin nouveau ; en Chalosse, n'avait point d'argent que fort rarement et n'y eut que, peu de millet.

En mars 1646, la barrique du vin ne balait que 8 liv. mesure froment 23 s., mesure de blé 15 s., mesure de millet 13 s.. et fesait pour lors fort bon vivre.

En mai 1646, barrique du vin ne valait que 7 liv. 10 s., froment 24 s., mesure de blé 14 s. Cette année 1646 fit de grandes chaleurs jusqu'à sécher les fontaines.

Au mois d'août la barrique de vin valait 10 liv. ; il y eut ...

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... assez de froment et se vendait à 22 s. la mesure, mesure de blé à 15 s., mesure de millet 12 s.

En septembre 1646, il plut fort toute la vendange, tellement qu'il fit fort mal amasser le vin et le millet ; il n'y eut que peu de millet et était fort mauvais ; il y eut assez de vin. Le bois de barrique valait 4 liv., mesure de froment 24 s., barrique de vin 14 liv.

Au premier février 1647, la barrique vin 12 liv. et ne fesait aucun froid de ce mois. Mesure de froment à 24 s. mais il se changea en peu de temps. Le 21 de février 1647, il fit un grand et si gros vent, qu'il rompit et dérassina grande quantité et grand nombre d'arbres et maisons et fit tomber grande quantité de chênes par tout le pays, et même à Luguespin plus de vingt mille chênes et hays (hêtres), et le pin de Saint-Cricq se rompit qui était le plus grand de la France ; plusieurs églises tombèrent par terre et même le clocher du Mus tomba. Les ponts de Bayonne se rompirent ; plusieurs personnes et bateaux se noyèrent sur les grandes rivières, tellement que l'on ne saurait dire ni croire le grand dommage qu'il fit, et personne n'en avait jamais vu un si grand et fit aussi de grands dommages et bareys aux églises et maisons et bétail. Plusieurs personnes moururent et l'église du Bizoc tomba aussi.

Toute cette année 1647, la barrique du vin valut 12 liv. jusqu'à la Saint-Jean, mais après la Saint-Jean le vin se pourrit presque partout, tellement que la barrique de bon vin valait, au 15 août 1647, 24 liv. Il y eut assez de froment ; il se vendait au commencement 22 s., mais il fit une grande sécheresse tant que le millet était quasi mort par les champs, ce qui fut cause qu'au 20 août 1647, mesure de froment valait 25 s., mesure de blé 20 s., le bon vin se vendit tout. Le bois de barrique se vendait 40 s. ; il y avait grande abondance de bois à vendre, à cause que ledit vent avait mis les chênes par terre, et à la fin du mois d'août 1647 la barrique de vin valut 30 liv.

Mais la première semaine de septembre 1647 il fit grand chaud qui brûla grande partie des raisins par les bygnes. Audit an 1647, il y eut assez de vin ; il se vendait du ...

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... commencement à 15 liv. rendu à Mugron, mesure de froment à 27 s., mesure de blé 20 s., mesure de millet 15 s.

En janvier 1648, la barrique du vin valait 12 liv., mesure de froment 28 s. Pour lors, il s'y fesait grandes accusations des faux monoyeurs en Chalosse, et entr'autres M. Lacouture de Cerresloux fut accusé et pris prisonnier, et y demeura deux mois, et après il fut trouvé innocent et mis en liberté, et Poutenx de Souslens fut pendu.

En mars 1648, la barrique de vin à 13 liv., mesure de froment à 30 s. ; et en juin 1648, la barrique de vin à 18 liv., mesure de froment à 27 s., mesure de blé à 21 s. ; il demeura jusqu'en septembre au même prix. Audit an 1648, il n'y eut pas fort vin ; le bois de barrique de barrique de vin à 40 s. En décembre 1648, la barrique de vin valait 14 liv., mesure de froment 28 s , mesure de blé 20 s., mesure de millet 15 s.

En février 1649, mesure de froment à 28 s., mesure de blé 22 s. et la barrique de vin se vendait à 18 liv. pour lors à Paris y avait un grand bruit entre le Roi et le Parlement, mais en juillet 1649, le Roi et le Parlement se sont accordés. Mais pour lors M. le duc d'Epernon et le Parlement de Bordeaux ont commencé un grand bruit qui a bien duré longtemps, et ceux de Bordeaux ont posé le siège à Libourne. Mais M. d'Epernon en fit mourir beaucoup de ceux de Bordeaux, et entr'autres y mourut M. de Chambre conducteur des Bordelais, et aussy y mourut des gens de M. d'Epernon quelques-uns.

Le 26 juin 1649, il fit un grand et gros chaud, tellement qu'il y mourut plusieurs personnes et bétail (en travaillant). Barrique de vin valait alors 22 livres, mesure de froment 28 s., mesure de blé 21 s. Bouteille (barrique bois) de vin 40 s. Ce fut alors que mon frère Raymond et moi fesions faire le chai derrière Labourdette. Cette année 1649, le millet se fit fort bien, mais la brume fit grand dommage aux vins, mais il demeura vendangé encore assez de vin, loué soit Dieu, et y avait eu aussi assez de froment. A l'août 1649, mesure de froment valait 30 s., mais il grela en plusieurs lieux qu'il n'y eut pas fort de vin, car, au ...

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... 10 novembre 1648, barrique de vin valait 24 liv., mesure de froment 36 s., mesure de blé 25 s.

Au mois d'avril 1650, mesure de froment à 35 s., mesure de blé 22 s., la barrique de vin 24 liv. Au mois d'avril 1650, le régiment de Navailles passa à Montaut et en plusieurs paroisses de Chalosse, et alla demeurer à Dax et aux environs dans le siège de Dax un espace de 20 jours et firent de grands domages : ceux de Montaut furent contrains de quitter la paroisse. En mai 1650, il y avait à Doazit de grandes maladies et y mourut plusieurs personnes, mais grâces à Dieu ne dura pas longtemps. Audit an 1650, il y avait assez de froment ; il valait à l'août dudit an 1650 35 s. la mesure, et mesure de blé 24 s. ; barrique de vin 30 liv. En septembre 1650, la barrique de vin valait 33 liv., tout se vendit et y eut fort peu de vin nouveau, mais il y eut assez de millet au mois de septembre 1650. Lesdits Bordelais avaient encore grande guerre avec M. d'Epernon, et y mourut plusieurs personnes de toute part. Le désordre était si grand, que le roi Louis XIV, âgé de douze ans, fut contraint d'aller à Bordeaux en personne, pour faire la paix, et ledit M. d'Epernon ne fut pas depuis gouverneur de Guienne.

En janvier 1651, les princes sortirent de prison, car M. le cardinal Mazarin gouvernait pour lors le roy et les avait fait mettre en prison, et lorsque lesdits princes furent en liberté ledit Monseigneur Mazarin fut chassé de France ; tout le monde désirait l'élargissement et la liberté desdits princes, il a bien causé de grands maux en France comme nous verrons ci-après. En février 1651, barrique de vin valait 24 liv., et au premier avril 1651 la barrique de vin valait 27 liv., mesure de froment valait 50 s., blé 42 s. ; à l'août 1651, mesure de froment 42 s., barrique de vin 30 liv. Le 17 août 1651, le Gave d'Orthez devint fort grand et si haut qu'il passait par dessus le pont d'Orthez et rompit les murailles du dessus ledit pont et emporta plusieurs personnes et maisons et meubles et fruits, tellement que jamais homme vivant ne l'avait pas jamais vu si grand, ni qui eut fait un si grand dommage : il emporta moulins, ...

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... terres, arbres, tellement qu'il fit un incroyable dommage. Un homme de Ste-Suzanne nommé Grassion du Capdan, m'a dit et assuré qu'il était à Orthez pour lors, et qu'il voyait que le Gave emportait 14 barriques de vin l'une après l'autre.

A la fin de l'août 1651, barrique de vin valait 35 liv. et n'en y demeura pas une seule barrique du vieux à vendre ; mais il y en eut bien assez du nouveau, car bois de vin valait 55 s. ; le temps était fort bel pour la saison. Il y eut aussi assez du millet, qui valait, au premier d'octobre 1651, à 20 s. la mesure, et mesure de froment 40 s. La vendange était faite au commencement de septembre, mais personne n'achetait point de vin à aucun prix, à la fin d'août 1651. C'était que pour lors on commença à parler qu'il y avait dispute et grande guerre entre le roi de France et M. le Prince ; M. ledit Prince arriva pour lors à Bordeaux pour être reçu gouverneur de la Guienne. Le roi était alors en âge de treize ans, tout le monde désirait la venue de Monsieur le Prince, croyant être à la fin de la guerre, mais ce fut bien le contraire, car Monsieur le Prince se fit payer les tailles par force et envoya grand nombre de cavaliers en Chalosse et même en Doazit demeurant deux jours et firent de grands dommages, et entr'autres allèrent de nuit voler la maison d'Espaunic, Mais M. de Doazit de tout son pouvoir épargna fort Doazit, car autrement il s'y en fut fait beaucoup plus de maux, car M. de Doazit travailla fort pour Doazit.

Le commandant de Monseigneur le prince se tenait à Tartas et le receveur des tailles, et quand on manquait de porter les tailles à Tartas, ils envoyaient les cavaliers par les paroisses. La ville de Tartas se tenaient tous pour le prince.

Lesdits cabaliers de Monseigneur le Prince arrivèrent à Doazit en décembre 1651, et y furent retournés, s'il n'eût été M. de Doazit, lequel travailla fort pour Doazit. M. de Justes, archiprêtre de Doazit, fit tirer un monitoire, disant que lesdits cavaliers l'avaient pris argent papiers et linge, et un cheval et autres meubles.

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Lesdits cavaliers demeurant longtemps sur le pays fesant de grands ravages. En janvier 1652, M. de Poyanne alla avec ses cavaliers attaquer les cavaliers de M. le Prince, en la Lande, au lieu nommé d'Arengosse, et en tua 10 et en mena prisonniers 50 à Dax ; ce fut bien cause de plusieurs maux par depuis en Chalosse. A la fin de janvier 1652 la barrique de vin se vendait 12 liv., mesure de froment à 2 liv., blé 24 s., mesure de millet 20 s. L'on craignait beaucoup des gens de guerre, et dans ce temps il n'y avait point d'argent sur le pays. Pour lors l'argent d'Espagne était tout perdu et n'en fallait point payer, car tout était argent de France et pièces de 7 s. En mars 1652, mesure de froment valait 50 s., mesure de blé 40 s., barrique de vin 13 liv. Mais les gens de guerre fesaient toujours grand dommage. Monsieur le Prince avait mis garnison à Tartas et à Mont-de-Marsan et à Grenade et fesaient toujours des courses, car le 19 de février 1652 les cavaliers de Tartas allaient à Singresse et firent plusieurs ravages, et même aux métayers de M. de Poyanne et portèrent tout à Tartas.

Le 21 dudit février 1652 M. de Poyanne s'alla présenter au Mont-de-Marsan, mais les gens de M. le Prince le firent retirer, et un de ses plus grands, nommé M. de Rolly, y mourut.

Le 2 mars 1652, une compagnie de cabaliers de Monseigneur le Prince arrivèrent à Doazit et allèrent attaquer les gens de M. de Poyanne à Puyallé, et se battirent, et un des plus grands de Monseigneur le Prince y demeura mort sur la place, devant le château de Puyallé, et les gens de Monseigneur, le Prince s'en retournèrent droit à Grenade, du lieu d'où ils étaient venus, et en passant dinèrent à Doazit, sur le champ de Mariote près l'ou Cammengé. Le capitaine se nommait M. Darricou, à Doazit, lui baillèrent 700 liv. sur la promesse qu'il leur fit de n'y retourner plus, et le lendemain ils passèrent le cavalier mort par Doazit et le portèrent à Grenade.

Sur la fin de mars 1652, lesdits cavaliers de M. le Prince se retirèrent tous vers Bordeaux, à cause que M. le comte ...

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... d'Harcourt qui était pour le roi et fort puissant, arriva sur le pays ; lesdits cavaliers de M. le Prince se retirèrent.

Et pour lors M. de Doazit alla trouver ledit comte à Agen et y demeura dix-neuf jours, fesant pour le siège de Saint-Sever des compositions avec ledit comte qu'il ne viendrait point dans ledit siège de Saint-Sever avec ses gens à condition que ledit siège de Saint-Sever lui baillera 45 mille livres.

A la fin du mois d'avril 1652, la barrique de vin valait 18 liv., mesure de froment 55 s., mesure de blé 40 s., mesure de millet 25 s. Alors à Doazit se fit grande quantité d'eau-de-vie ; en ce temps l'argent haussa, savoir le louis de 6 sols.

En juin 1652, le temps était fort humide et pluvieux, qu'à peine fit-on le millet. Le 11 juillet 1652, il fit grèle à Saint-Cricq et la pluie dura vingt-deux jours sans faire un beau jour. Alors le froment était presque coupé par les champs, tellement que ladite pluie le gâta et le fit pourrir. Tellement qu'il n'y eut pas fort de froment, il ne valait pas guères, tellement que tout le monde criait la faim. Nous sommes à la grande faim ce qui ne manqua pas, car le grain haussa tout à coup. Mesure de froment valait 3 liv., mesure de, blé 50 s., barrique de vin 18 liv.

A la fin de septembre 1652, mesure de froment valait 3 liv. 15 s., mesure de blé 3 liv. 2 s. A la vendange 1652, il y eut assez de vin, mais il y eut bien peu de millet, tellement que tout le monde criait la grande faim. Alors en Chalosse n'y avait point gens de guerre, loué soit Dieu. En novembre 1652, les cavaliers de M. de Poyanne vinrent en Chalosse et firent de grands ravages en Chalosse. Alors la mesure de froment valait 3 liv. 10 s., mesure de blé 3 liv., et le vin à bon compte, personne n'en achetait point. L'on fesait de l'eau-de-vie à Doazit et s'y brûlait grand vin de jour et de nuit. En décembre 1652, le temps était fort beau et le froment sorti par les champs, et sur la fin dudit décembre 1652, il arriva à Tartas un commandant de M. le Prince nommé M. Balthazar avec grand nombre de cavaliers, et d'abord qu'il fut à Tartas, il alla au Sabla de Dax ...

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... mettre le feu à la maison de M. de Poyanne et fit de grands ravages et s'en retourna à Tartas, et se saisit aussi du château de Cauna.

Et à la suite arriva M. de Candalle, fils de M. d'Epernon, avec fort grand nombre de gens fesant pour le roi, et se retira au Mont-de-Marsan et à Saint-Sever.

Le 28 décembre 1652, M. de Doazit en compagnie de M. de Bonnaguet son fils, partit de Doazit pour aller rendre visite audit M. de Candalle, mais malheur fut pour eux, car, étant au bois de Mauco, ils furent pris prisonniers par un commandant de Balthazar nommé Lartot et les mena audit Tartas ; et au bout de six jours, M. de Doazit eut permission d'aller jusqu'à Doazit.

Les cavaliers de Balthazar font tous les jours des courses par toute part et font de grands ravages. Alors mesure froment valait 3 liv. 19 s., mesure de blé 3 liv. 4 s., millet 55 s., mesure d'avoine 2 liv., le quintal de foin 50 s. et n'y a point d'argent.

Le commencement de l'an 1653 est fort à craindre. Nous avons le grain fort cher, la mesure froment 3 liv. 15 s., mesure blé 3 liv. 4 s., mesure millet 2 liv. 15 s., mesure avoine 2 liv., le quintal de foin à 3 liv., et il ne se trouve point ni grain ni fourrage ; nous sommes à la grande faim.

Encore de plus ce que nous avons n'est pas nôtre ; l'un dérobe le pain, l'autre la chair, l'autre les choux et d'autres meubles, l'autre le prend d'autorité ; il y a tant de voleurs, qu'il n'y a personne qui n'ose aller au marché, ni négocier les affaires à cause des voleurs et gens de guerre qui prennent tout.

A Saint-Sever, il y a grand nombre de gens de guerre qui mangent tout ce qui se trouve dans le siège ; ils sont gens à M. de Candalle.

A Tartas aussi grand nombre de gens de Balthazar qui font de grands ravages et menacent de perdre le pays et font plusieurs prisonniers, et entre autres était Monseigneur de Doazit, comme nous l'avons dit sur la fin de l'année passée. Mais encore lui ont fait la faveur de le laisser aller jusqu'à Doazit avec condition qu'il laisserait M. son fils à ...

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... Tartas et qu'il retournerait dans huit jours. M. de Doazit arriva le vendredi troisième jour de janvier 1653 ; mais il ne demeura pas longtemps à Doazit, car, après qu'il eut parlé à sa famille et amis, s'en est allé en bon état ; il se retourna rendre prisonnier audit Tartas et y fut le jeudi 9 de janvier 1653. MM. de la noblesse purent y admirer la grande franchise de Monsieur de Doazit. Et le peuple de Doazit dut avoir une grande douleur de Monseigneur de Doazit, car j'en ai eu en mon particulier un grand regret. Ledit Monseigneur de Doazit se va rendre prisonnier pour soulager la paroisse de Doazit, et sans comparaison il m'a fait souvenir la passion de mon Sauveur Jésus-Christ qui voulut mourir pour nous.

A Doazit particulièrement sont coutisés pour les gens qui sont à Saint-Sever, dans douze jours 1,200 liv. et me crains que nous sommes au commencement. Tout le monde crie la grande misère ; les pauvres viennent à toutes heures à grande troupe devant les portes demander du pain. O grande misère ! celui qui a quelque chose n'ose pas demeurer en sa maison qu'avec grande crainte d'être prisonnier ou volé, mais il faut avoir recours au bon Dieu, et lui prier qu'il ait pitié de nous affin d'avoir le pain en France ; mais si Dieu ne fait la grâce à M. de Doazit de retourner bientôt, Doazit est bien dangereux d'être ruiné car il n'y a plus de quoi vivre ; il est vrai qu'en Doazit a encore du vin pas une pièce et quand viendrait un marchand pour en acheter et le vouloir faire tirer à Bayonne il serait impossible, car le quatrième jour de Pentecôte Balthazar fit prendre les bateaux d'Auribat et les a fait mener à Tartas.

Il s'y est fait encore d'autres ravages, car sur la fin de novembre de l'an 1652, les cavaliers de M. de Poyanne allèrent à Serresloux et firent de grands ravages et volèrent la maison de M. de Lacouture seigneur dudit Serresloux, et menèrent ledit Lacouture prisonnier à Dax ; et après il avait retenu environ un mois et trouvé qu'il n'avait aucun tort, le mirent en liberté et se retira audit Serresloux, et tant d'autres ravages que les cavaliers font tous les jours.

Le 12 janvier 1653, les cavaliers de Monseigneur de ...

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... Candale partirent un grand nombre de Saint-Sever pour se trouver à Saint-Justin où Balthazar se trouva aussi avec grand nombre de ses gens, tellement que le 11 dudit janvier ils se battirent ; mais M. de Candale en eut du bon, car un commandant de Balthazar nommé Gaston y demeura mort sur la place, encore y demeura des gens de Balthazar morts et prisonniers jusqu'au nombre de trois cents.

Le 8 janvier 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent à Nerbis et firent de grands ravages, et firent prisonnier un homme de Mugron nommé Lannefranc et le menèrent à Tartas, mais il fit composition avec 300 liv. qu'il leur bailla et se retira à Mugron.

Le 9 de janvier 1653, les cavaliers de M. de Poyanne en compagnie de plusieurs gens de Montfort allèrent au pont du Nard pour garder que les gens de Balthazar ne passassent l'Adour ; mais ils furent surpris en telle façon que les gens de Balthazar en tuèrent trois et menèrent vingt-trois prisonniers à Tartas.

Le 14 janvier 1653, de nuit, M. de Lugat juge de Montaut a été pris prisonnier par les gens de Balthazar et mené à Tartas.

Le 16 janvier 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent à Mugron pour voler et faire prisonniers mais ceux de Mugron se défendirent et en firent tomber un tout mort sur la place et un autre mourut en chemin et le portèrent mort à Tartas. Encore j'ai appris que M. le chevalier de Lassalle frère de Monseigneur de Mauyon, vieux seigneur de Montaut, était un chef de M. de Poyanne, a été tué par les gens de Balthazar à Magescq, le commencement de la présente année, lequel est fort regretté du pays.

Le 8 janvier 1653 la pluie a commencé en telle façon, que l'Adour est devenue un peu grande, en telle façon que les gens de Balthazar ne peuvent passer l'Adour à gai, ce qui a fort soulagé les maisons de deçà l'Adour.

Mais avec tout cela le peuple pâtit grandement, car il n'y a plus de grain ; il se vend encore au prix que nous avons dit et personne n'a point d'argent, et tout le fourrage que l'on peut avoir faut porter à Saint-Sever tous les jours ; ou ...

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... si on manque on envoie les cavaliers aux paroisses qui mangent tout ce qui s'y trouve.

Les cavaliers de Balthazar ne s'arrêtent pas de faire des courses par les landes et vont jusqu'au Sablar (Dax), et font de grands ravages tellement que tout le monde fuit. A Montaut ont quitté tous et remuent tous les meubles ; les uns sont réfugiés à Hagetmau et d'autres dans d'autres endroits aux environs, tellement que la misère est si grande que le pauvre monde n'en peut plus. Il n'y a plus de marchés aux lieux accoutumés ; les chemins ne sont pas libres, tout le monde crie la grande misère. Ceux de Saint-Sever ne laissent pas de faire imposition tous les jours par les paroisses du siège pour nourrir les gens de Monseigneur de Candale qui sont à Saint-Sever et font aussi de grands ravages, tellement que le pauvre monde ne peut plus résister à fournir fourrage, et ils n'ont plus de quoi vivre. Mesure de froment vaut 3 liv. 15 s., mesure de blé 3 liv. 2 s., mesure de millet 55 s., barrique de vin 15 liv., et il ne s'y trouve plus de grain. Tout le monde est en grande nécessité. Les maîtres de famille sont contraints d'abandonner une partie des métayers et bailets à cause qu'ils n'ont pas de quoi les nourrir. Tout cela est réduit à mendier le pain, mais personne n'en a pour leur en donner.

O grande misère ! je veux encore parler du baillant M. de Doazit qui est allé se rendre prisonnier comme nous avons dit, et demeura à Tartas huit jours, et après il se retira à Doazit et laissa M. de Bonnaguet son fils encore à Tartas. C'était le 10 janvier 1653 qu'il arriva à Doazit, mais il n'arrêta pas longtemps à Doazit, car il travaille fort, non pour son intérêt, mais pour tout le siège de Saint-Sever, afin d'en faire sortir les gens de justice de guerre, et c'était l'homme seul qui travaillât de tout son pouvoir pour tout le peuple et allait tantôt à Saint-Sever et aussi à Dax parler à M. de Poyanne, et au Mont-de-Marsan parler à M. de Trasy pour, remédier aux grands désordres du pays.

Si je voulais mettre tout ce qui est fait et passé, tout ce qui s'est passé de ces ravages de guerre et d'autres bouleries qui fut fait en ce mois de janvier, je ne pense pas ...

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... trouver assez de papier ; c'est donc assez pour ce mois de janvier qui a été très mauvais. Le 1er février 1653 à Montaut, arriva un grand nombre de cavaliers de ceux de M. de Candale, mais à cause que tout Montaut avait quitté et vidé, les cavaliers ne trouvèrent ni foin, ni avoine, ni rien pour manger ; ils firent de grands ravages aux meubles et à tout ce qu'ils trouvaient, et au bout de deux jours ils allèrent les uns à Saint-Sever, les autres à Mugron, et une partie se retirèrent à Gaujacq, et menèrent M. de Moringlane de Montaut et un son métayer prisonnier, à cause que ledit Moringlane était accusé qu'il avait indiqué M. de Lugat aux gens de Balthazar qui le tiennent prisonniers à Tartas depuis quelques jours, comme nous l'avons dit ci-dessus.

Les cavaliers de Balthazar vont tous les jours faire des courses par la lande voler tout ce qu'ils trouvent, et entre autres sont allés voler le château de Castillon et ont porté tout à Tartas et fait d'autres ravages qu'ils font tous les jours par tout le pays de la lande jusqu'à Dax.

Environ le 8 février 1653, une partie des gens de Saint-Sever se sont retiré, ce qui fut cause que ledit siège de Saint-Sever fut un peu soulagé, mais je crois que ce fut par l'entremise de M. de Doazit.

Le 16 février 1653, ledit M. de Bonnaguet eut congé de Balthazar, il s'en vint à Doazit et fut fort bien reçu à la grande joie de ceux de Doazit. Je ne puis arrêter de parler toujours du noble et vaillant Monseigneur de Doazit, parce qu'il travaille toujours pour tout le peuple, et c'est l'homme seul qui hasarde sa peine et sa vie pour tout le pays ; car le 17 de février 1653, sans avoir égard au mauvais temps ni aux mauvaises rencontres qui lui put arriver en chemin, il est parti devers Agen pour parler à M. de Candale afin de soulager le pays et mettre ordre aux grandes misères que le pauvre peuple souffre, cause des grands ravages qui se font tous les jours par les gens de guerre.

Il y a encore d'autres voleurs dans le pays qui sont cachés, qui font grand domage de jour et de nuit, tellement qu'il n'y a plus moyen de vivre. Nous sommes à la grande ...

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... faim et réduits à la grande misère, il n'y a plus rien pour manger ; car si un homme va au marché avec de l'argent, il est dangereux d'être volé, et s'il a un bon cheval ou un bon habit, on lui ôtera, et s'il fait porter du grain ou d'autres marchandises, on lui prend tout et encore est-il dangereux d'y perdre sa vie, et celui qui a quelque chose en sa maison ne l'a pas assuré ; s'il a une bonne maison, il y a toujours quatre-vingt-dix pauvres devant la porte demandant le pain.

Les gens de Balthazar sont allés voler le château de Castillon et la lande et ont tout porté à Tartas ; et le 27 de février 1653, les cavaliers de Balthazar sont allés à Grenade et ont tué quatre hommes et mis le feu à quelques maisons et pillé tout ce qu'ils ont trouvé et ont porté tout à Tartas en leur garnison. Sur la fin de février 1653, il est arrivé à Dax un homme nommé le chevalier d'Aubeterre qui est commandant de M. de Candale, lequel est assez courageux contre Balthazar et a fort belle compagnie de cavaliers. Il est venu an secours de M. de Poyanne, au contre du cruel et tyran Balthazar, et on dit qu'il est aussi puissant et davantage que Balthazar.

Le 1er de mars 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent à Lamothe et ont mis le feu au château de Lamothe, et ont pris tout ce qu'ils ont trouvé de bon et s'en sont allés diner à Cauna, et après ils ont passé l'Adour au lieu nommé lou Goua de Laguilloun à Gua et allèrent droit au Cazeliou et par, le grand chemin jusques auprès de l'espitaoü de Mugron, et là étant se birent droit à la lande de Mounon et droit à Soube, et sont descendus en bas près l'Adour sur une plane de champ près du moulin de Castelmerlon. Ceux de Mugron et de Nervis les suivirent, et d'autre part les gens de M. de Poyanne et d'Aubeterre se rencontrèrent et là fut faist bataille et y mourut de ceux de Mugron et de Nerbis trois ou quatre, entr'autres y demeura mort sur la place un commandant de M. de Poyanne, fils de Monfort, nommé Lanoyaa, lequel ne fut pas fort regretté des paroisses de Chalosse, à cause des grands ravages et voleries qu'il y avait fait auparavant.

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En cette bataille en y mourut un grand nombre de gens de Balthazar, mais je n'ai point pu savoir à cause que les gens de Balthazar s'emportèrent leurs morts à Tartas. Audit Balthazar y demeura un fort bon cheval que l'on lui a pris ; on m'a dit que Balthazar avait donné nom à ce cheval Demi-Diable.

Ledit Monseigneur de Doazit a demeuré dix jours en son voyage d'Agen, mais il n'a pas pu encore obtenir le logement des gens de guerre à cause qu'ils demandent trop grande somme d'argent. Le monde est si pauvre qu'il ne peut plus résister aux grandes impositions qui se font tous les jours par toutes les paroisses du siège de Saint-Sever. La ville de Saint-Sever, pour la dépense qu'ils ont fait aux gens de guerre, demande grande somme d'argent, tant que la paroisse de Doazit y a de son particulier 1,440 liv. ; mais il est impossible de trouver tant d'argent à cause de la grande pauvreté qui est dans tout le pays. La disette est si grande que tout le monde pâtit et font fort ravages de guerre. Mesure de froment vaut 4 liv. 10 s., mesure de blé 3 liv. 8 s., mesure de millet 3 liv. 2 s., la barrique de vin à 14 liv. La pauvreté est si grande que dans le diocèse d'Aire a été promis de manger de la chair en temps de Carême, excepté le mercredi, vendredi et samedi. Toutes les paroisses sont ravagées excepté les terres de Monseigneur de Gramont qui n'y a point eu logement ; mais ils payent imposition aussi bien que les autres paroisses et partout le pays a grande pauvreté. Il y a une garnison à Mugron, et une autre à Saint-Sever, et une autre à Gaujacq ; il faut que les paroisses du siège de Saint-Sever entretiennent toutes ces garnisons et se font bien payer à leur discussions (discrétion), et si les paroisses manquent au payement au jour qu'ils mandent, ils s'en y vont les ruiner tout à fait ; il y a encore d'autres garnisons lesquelles s'entretiennent par les habitants de ce lieu, comme est à Hagetmau, à Doazit, à Nerbis, à Poyalé. La misère, est si grande, qu'il y a déja plusieurs personnes de mortes à cause de la grande faim, mais si l'on pouvait avoir la paix le monde serait un peu soulagé.

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Ledit Balthazar est si puissant et si cruel que tout le monde le craint ; il est allemand et non point noble, sinon pour ses armes ; il n'a point aucune religion de bonne. On dit qu'il est magicien ; il ne parle jamais familièrement à personne, mais parle toujours de tuer et de pendre ; il est un grand homme fort farouche et a environ quarante-cinq ans à ce qu'on m'a dit. Ledit Balthazar ne cesse de faire tous les maux incroyables, car tous les jours il fait des prisonniers et de grands ravages, tant en la lande que par de çà l'Adour et tout le monde le redoute fort. Il me serait impossible d'écrire tous les grands ravages que les gens de Balthazar font tous les jours, car il est le plus cruel qui fut venu en ce pays depuis quatre-vingts ans, et d'autre part les autres garnisons de M. de Candale qui sont en plusieurs lieux comme nous avons dit, nous ruinent tout à fait, tellement que nous sommes réduits à la grande misère. Mesure de froment vaut 4 liv. 15 s., mesure de blé 3 liv. 10 s., mesure de millet 3 liv. 4 s., barrique de vin 15 liv. rendu à Lahosse, car on ne peut passer le vin par autre chemin à cause des gens de guerre.

Le 9 mars 1653, Balthazar a fait partir une compagnie de ses cavaliers et les a envoyés à Grenade, mais M. le chevalier d'Aubeterre avec ses gens s'en est parti le lendemain devers Grenade, et là étant ont fait quitter la place aux gens de Balthazar, et en ont pris une partie de ceux de Balthazar, et les autres gens de Balthazar s'en sont retournés à Tartas au lieu de leur retraite.

Le 12 mars 1653, les cavaliers de M. d'Aubeterre sont arrivés à Montaut venant de Grenade, mais à cause que ceux de Montaut avaient quitté et vidé tout, ne trouvèrent rien pour manger. Ce qui fut cause qu'ils ont fait grand dommages aux meubles et à ce qu'ils ont trouvé, et ont tué deux hommes et en ont battu d'autres, et après y avoir demeuré deux jours se retirèrent à Dax et font de grands ravages en passant.

Environ le 15 mars 1653, il est arrivé, par la grâce de Dieu, du côté de Bayonne une grande abondance de grain, ce qui a été cause qu'il a un peu rabaissé. En ce temps le froment ...

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... était fort beau en Chalosse, c'est-à-dire par la campagne, et on espère qu'avec l'aide de Dieu on recouvrera le bon temps, après que la coeillette sera faite si Dieu nous fait la grâce de chasser les gens de guerre de ce pays.

Mais il est impossible à présent de payer la grande imposition et coûtise qui sont imposées par toutes les paroisses du siège de Saint-Sever, et je crois que aux autres sièges n'en sont pas de moins. Il y a beaucoup de paroisses qui sont tout à fait ruinées et ravagées. Mais à Doazit, grâces à Dieu et à Monseigneur de Doazit n'a point eu aucun logement du tout cet hiver ; c'est pourquoi les habitants de Doazit ont bien occasion de remercier M. de Doazit.

Le 17 mars 1653, les cavaliers de M. de Poyanne et ceux de M. d'Aubeterre firent rencontre avec les gens de Balthazar, de la l'Adour sur la lande dou Cauteré et là se battirent, et là mourut un commandant de Balthazar nommé Faget fils de Salis ; et ledit jour les gens de M. de Poyanne et d'Aubeterre se retirèrent à Montaut.

Le 17 mars 1653, les cavaliers de M. de Poyanne et d'Aubeterre se retirèrent à Montaut et y demeurèrent une nuit et après se retirèrent les uns à Gaujac et d'autres à Ségarret, et une compagnie s'en allèrent à Saut de Navailles ; ils étaient environ soixante cavaliers bien montés et passèrent chez nous à Peboué et nous firent ravage, savoir : une paire de bottes avec des éperons, deux paires de souliers, 4 liv. argent, ageaux et trois poules ; ils amenaient une vache je ne sais où ils l'avaient prise, elle ne pouvait plus marcher, ce qui fut cause que lesdits cavaliers la tuèrent devant notre porte, et la chair de ladite vache fut partie aux pauvres. D'autres cavaliers passèrent à Labeyrie et La Hibade et firent aussi grands ravages partout où ils passaient.

Le cruel Balthazar ne s'arrête jamais de faire tous les maux incroyables et même dans Tartas, il a pris les plus grands et les a fait rançonner à sa volonté, leur accusant qu'ils sont du contraire parti.

Le 20 mars 1653, Balthazar a pris deux fils (de) Vidart et les a menacés de les faire mourir jusqu'à ce qu'on ....

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... lui eut baillé 5,000 liv. de rançon, et ledit Balthazar est le plus cruel qu'il se fut parlé.

Le 22 mars 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent jusques auprès de Dax et tuèrent deux ou trois hommes et en firent des prisonniers de ceux qui allaient au marché de Dax jusqu'au nombre de 130 hommes et les menèrent à Tartas, et Balthazar les traite fort cruellement et fait défense que personne ne leur parle de composition, à peine de perdre la vie. Ne vous étonnez pas si je vous dis que Balthazar est tant cruel, car si vous parlez à un de ceux qui sont bien informés de lui, il vous dira qu'il est bien plus méchant que je ne saurais dire, car en ces prisonniers qu'il a pris auprès Dax entr'autre, il y en est mort un depuis avoir payé son rançon. Ces prisonniers disent qu'il vaudrait mieux être en purgatoire.

On dit que Balthazar n'a plus que 5,000 hommes tant à cheval qu'à pied, mais il est fort redouté., tant que tout le monde fuit de la grande peur qu'ils ont. M. de Poyanne et M. d'Aubeterre ont beaucoup plus de gens que lui, mais ils n'osent point l'attaquer ni l'attendre. M. de Vidart de Tartas s'est réfugié au château de Doazit, de peur d'être prisonnier de Balthazar qui le menace fort.

Le 27 mars 1653, M. d'Aubeterre ayant été averti que M. de Vidart était à Doazit, il envoya trente-cinq de ses cavaliers au château de Doazit parce que M. de Vidart était de Tartas. M. d'Aubeterre disait qu'il était du contraire parti, c'était le jour du Convan du Mus alors que M. de Doazit dînait au Mus avec les autres confrères, et les autres cavaliers étaient au château demander Monseigneur de Doazit, et six de ces cavaliers sont venus au Mus, et M. de Doazit croyant que ce fut des gens de Balthazar se cacha et lesdits cavaliers s'emmenèrent M. de Vidart à Saint-Sever, mais Monseigneur de Doazit les suivit et s'emmena M. de Vidart. Je vous assure que ceux de Doazit croyaient que ce fut gens de Balthazar, eurent une grande peur et tout le monde fuyait et se cachait dans les buissons ; mais ces cavaliers de M. d'Aubeterre n'ont point fait aucun mal à Doazit ni en chemin, et tout incontinent les nouvelles allèrent ...

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.... à Hagetmau ; là on avait une garnison que M. de Gramont y avait ordonnée, et le même heure les cavaliers dudit Haget allèrent au château de Doazit pour donner secours à M. de Doazit, croyant que ce fut des gens de Balthazar ; offrirent leurs services à M. de Doazit et se retirèrent audit Hayet.

Le 27 mars 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent à Hinx mettre le feu à quelques maisons et ont fait de grands ravages et prisonniers et ont mené le tout à Tartas.

Le 29 mars 1653, Balthazar manda à M. de Doazit qu'il se retirat à Tartas ou qu'il l'irait quérir prisonnier avec tous les bons maîtres de famille de Doazit, et le ferait mettre en prison à Tartas et qu'il s'en prendrait aux cautions ; mais M. de Doazit n'y est point allé, ladite caution étant M. de Bidart.

Ceux qui sont sortis des prisons de Balthazar, disaient qu'ils ont été au purgatoire. La plupart des bons paysans n'osent dormir en leurs maisons de la grande peur qu'ils ont a Balthazar.

Les cavaliers de Gaugeac et les autres garnisons passent tous les jours et font de grands ravages, et vident les moulins et les maisons, et prennent les moutons et agneaux par la lande et tout ce qu'ils trouvent, tellement qu'il n'y a personne qui ose apporter de l'argent ni tenir rien dans les maisons, car ces gens n'ont aucune pitié de personne. Nous sommes à la grande misère ; les pauvres meurent tous les jours de peur et de faim.

Les cavaliers de M. d'Aubeterre passent aussi tous les jours et emportent tout ce qu'ils trouvent. Les impositions sont si grandes que le monde n'en peut plus, et la plupart du monde sont réduits à mendier.

La mesure de froment vaut 4 liv. 5 s., mesure de Blé 3 liv. 5 s., mesure de millet 3 liv., barrique de vin 14 liv. Il s'y trouve du grain à vendre parce qu'à Bayonne en est arrivé grande quantité, mais il n'y a point d'argent pour en acheter. Balthazar fait toujours des courses et ne passe pas un jour que ses cavaliers ne fassent de grands ravages.

Le 6 du mois d'avril 1653, les cavaliers de Balthazar ...

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... allèrent jusqu'au cap du Pouy de Saint-Sever et prendirent deux charettes de blé et les portèrent au château de Cauna, parce que ledit Cauna se tient pour Balthazar.

Le 7 avril 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent au Greil prendre le nombre de vingt-cinq têtes de bétail et le menèrent à Tartas et à Cauna.

Ledit Balthazar fait couper le blé par la lande et le fait donner à ses chevals ; et ce qui est bien grande pitié, il n'y a plus moyen de résister aux grands dommages qu'il fait tous les jours.

Balthazar a taxé toutes les paroisses de la lande à sa boulounté et les curés particulièrement, et se fait bien payer. Ledit 7 avril 1653, à Serresloux est arrivé un grand nombre de cavaliers des ceux de M. de Poyanne et de M. d'Aubeterre, et y ont demeuré quatre jours tellement qu'ils n'y ont rien laissé. Ces cavaliers étaient maîtres audit Serresloux, car toutes les garnisons avaient quitté et d'autant qu'ils n'y ont trouvé de quoi vivre, ils sont allés voler au Biélé du Mus, et en Hagetmau et à Segarret ; et au Biélé de Marquebielle ; et sont allés jusqu'à Bedoura et à Cot et Sallebat et y ont fait de grands ravages ; sont aussi allés à Lahibade et y ont pris dix agneaux et un gros pain et d'autres meubles, et sont aussi allés vider le moulin de Hescaux, tellement qu'ils ont fait de grands ravages et ont porté tout à Serresloux.

Le 8 avril 1653, M. d'Aubeterre avec ses cavaliers alla à Cauna, et là étant a pris un grand nombre de gens et chevals de ceux de Balthazar et amenaient tout à Saint-Sever ; et lui est demeuré prisonnier un cavalier des siens, prisonnier qui est le fils de Soubaigné de Segarret de Saint-Cricq. Ledit Balthazar menace fort ceux de Doazit de les faire prisonniers et de les ruiner tout à fait à cause qu'il ne peut avoir en sa puissance M. de Doazit et M. de Vidart, et qu'il ne peut pas avoir tous les grands rançons qu'il demande.

Le 10 avril 1653, arriva à Saint-Cricq, un régiment de guerre à pied du nombre environ trois cent quarante hommes qui étaient Irlandais ; ils avaient la route à Montaut, ...

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... mais à cause que le Lous était fort grand, ils logèrent audit Saint-Cricq. Ce régiment était à Monseigneur le Prince qui allait en Espagne pour faire guerre au roi de France. Mais M. le comte de Toulonjeon les a pris à Bayonne et les a envoyés en Chalosse. Ils partirent de Saint-Cricq le 11 avril 1653, jour du Vendredi-Saint, et passèrent à Doazit et achetèrent tous les pains qui s'y trouva à vendre, mais on n'entendait point leur langage et s'en allèrent à Montant ; et deux jours après, jour de Pâques, ils allèrent dix ou douze à Doazit acheter du pain à cause qu'ils n'avaient trouvé rien à Montaut, et le 14 dudit avril lesdits Irlandais mandèrent à ceux de Doazit qu'ils leur envoyassent de quoi vivre ou autrement ils s'en iraient tous à Doazit, à cause qu'ils ne trouvent rien à Montaut, car tout Montaut avait quitté, et le 15 dudit avril 1653, à Doazit on porta grande quantité de pain auxdits Irlandais à Montaut, et aussi deux moutons, et ceux de Doazit pour leur désintéressement ont pris à ceux de Montaut quantité de bétail et autres meubles que ceux de Montaut avaient réfugié à Doazit et entr'autres ont pris cinq têtes de bétail qui étaient de Galères et desquelles à Doazit en ont envoyé deux auxdits Irlandais ; mais à ceux qu'elles étaient maigres, ils ne les ont point voulues. Ce Galères les a retirées et les autres sont demeurées à Doazit ; et en ce dit bétail qui a demeuré à Doazit, il y avait un boeuf qui valait 50 liv., lesquels ceux de Doazit ont tué et mangé.

Le 14 avril 1653, M. d'Aubeterre a pris à Castillon (Château d'Arengosse) le nombre de quarante cavaliers de ceux de Balthazar.

Le 16 avril 1653, à Serresloux est arrivé grand nombre de cavaliers de ceux de M. de Poyanne et ont tout ruiné tant à Serresloux que autres lieux circonvoisins aux environs, et les ont tout à fait perdus et ruinés à jamais. La misère est si grande en ce pays qu'il n'y a rien à manger et je crois que nous sommes au commencement et même crains que ce pays sera tout entièrement perdu. L'abondance du grain du côté de Bayonne continue toujours, grâces au bon Dieu, car autrement la plus grande partie du monde serait déjà mort. Mesure de froment vaut encore ...

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... 4 liv. 4 s., mesure de blé 3 liv. 4 s., mesure de millet 59 s. et la barrique de vin 15 liv. en Doazit ; mais encore qu'il y ait beaucoup de grain le pauvre monde pâtit grandement à cause que les gens de guerre en ont porté tout l'argent et les ont tout à fait ruiné. Le monde est tout à fait à la grande misère et pauvreté.

Le 23 avril 1653, les cavaliers de M. d'Aubeterre sont allés à Montaut quérir le régiment desdits Irlandais et les ont menés à Saint-Sever, alors que les cavaliers de M. d'Aubeterre sont allés audit Montaut, ont fait grande peur à ceux de Doazit, car tout le monde s'est mis en fuite croyant que ce fussent des gens de Balthazar qui allaient à Doazit. Ledit 23 avril 1653, lesdits cavaliers de M. d'Aubeterre en allant quérir lesdits Irlandais, firent rencontre de deux hommes de Montaut : l'un se nomme Cabiro et l'autre Laborde, tous deux fils de Montaut, lesquels lesdits cavaliers de M. d'Aubeterre ont fait prisonniers, disant qu'ils étaient messagers pour lui bailler lesdits Irlandais et les ont mis en prison à Saint-Sever.

Le 4 mai 1653, lesdits Irlandais sont arrivés à Doazit et y ont demeuré deux jours aux dépens de ceux de Doazit, les ont baillé 55 liv. en argent comptant. En ces jours, les cavaliers de Balthazar sont allés au chemin de Saint-Sever et ont pris grande quantité de blé à ceux qui le portaient à Saint-Sever et l'ont porté tout à Tartas.

Le 7 mai 1653, à Hagetmau, s'y est fait une grande assemblée de la noblesse pour arrêter ce qu'ils feraient avec Balthazar. Le même jour ils s'assemblèrent à Doazit sur la lande de Meylis et burent une barrique vin à Peguiraout. Ledit 7 mai 1653, les cavaliers de M. d'Aubeterre venant de ladite assemblée de Meylis, passèrent à Toulouzette et firent rencontre d'un grand nombre de cavaliers de ceux de Balthazar qui faisaient ravage à Toulouzette, desquels les gens de M. d'Aubeterre en tuèrent une partie et firent prisonniers les autres et les menèrent en prison à Saint-Sever. Ledit (7) mai 1653, les cavaliers de Balthazar sont allés à Doazit et ont mis le feu à la maison de Galipau et ont fait de grands ravages dans ladite maison ; ils ont ...

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... rompu meubles et pris bétail tant que tout le dommage vaut de 1,000 liv. en ladite maison. On fit aussi de grands ravages au boisinage de la Coste d'Aulès et à la maison du Puts et en Banous, et en Montaut, et s'en ont mené des personnes prisonniers, tant de Doazit que Banous et Montaut, douze hommes ; et entr'autres ont pris deux prêtres de Doazit savoir : maître Ramond de Justes archiprêtre, et M. de Cès ; ont aussi pris environ de cinquante ou soixante têtes de bœufs et vaches et menaient tout à Tartas. Mais ledit M. l'archiprêtre a été mal traité par lesdits cavaliers, et ont maltraité une femme à Galipau.

Le 11 mai 1653, il a grelé en plusieurs endroits savoir : à Momuy et Haget et en plusieurs autres paroisses et aussi en une partie du Béarn qui a fait un grand dommage aux vignes et au froment et est aussi tombée en plusieurs lieux jusqu'auprès d'Arzacq et une partie en Tursan.

Le 12 mai 1653, les cavaliers de Gaujacq sont partis dudit Gaugeacq droit à Saint-Sever ; mais étant à Audignon, ils ont eu mandement de retourner à Gaugeacq, et en se retirant ils ont fait de grands ravages en Audignon, en Aulez et à Meylis et au Biélé du Bourg et ont porté tout à Gaujac. Alors la barique de vin valait 16 liv., mesure de froment 3 liv. 10 s., mesure de blé 50 s., mesure de millet 45 sols.

Ledit Balthazar fait toujours des courses et prend tout ce qu'il trouve en homme et en bétail et grain et mène tout à Tartas. La plus grande partie du monde n'ose pas demeurer en leur maison, et même Mademoiselle de Doazit s'est réfugiée à Orthez depuis le commencement de mai présent 1653. Et le 16 dudit mai, ladite demoiselle envoyait un saumon par un baylet au château de Doazit ; en passant à Brassempouy, un homme de Brassempouy lui ota ledit saumon, de quoi ledit M. de Doazit a été offensé et a mandé à ceux de Brassempouy de lui envoyer le voleur dudit saumon qui était Camescasse, lequel Camescasse ceux de Brassempouy ont mené à M. de Doazit pour en faire sa volonté.

Le 13 mai 1653, lesdits Irlandais passèrent à Doazit et Larbey et s'en allèrent à Saint-Aubin et Poyalé.

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Le même jour de l'an 1653, à Doazit passa un régiment de cavalerie de ceux de M. d'Aubeterre, et allèrent tous loger à St-Aubin et Poyalé, et font toujours de grands ravages. Tout le monde croit qu'ils veulent assiéger Balthazar à Tartas. Alors la barrique de vin valait 20 liv., la mesure de blé, à Dax, valait 42 s. Il y a une grande abondance de grain du côté de Bayonne, grâces à Dieu, car autrement la pluspart du monde serait mort. Lesdits cavaliers et les Irlandais ont demeuré à St-Aubin et Poyalé trois jours, ou jusqu'au 22 mai 1653, ils ont fait de grands ravages et n'y ont rien laissé de ce qu'ils ont trouvé de bon, et s'en sont allés du côté de l'Adour, à Mugron, Souprosse, Nerbys et à Pouypatin, et à Toulouzette et en plusieurs autres lieux au long de l'Adour, mais ils viennent tous les jours faire de fort grands ravages, même en Doazit, à la coste d'Aulès et à Maylis ont fait de grands dommages ; ils n'assiègent pas encore Balthazar qui est toujours à Tartas.

Lesdits cavaliers de M. de Poyanne et M. d'Aubeterre demeurent auprès de l'Adour, comme nous l'avons dit, et font de grands ravages ; et le 27 dudit mai 1653, ils allèrent faire ravages à Maylis et au Biélé du Bosc et entr'autres allèrent voler la maison noble de Labeyrie et y firent de grands dommages.

Le 28 mai 1653, lesdits cavaliers de M. d'Aubeterre allèrent piller dans plusieurs maisons de Doazit, et entr'autres allèrent à Espaunic, à Coudicane et à Péboué et à Lahibade, et firent partout de grands ravages et emportèrent tout ce qu'ils y ont trouvé de bon, tellement que nous sommes à la grande misère. Le peuple de ce pays a si grand peur des gens de guerre, qu'il n'ose tenir dans les maisons aucune chose bonne à manger, ni linge, ni grain.

Tous les jours, il faut remuer les lits et tout ce qui est dans les maisons, et les cacher dans le taillis, au lieu plus éloigné du passage, tellement que nous sommes à la grande misère et tout à fait ruinés.

Je ne puis penser ni connaître tant de maux pourquoi nous arrivent tout à un coup ; il me fait souvenir les afflictions de Job qui lui arrivaient tout à un coup, mais ce bon ...

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... Job était juste, et nous sommes, entre tous, grandement pécheurs, et je crois qu'à cause de nos grands péchés Dieu envoie tant de maux et afflictions a un coup. O la grande misère ! O bon Dieu, puisqu'il vous plaît nous envoyer tant de maux et adversités en ce monde, faites-nous la grâce que nous puissions les porter patiemment, et qu'après cette vie nous puissions avoir repos en l'autre monde.

O glorieuse Vierge Marie ! Je m'adresse à vous comme étant la plus favoride de la cour céleste ; jamais personne qui vous ait réclamé n'a été esconduit. Mère de J.-C., je vous prie très humblement qu'il vous plaise intercéder pour tout le peuple qui tant pâtit.

Ledit 28 may 1653, tout le monde avait une grande peur, parce qu'il arriva une nouvelle disant que cette nuit tout Doazit serait pillé par des gens de guerre, tellement que tout le monde de Doazit demeurèrent cette nuit dehors, avec les lits et tous les meubles, et moi-même demeura cette nuit dedans un taillis que l'on nomme à la Marlère du Jounquas, et je gardais lesdits meubles et lits. Ez ladite nuit fit de grand tonnerre, et le matin environ le soleil levé fit grêle à Brassempouy, à St-Cricq, à Cerres, Haget et Horsarrieu, et autres endroits qui fit grand mal.

Le jour suivant, 29 mai 1653, les cavaliers de M. d'Aubeterre sont allés à Doazit et à Meylis et à St-Aubin et en plusieurs autres endroits ; ils ont fait de grands ravages, tellement qu'ils n'y laissent rien de ce qu'ils trouvent de bon. Il y a quatre ou cinq mille hommes, tant à cheval qu'à pied, tout le monde croit qu'ils veuillent assiéger Balthazar à Tartas, mais avant que de commencer ils ont ruiné tout le pays. Cassiet de Montaut avait à Toulouzette 44 barriques de vin, lesdits cavaliers y ont tout pris. Le 30 dudit (mai) 1653, lesdits cavaliers s'en sont allés une partie delà l'Adour, et les autres s'en sont allés auprès de Dax.

Le 31 dudit mai 1653, les cavaliers de M. de Poyanne et de M. d'Aubeterre sont allés au chemin de Dax, sur la lande de Hinx, et ont vollé à ceux qui allaient au marché de Dax. Il y en avait de plusieurs paroisses, et même il y ...

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... en avait de Doazit plusieurs, entr'autres y était mon neveu, l'aîné de Péboué, qui l'ont aussi volé et pris son poulain et les souliers des pieds et esperons et la bride de son cheval ; tellement qu'ils ont volé ce jour là plus de 5,000 liv., et à Angoumeau, marchand de Doazit, ont pris douze barriques de vin qu'il avait à Hinx.

Le premier juin 1653, jour de Pentecôte et le lendemain, à l'église de Larbey, ne s'y est point célébré messe à cause que quelques personnes d'autorité avaient menacé de tuer M. le Curé de Larbey.

Le second jour de juin 1653, lesdits cavaliers de M. de Poyanne et de M. d'Aubeterre sont tous passés delà l'Adour.

Le 5 juin 1653, à Doazit sont assez menacés qu'un grand commandant de M. de Candalle, nommé le grand Maître, s'en venait loger à Doazit, mais le noble et vaillant M. de Doazit a détourné le coup.

Cette nuit, à Doazit, ont tout vidé et quitté leur maison de grande peur qu'ils avaient. Le 6 dudit juin 1653, les gens dudit M. le grand Maître sont arrivés à Montaut, et y ont demeuré une nuit, ils étaient 1,700 cavaliers, ils ont tout ruiné : Montaut et les environs.

Le 8 juin 1653, les paroisses ont été mandées d'emmener de bonnes paires de bœufs pour aller tirer le canon qui était parti de Dax, qui venait par Goust pour aller assiéger Tartas et Cauna. Doazit a fourni dix paires de bœufs, notre maison de Péboué en a fourni une paire, avec le bouvier qui se nomme Payhirat.

Le soir, 12 de juin 1653, ledit canon est arrivé à Saint-Sever avec toute l'armée, savoir : l'armée de M. le grand Maître et celle de M. d'Aubeterre et celle de M. de Poyanne et les Irlandais. Ils ne laissent rien aux environs où ils passent. Il y a environ dix mille hommes qui ruinent tout le pays. A une lieue de chemin d'où le canon passe, n'y demeure rien de bon.

Le 13 dudit juin 1653, toutes lesdites armées avec le canon sont parties de bon matin pour Saint-Sever et sont allées jusqu'auprès de Cauna pour l'assiéger, mais étant à port du canon, M. d'Aubeterre y envoya pour les sommer, ...

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... mais étant audit château de Cauna ils trouvèrent les portes ouvertes et n'y avait personne, mais s'étaient tous retirés à Tartas.

Sur la même heure, ladite armée et Canon sont partis droit pour St-Justin pour l'assiéger, qui tenait pour M. le Prince.

En partant de St-Sever, quelques capitaines et chefs de guerre demeurèrent derrière, lesquels les cavaliers de Balthazar rencontrèrent et les menèrent prisonniers à Tartas. Le même jour, 13 juin 1653, les cavaliers de Balthazar allèrent du Narp et s'en allèrent au port de Pontonx, où ils firent brûler deux bateaux sur le bord de la rivière et prirent un grand nombre de bouviers qui portaient du vin ; ils le firent décharger le vin et firent passer à la nage les bouviers et bœufs, hormis qu'il se noya quelques bouviers, et ce qui resta fut conduit à Tartas.

Alors le temps était fort beau ; la barrique de vin valait 28 liv., mesure de blé 2 liv., et y avait bonne espérance de y avoir fruit, grâces à Dieu.

Le 14 dudit juin 1653, ladite armée et canons était arrivés du soir à Villenave, et là étant, ceux de Saint-Justin se rendirent à M. d'Aubeterre, et lui envoyèrent les clefs du fort de Saint-Justin.

Le même jour, 14 juin, lesdits bouviers de Doazit eurent congé de s'en venir, et le 15 dudit juin ledit Payhirat arriva à Péboué avec les bœufs en bonne disposition grâces à Dieu, lequel avait demeuré en tout le boyage l'espace de huit jours, et nous comptait plusieurs nouvelles des gens de guerre ; un homme nommé Lailheugue de Garros était toujours celui que M. de Doazit y avait envoyé conduire les bouviers lequel, retourna aussi avec ledits bouviers. Ledit 13 juin, Lartot commandant de Balthazar s'en retourna en garnison à Cauna. Ledit 15 juin, à St-Sever, arriva un régiment de M. de Ste-Mesmes, et se loga au faubourg de St-Sever et demandait au siège de St-Sever 20,000 liv. avant de partir dudit St-Sever ; mais il en alla bien autrement, vous entendrez ci-après. Le 16 dudit juin, ledit Lartot fut blessé auprès de l'Adour, je ne sais ce qui fit le coup. Ledit ...

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... 16 juin, les cavaliers de Balthazar passèrent l'Adour au pont (goua) du Narp, et allèrent jusqu'à Gamarde et mirent le feu à quelques maisons, et firent de fort grands ravages et prisonniers.

Le 17 juin 1653, Balthazar en propre personne se leva de grand matin et passa l'Adour à Toulouzette, et arriva deux heures avant le jour à St-Sever et attaqua ledit régiment de M. de Ste-Mesmes, qui était à St-Sever, comme nous l'avons dit, en telle façon que Balthazar et ses gens en tuèrent environ trente et en firent plus de cinquante de prisonniers et les menèrent droit à Tartas ; mais ceux de St-Sever, auparavant que Balthazar ne fût arrivé, ils en eurent nouvelle et en grande hâte ils envoyèrent la nouvelle à M. d'Aubeterre qui était avec ses gens à St-Justin et à Villenave (Villeneuve de Marsan).

Aussitôt que M. d'Aubeterre eut entendu l'affaire et que Balthazar passait l'Adour, il prend cinq cents cavaliers des meilleurs et s'en alla vitement à St-Sever. Mais ayant trouvé que Balthazar s'en était déjà parti, il fut fort doulent et il ne fit aucune demeure à St-Sever, mais suivit Balthazar et il l'attrappa au Greil ; mais le rusé Balthazar le vit de loin, lequel Balthazar se sauva en fuite avec cinquante cavaliers ; Mais ledit M. d'Aubeterre attrapa le gros de l'armade qui menait les prisonniers, ce qu'ils avaient volé ce jour. Les prisonniers se mirent avec M. d'Aubeterre contre les gens à Balthazar, desquels ils tuèrent environ cinquante et firent des prisonniers cinquante-trois. Je crois que Balthazar fut bien étonné de cette prise. Le 18 dudit juin, tous les gens de guerre de M. d'Aubeterre sont arivés à St-Sever, et le lendemain, 19 dudit juin 1653, M. d'Aubeterre avec toute l'armée et le canon a posé le siège devant Cauna, en compagnie de dix mille hommes, tant à cheval qu'à pied. Le 30 dudit juin, nous entendîmes aussi tirer sans cesse et nous eûmes nouvelle que les gens de M. d'Aubeterre étaient an pied du château de Cauna, et que les maçons et plusieurs pionniers travaillaient au pied de la tour sans s'arrêter pour la mettre bas.

Ledit 21 juin, les cavaliers de Balthazar allèrent au ...

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... chemin (Dax) et pillèrent et volèrent tous ceux qu'ils trouvèrent qui allaient au marché de Dax, et avait un homme de Mugron nommé Michel Bladier. Le 22 dudit juin, il arriva nouvelle que le canon avait enfoncé les portes du château de Cauna et brisé le bout des tourettes, et qu'il n'avait fait aucun mal à la tour.

Le 23 dudit juin nous entendîmes tirer le canon sans cesser tout le jour, car il n'y a qu'une lieue de Doazit à Cauna.

Le 24 dudit juin 1653, ledit Cauna a été pris par les gens de M. d'Aubeterre et de M. de Poyanne, et ce fut les gens de M. de Poyanne qui les premiers donnèrent l'assaut. Cela fut le jour de saint Jean que Cauna fut pris, et ledit M. d'Aubeterre y entra et fit prisonnier le commandant qui se nomme Lacroix. Dedans s'y est trouvé grande quantité de grain et de vin, de chair et pain.

Le 25 dudit juin, les cavaliers de Balthazar passèrent l'Adour, et allèrent à Mugron et à Montaut et firent de grands ravages et un nombre de prisonniers, entr'autres ont pris M. de Beyris de Mugron et le fils de M. d'Arblade et Cabirau juge de Montaut et Moringlane de Montaut, et tournés descendant, ils s'approchent de Lahosse et plusieurs autres, et les menèrent à Tartas avant que les gens de M. d'Aubeterre le puissent savoir.

Alors la barrique de vin valait 30 liv., la mesure de blé valait à Dax 35 s., car à notre lieu n'en avait pas à vendre, car les marchés accoutumés étaient perdus à cause des gens de guerre, et on n'osait tirer rien par l'Adour et encore y avait danger par terre, et toujours s'y faisait grands ravages et voleries.

Le 27 dudit juin 1653, ledit Lartot étant un commandant de Balthazar sortit de Tartas et s'en alla à St-Sever se rendre à M. d'Aubeterre, lui prie de lui priant de le bouloir sauber la bie ; ledit d'Aubeterre lui a saubé la bie, avec promesse de ne porter jamais les armes, sinon au service du roi. Ledit Lartot est demeuré quelques jours dans le comban des pères capucins et puis s'est retiré ; je ne sais où il est allé, mais il me semble qu'il lui fallait faire ...

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... rendre compte des grands maux et bouleries qu'il a fait et fait faire au siège de St-Sever, car il est la cause que plusieurs personnes sont mortes et même crains qu'il soit aussi la cause de la perte de plusieurs âmes et a causé la ruine de plusieurs maisons ; il est fils de Bascons.

Après que Cauna fut prins, toutes les armées de M. d'Aubeterre sont allées en les Landes, au siège de Tartas et y ont fait de grands ravages, jusques à mettre le feu aux mèdes (meules) et prins le bétail et ce qu'ils y ont troubé de bon et ont ruiné le pays. Le second de juillet 1653, Balthazar sortit de Tartas avec un nombre de cavaliers et alla attaquer les gens de M. d'Aubeterre et se battirent ; mais a la fin, M. d'Aubeterre en eut du bon, car il fit grand nombre de prisonniers à ceux de Balthazar, et ledit Balthazar fut blessé à la couisse.

Le 5 dudit juillet, les gens de Balthazar allèrent aux métairies de M. de Poyanne faire de grands ravages et prendèrent grand nombre de blé et portèrent tout à Tartas.

Le 8 dudit juillet 1653, les gens de M. d'Aubeterre sont encore dans les landes et font de grands ravages en le siège de Tartas et aussi en autres lieux. Alors le temps était fort beau, les froments étaient presque tous fauchés ; y en avait assez de froment, mais à cause des gens de guerre il est encore bien cher, car la mesure de froment baut 3 lib., mesure de blé 2 liv., barrique de vin 30 liv. Les vignes étaient fort belles mais en plusieurs endroits ne sont point assez travaillées à cause des gens de guerre. Alors il y avait grande maladie et grande mortalité de gens.

Le 8 juillet, les cavaliers de Balthazar ont passé l'Adour et sont allés jusqu'aux faubourgs de Saint-Sever, et ont fait beaucoup de prisonniers entr'autres ez ont pris cinq de ceux de Saint-Sever et ont fait plusieurs autres ravages et ont tout conduit à Tartas.

Le 13 dudit juillet, Balthazar s'en est parti de Tartas avec cent cinquante de ses cavaliers et a prins le chemin devers Bourdeaux et a laissé encore garnison à Tartas.

Le 15 dudit juillet, le Gabe d'Hourtèz est devenu fort grand, il est passé par dessus le pont d'Orthez et a fait de ...

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... grands dommages au pont d'Orthez et aux maisons de la rue des Augustins ; il y avait aygue plus haut que la hauteur d'un homme, et on boyait passer les bros chargés de gerbes de froment capbat le Gabe. Il a rompu le bout du pont d'Orthez ; il est allé aussi haut comme il avait fait en l'an 1651, et à ce coup a fait plus grand dommage ; il est monté jusqu'au pourtal de Baure, cette fois-ci, tellement qu'il a fait fort grand dommage au froment qui estait au long du Gave, il demeura l'espace de vingt heures que aucun ne pouvait passer par dessus le pont d'Orthez.

Le 23 dudit juillet, les cavaliers de Tartas se battirent avec les gens de M. d'Aubeterre auprès de Tartas, et y en mourut plusieurs d'une part et d'autre et demeurèrent toujours dans les landes et ruinèrent entièrement tout ce pays.

Alors il y avait en ce pays grande maladie et y en mourut grande quantité de personnes, et entre autres au Martin y mourut six enfants en une semaine, et au bout de huit jours mourut le père desdits enfants ; il y avait jour qu'à Haget en y mourut sept ou huit, et la pauvreté était fort grande partout que le plus paubre de puble mourut de nécesssité.

Le 25 dudit juillet à Montaut est arribé une compagnie de cabaliers qui sont à M. de Poyanne et se sont barricadés à l'église de Brocas et font de grands rabages partout et entr'autres sont allés brûler la maison de Lestage de Larbey. Ils font tous les jours de grands ravages, car les gens de guerre et bouleurs prennent tout ce qu'ils troubent ; il n'y a point de justice, ils ont mangé la plupart de bétail. La terre demeurant sans labourer font que le pauvre monde périssent. Ces gens ont ainsi mangé les moutons et agneaux et chapons et poules, tellement qu'il ne s'y troube rien pour les pauvres malades. La paire de poulet vaut 50 s. et les œufs 2 ardits la pièce. Le monde est perdu et tout à fait ruiné sans espérance, si non celle du bon Dieu auquel nous faut avoir recours. O bon Dieu ! je sais bien que bous êtes tout-puissant et que rien ne bous est impossible ; et c'est pourquoi je m'adresse à bous pour bous prier très humblement, mon bon Dieu, qu'il bous plaise ...

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... avoir pitié de boustre paubre puble, et qu'il vous plaise de bos grâces vous envoyer la paix en France, et principalement ez pauvre pays de Chalosse.

Et advenant le 26 juillet 1653, la nouvelle est arribée à Doazit que la ville de Bourdeaux s'est rendue à l'obéissance du roy, et que M. de Candalle y était dedans, ce qui est une bonne nouvelle. En les derniers jours dudit juillet, ledit Balthazar est arrivé à Tartas, lequel a porté la noubelle, assuré que ledit Bourdeaux s'était rendu et que la bille de Tartas était aussi comprinse dedans le traisté dudit Bourdos. Grâces au bon Dieu soit rendue ; grâces à Dieu !

Les cabaliers de M. d'Aubeterre ne cessent pas de faire de grands rabages en la lande et en le Maransin, et sont allés entre Dax et Bayonne et sont entrés dans les terres de M. de Gramont, mais les paysans du pays se sont levés et attaqués lesdits cavaliers de M ; d'Aubeterre et en ont fait mourir quelques-uns desdits cavaliers.

La première semaine d'aoust 1653, on m'a assuré que ledit Balthazar s'est rendu du côté du roy et M. de Candalle la fait son commandant ; et les quatre sièges ont promis à M. d'Aubeterre, et à M. de Poyanne, et à M. de Balthazar 40,000 écus ; et sur cette condition ont fait partir les troupes, savoir celles de M. de Candalle, et de M. de Poyanne et de Balthazar s'en sont allées en Catalonne, et celles de M. d'Aubeterre s'en sont allées en Flandre ; mais M. d'Aubeterre et ledit Balthazar sont demeurés avec une partie de leurs gens pour prendre ladite somme de 40,000 écus, c'est qui est cause que le public est fort fatigué pour truber cette somme et ne bulent pas partir qu'ils n'ayent ladite partie.

Les maladies sont si dangereuses partout le pays qu'il est déjà mort grand nombre de personnes et principalement aux paroisses où les gens de guerre ont demeuré, et on m'a assuré qu'à Toulouzette n'y est demeuré que quatre hommes en vie, et à Mugron et à Nerbis en y est mort tous les jours grande quantité. A Hagetmau douze ou treize ou quatorze le jour ; à Dax y en est mort en un jour vingt-neuf. On m'a dit qu'au Mas-d'Aire sont presque tous morts, et en plusieurs autres lieux en y est encore mort ...

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... davantage, tellement que la maladie et mortalité est si grande par tout le pays, que homme qui sont biban ne l'avait jamais vue si grande. Nous avons dit ci-devant que au Martin y est mort six enfants et à présent je bous dis qu'il y est mort sept enfants, le père et la mère qui est en tout neuf personnes. En Doazit a aussi grande maladie et grande quantité de morts. Nous sommes attaqué de tous les trois fléaux, savoir : peste, guerre et famine, tellement que le pauvre monde est à la grande misère.

C'était au 15 août que cette maladie et mourt estait partout. Pour lors la mesure de froment balait 3 liv., mesure de blé 45 s., mesure aboine 20 s., la barrique de vin 30 liv., le bois de barrique 3 liv. Il y avait assez de froment ; le millet était assez beau, mais les terres n'étant pas bien travaillées à cause de la paubreté et maladies, et mort, et gens de guerre, les bignes sont demeurées à travailler ; les champs ne sont pas cultibés à cause de la grande pauvreté. Je me crains qu'il ne s'y troube pas de gens pour trabailler et assembler les fruits qui sont à présent sur la terre.

Environ le 26 d'aoust 1653, M. d'Aubeterre et Balthazar sont partis droit en haut, excepté deux compagnies de pied qui sont demeurées à Tartas pour quelques jours, mais il a bien coûté cher avant qu'ils ne sont pas partis, car il leur a fallu bailler tout l'argent qu'ils ont demandé, tellement que le pays est demeuré entièrement ruiné et misérable.

Lesdits gens de guerre ont laissé le pays empesté ; car sur la fin d'aoust 1653, le monde mourait à grand nombre. On m'a assuré qu'à Pontonx y en est mort en un jour vingt-six, et un autre jour à Mugron et à Nerbis, vingt-sept, et à Saint-Sever y est la peste, et aussi en plusieurs autres endroits où les gens de guerre ont demeuré et en y meurt grande quantité de mort subite, tellement qu'il y a grande mortalité de gens partout. La paubreté est si grande, que le paubre puble n'ont de quoi se traiter, et c'est pourquoi la mortalité est si grande. C'était sur la fin d'aoust 1653, alors la barrique de vin valait 32 liv., mesure de froment 3 liv., mesure de blé 45 s., bois de barrique 3 liv., paire de chapons 3 liv., paire de poules 50 s., paire de pigeons 20 s., ...

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... paire de poulets 16 s., les oeufs à 2 ardits la pièce. En ce temps, le temps était pluyous car il plabait toujours, les terres ne se labouraient pas tant à cause du temps que de la pauvreté du puble qui sont morts ou malades, et les gens de guerre ont mangé les bœufs et les vaches, et s'en ont porté tout ce qu'ils ont troubé de bon. Estant au commencement du mois de septembre 1653, la mortalité et maladie est plus grande que jamais ; on m'a assuré qu'en la ville d'Agen en est mort six mille en peu de temps. On m'a aussi dit que en Condoumois y en est mort en grande quantité, en telle façon qu'il y est demeuré biens de bacans qui n'ont pas aucun héritier et ballent de huit millions ou davantage.

Comme aussi en ce pays de Chalosse il en y est mort en deux jours quarante à Montaut et à Saint-Aubin. Y en a toujours eu grandes troupes de morts, tellement que les biens demeuraient à travailler, et une grande partie du peuple sont mourts à cause qu'ils n'ont pas de quoi se sustancer. La misère est grande ; la guerre a tout mangé.

Au 15 septembre 1653 ; la mort et maladie du puble continuent plus grande que jamais.

Alors les gens de guerre s'en sont tous allés, tous au pays de haut, grâces à Dieu ; mais ils en ont porté tout l'argent que tout le paubre peuble a pu trouver ; mais là où il y a eu logement de gens de guerre est la grande misère, car ils en ont pourté le grain, meubles, linge. besselle et tout ce qu'ils ont troubé dans les maisons, et cela a été par toutes les paroisses, excepté les terres M. de Gramond qui n'y a point eu aucun logement, mais ils ont eu coutises aussi bien comme les autres paroisses. La paroisse de Saint-Cricq aussi n'a point eu aucun logement, parce que M. de Poudenx seigneur dudit Saint-Cricq est fort puissant et a grande créance ; qu'il les a toujours espargnés, mais avec tout cela Saint-Cricq est un paubre lieu.

Au 1er octobre 1653, nous faisons bendange ; il n'y a pas tant de bin par un quart comme l'année passée, et cela à cause une grande partie parce que les bignes n'ont pas été trabaillées à cause de la guerre ; mais à présent n'y a point ...

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... de gens de guerre en tout Chalosse, grâces à Dieu et s'en sont tous allés au cousté de haut. La bendange quoique petite est un peu longue à cause que la plupart du puble qui trabaillait sont morts et malades et continue encore de mourir, et y a fort de malades, tellement que la plus grande partie des terres demeurent à travailler. On m'a assuré qu'à Mugron la présente année y en est mort quatre cent septante ; à Toulouzette, Montaut, Poyallé. Saint-Aubin, en y est mort tant qu'on n'a pas pu savoir le nombre. Alors la barrique de vin vieux balait 30 liv., bois de barrique 3 liv. 10 s., mesure de froment 3 liv., mesure de blé 45 s, mesure d'avoine 20 s., traque de fève 20 s., libre de chair de mouton 10 s., libre de chair de bœuf 4 s. Les terres pour faire le froment en ce temps sont fort mal en ordre à cause que tout l'esté a plu et continue encore de plaber toujours, tellement que la bandange ne se fait pas bien et me crains qu'il ne fera pas bon faire le froment. Il n'y a rien que de l'herbe par les champs.

Le nouble et baillant M. de Doazit ne s'arrête pas à trabailler toujours pour le puble, car sur la fin de septembre, il est allé à Bordeaux en compagnie de quelques autres des premiers de la bille de Saint-Sever pour avoir soulagement pour le pays. Au bout de quinze jours il est revenu et est arrivé à Doazit pourtant noubelle de la part de M. de Candalle que en le siège de Saint-Sever il n'y aura point de logement ni quartier d'hiver l'espace d'un an, moyennant 47,000 liv. que le siège de Saint-Sever baillera.

Et environ le demi octobre 1653, le beau temps s'est bien commencé et a duré, par la grâce de Dieu, l'espace de cinq semaines, duquel temps les laboureurs se sont servi et ont bien fait le froment, grâces à Dieu.

En ce temps-là, à Tartas est arribé un commissaire de par le roi nommé Perreferré qu'il a bonne compagnie, qui a ordre de desmolir et abattre toutes les tours et murailles et forterresses de Tartas, ce qu'il a exécuté tout de bon durant le beau temps que nous avons dit. Y travaillent grande quantité et grand nombre de gens tous les jours.

Au 15 novembre 1653, le temps est fort beau, par la ...

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... grâce de Dieu. Le froment est presque tout fait ; la barrique de vin se vend pour 25 liv., mesure de froment 3 liv. 5 s., mesure d'avoine 24 s., livre de chair de mouton 12 s, livre de chair de bœuf 5 s., paire de chapons 3 liv, paire de poules 40 s., paire de poulets 16 s., paire de pigeons 20 s., les œufs 2 liards la pièce.

En ce temps, il y a encore grande maladie et mort en tout le pays, en telle façon qu'il y demeure une grande partie des biens à travailler, et le pauvre monde ont grande nécessité d'argent pour payer les coutises qui sont estés ci-devant coutisés et imposés tellement qu'il y a grande misère partout.

Enbiron la bandange 1653 les louis qui balaient 3 liv. 10 s. Il y eut un esdit que le louis ne s'employerait que 3 liv. 6 s, et ce jusqu'au premier de l'an 1654, et depuis ne valait que 3 liv. 3 s., ce qui fut cause que sur la fin de décembre 1653 il s'y fit plusieurs payements et grande quantité de consignations, parce que tout le monde boulait employer son argent avant que le rabais fut venu.

Ce qui fui cause que la mesure de froment valait 3 liv. 15 s., mesure de millet 40 s., barrique de vin 25 liv., mesure de blé 50 s. Alors les maladies sont si grandes que jamais, et y meurt tous les jours grande quantité de personnes partout. Le monde est si paubre qu'il est impossible de payer les impositions et taxes qui sont imposées jusqu'à la fin de l'an 1653. Alors la paroisse de Doazit doit des impositions et taxes 3,000 liv., et encore Doazit est fort soulagé à cause de la grande baillance de M. de Doazit qui a toujours trabaillé pour la paroisse de Doazit.

il y a d'autres paroisses qui sont encore plus paubres. Je crois que Cerres et Marquebielle et Cazalis, ne payeront de longtemps, car la paubreté est si grande qu'ils n'ont de quoi bibre. A Montaut et en plusieurs autres lieux grande quantité de biens demeurent sans trabailler à cause du monde qui est mort par toutes les paroisses.

Depuis le 15 janvier 1654 jusqu'au 1er de mars 1654, le temps était fort beau, en telle façon qu'il n'y a plu goutte. Alors les maladies étaient un peu appaisées mais non pas ...

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... tout à fait, car il en y mourait encore toujours en grande quantité. Alors barrique de vin ballait 25 liv., mesure, de froment 3 liv. 8 s., mesure de blé 48 s , mesure de millet 2 liv. Le temps était fort beau et les froments avaient beaux semblants, et n'y avait point de guerre en ce pays de Chalosse, loué soit Dieu ! Mais les arrérages des taxes et impositions de l'année passée se doivent encore et le monde est fort paubre.

Le beau temps a duré jusqu'aux derniers mars 1654, et les maladies sont un peu apaisées. Loué soit Dieu, et n'y a point de guerre en ce pays de Chalosse. En ce temps, la barrique de bin balait 25 liv., mesure de froment 2 liv. 10s. mesure de blé 44 s., mesure de millet 40 s. et arriva grande quantité d'abondance de grain, du cousté de Bayonne. Sur la fin d'avril 1654, il fit une grande et bonne pluie, ce qui fit fort réjouir les fruits de la terre ; et alors la barrique de bin balait 25 liv., mesure de froment 55 s., mesure de blé 45 s., mesure de millet 35 s. ; les bignes et les froments étaient fort beaux et n'y avait point de maladie, ni de guerre en ce pays. Loué soit Dieu !

Mais le 3 mai 1654, il fit grêle à Doazit et à Saint-Cricq et à plusieurs autres endroits qui fit fort grand dommage ; mais pour cela le bin n'enchérit point, et le grain devint à meilleur compte ; car, au 1er juillet 1651, la barrique de vin estant à 24 liv., mesure de froment à 50 s., mesure de blé à 36 s., mesure millet à 32 s. Le temps était fort pluvieux, mais il n'y avait point de guerre en ce pays, ni de maladie. Loué soit Dieu !

Les gens de guerre, depuis qu'ils sont partis de Chalosse, ont toujours demeuré en la Bigourre, et y font tous les maux imaginables. Le pays de Bigorre estait perdu. Sur la fin de juin 1654, il fit mauvaise brume en telle façon qu'il emporta presque tout le raisin de vigne. En Chalosse alors barrique de vin valait 27 liv., mesure de froment 3 liv., mesure de millet 32 s., mesure de blé valait 38 s.

Mais, hélas ! nous ne sommes pas encore à la fin de nos maux , nous n'avons pas demeuré longtemps en Paix, car au commencement de juillet le bruit est partout, disant que ...

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... tous les gens de guerre s'en benaient en Chalosse, ce qui est bien arrivé ; car le 12 juillet 1654, à Doazit est arrivé une compagnie de cavaliers qui étaient à M. d'Aubeterre, lesquels ,ont demeurés à Doazit l'espace de huit jours entiers, et étaient environ cent vingt chevals, et plusieurs à pied. Le capitaine se nommait M. de Tricon qui était lougé chez nous à Peboué avec tout son train qui estait seize chevals et seize hommes, lesquels nous ont fait faire grande dépense et entr'autres choses ont tué et mangé deux génisses de lait que j'avais à Jouanicon en gazaille, desquelles je n'eusse pas voulu la mort pour 25 liv et nous ont ainsi print quantité de meubles et linge et a fallu que la paroisse de Doazit baillat au capitaine, avant de partir la somme de 150 fr. et encore a fallu que M. de Doazit aye emprunté M. de Gramond qui estait pour lors à Hagetmau, et avons envoyé deux messagers à Bordeaux pour chercher le deslogement à un nommé Costerade, a donc par l'entremise de M. de Gramond et de M. de Doazit ; ils partirent au bout de huit jours et s'en allèrent à Bonnut c'était le 20 juillet 1654.

Et le 15 juillet 1654 à Brassempoy est aussi arrivé une compagnie de cavaliers aussi de M. d'Aubeterre qui ont demeuré longtemps et ont tout ruiné tout Brassempoy. A St-Sever en est aussi arrivé grande quantité et par toute Chalosse et font de grands ravages partout ; et le 26 dudit juillet à Doazit est arrivé deux courriers de cavalerie de M. de Saint-Simon, auxquels à Doazit donnèrent 400 liv. pour n'y loger et s'en allèrent à Mant. J'entends aussi qu'il y en à en plusieurs paroisses de Chalosse ; ils font toujours de grands maux. On dit que toutes les armées descendent en Chalosse ; je ne sais ce qu'ils veulent faire, je crois qu'ils ruineront le pays avant de sortir. O la grande misère ! il est impossible que le paubre puble puisse plus bibre et résister à tant d'impositions et ravages qui se fesait tous les jours. Durant le temps que le capitaine a demeuré chez nous à Peboué, nous avons eu grande dépense des autres capitaines, des cavaliers des gens de Saint-Sever, et entr'autres M. de Comet de Larbey benait tous les jours pour y faire bonne chère.

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Il y a encore grande quantité de bin a bandre, mais personne n'en achète pas une pièce ; il n'y a point d'argent ; le pays est réduit à la grande misère à cause de la pauvreté et des gens de guerre. Je prie le bon Dieu qu'il lui plaise y mettre sa sainte bénédiction, et qu'il aye pitié du paubre puble et qu'il lui plaise appaiser son courroux et à nous pardonner tous nos péchés, et qu'il nous préserve du grand danger dont nous sommes menacés par une éclipse de soleil qui doit arriver dans peu de temps, comme nous verrons ici après.

Ors, bous faut savoir que au mois de juillet 1654, il arriva une nouvelle fort affigeante, disant que le 12 août 1654 il adviendrait une grande obscurité et que le soleil serait éclipsé l'espace de trois heures. L'armanach en parle et nous menace de grands dangers. De Paris et aussi de Bordeaux est venu l'arrêt disant qu'il y a un prophète en la ville de Paoun (ou Laoun) en Allemagne, lequel a prophétisé depuis vingt-huit ans et que ce qu'il a dit est casi tout arrivé ; il se nomme Andréas. Ces noubelles sont dans tout le pays et je vous assure que tout le monde a grand peur et appréhension. Le prophète (dit) qu'il se craint que Dieu fera jugement ce jour ou qu'il le fera dans deux ans. Le bon Dieu nous veuille nous préserver et nous faire la grâce de mourir dans sa sainte grâce et nous préserver de tout mauvais danger dont nous sommes menacés. Car les uns disent que ce jour fera de grands vents et tonnerre , d'autres disent que tout l'air sera pestiféré, d'autres se craignent qu'il mourra grande quantité de monde et bétail, d'autres disent que nous serons accablés de guerres comme déjà elle est commencée ; d'autres disent que nous serons attaqués de religion contraire ; d'autres disent que nous sentirons ce jour une grande frayeur ; d'autres disent que la terre fera ouverture en quelques endroits à cause du grand benin de ce jour, tout le monde en parle aussi avec grande crainte. J'entends déjà on a fait partout probision d'ou(*) pour ce jour, comme aussi d'herbes et de fruitage, afin d'empêcher le benin de ce jour. Je ne sais ce qu'il en adviendra ; j'en remets tout à la boulounté de Dieu, et lui ...

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(*) (Ph. Dubedout :) La même phrase est répétée à la page suivante : il s'agit d'oint (huile ou graisse) et non d'eau comme le pense le Baron de Cauna dans sa note en page 603.

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... prie qu'il nous beuille à tous faire pardon et miséricorde et que sa sainte boulounté soit faite ; mettons-nous tous en sa sainte garde et ne perdons pas courage, car le bon Dieu est tout puissant pour remédier à tout danger. A donc étant à la honzième jour d'août, beille dudit jour de l'éclipse, tout le monde redoute cette éclipse, tous font provision pour trois jours d'oint, d'herbes et de fruits, comme nous l'avons dit ; tout le peuple prie Dieu en attendant sa sainte boulounté.

Mais ledit treizième jour dudit aoust, à Doazit est arribée la nouvelle à Saint-Sever que deux compagnies de cabaliers s'en venaient louger à Doazit, ce qui étonna fort ceux de Doazit, mais ils firent composition, moyennant 25 pistoles, que en Doazit n'y aurait point de logement.

Et encore ce même jour à Doazit passa un régiment de gens de guerre et passèrent au château de Doazit ; je vous assure qu'on avait bien grande peur d'avoir logement, mais tout passa et s'en allérent à Montgaillard. Le baillant Monseigneur de Doazit les alla accompagner jusqu'au bout de la paroisse afin d'éviter les ravages en Doazit.

A donc ce jour je demeurai bien tard à me retirer à cause d'une affaire que j'avais, et en me retirant j'ai bu le temps fort beau et passayais le ciel, grâce à Dieu. Et estant benu ledit douzième jour d'aoûst 1654, c'était un jour de mercredi, marché à Hagetmau, je me levai d'assez bon matin et fis une promenade d'environ un quart de lieu, et en m'en retournant je regardais le soleil qui estait assez beau et le ciel clair et le temps fort passient ; je me livrai en attendant à la boulounté de Dieu auquel je prie qu'il aye pitié de nous.

O Jésus-Christ ! mon Rédempteur, chacun vous doit pourter honneur, chacun bous doit craindre et serbir, car pour nous avez boulu souffrir en présence de vostre mère, mourt et passion instamment et au tiers jour ressuscité, et puis au ciel monté pour nous ouvrir voustre paradis duquel nous étions entredits pour le péché de nos parents ; humblement grâces vous remercie des biens que bous m'abez fait en ma bie et outre plus, je vous supplie qu'il bous plaise ...

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... nous préserver cejourd'hui de tout danger et péril dont nous sommes menacés, et pardonnez-nous nos péchés, car les astres nous ont fort menacés.

O glorieuse Bierge Marie, mère de Dieu, je say que bous estes la Reine du ciel, et avez un très grand crédit auprès mon Seigneur Jésus-Christ boustre fils ; je vous prie très humblement, ô grande Dame du paradis, qu'il bous plaise prier et intercéder pour tout le peuple. O sainte Dame, monstrez, monstrez à mon Saubur Jésus-Christ les mamelles avec lesquels vous l'avez allaité, et par ce moyen bous obtiendrez pardon et miséricorde pour nous. Je vous prie aussi sainte Dame prier et intercéder pour nous, mais principalement à l'heure de noustre mourt.

O glorieux saint Joseph, il a déjà longtemps que je vous ai choisi pour mon particulier avocat pour Marie, et bous invoque tous les jours ; je vous prie, priez et intercédez pour nous, mais principalement à l'heure de noustre mourt et au jour du jugement.

O glorieux saint Laurent, le premier jour du présent mois je bous ai print et choisi pour mon avocat durant ce mois présent. Je vous prie donc grand martyr saint Laurent, qu'il vous plaise prier et intercéder pour nous, mais principalement aujourd'hui et à l'heure de noustre mourt.

Et environ les neuf heures , une brume s'est mise en l'air et le soleil a commencé à s'esclipser et a esclipsé environ la moitié du cousté du nord, mais dans peu de temps le soleil se remit en son entier et le temps a été aussi beau comme auparavant, grâces à Dieu, sans aucun accident que l'on sache.

Les gens de guerre, comme nous avons dit, continuent tous les jours à faire tous les maux immaginables et font de grands ravages par toute la Chalosse et entr'autres ont tout à fait perdu Brassempoy et Serreslous, tellement qu'il n'y a pas une maison qui aye du pain à manger et sont ruinés à jamais.

J'entends qu'il s'y fait de grands désordres tous les jours, et entr'autres causes à Poy-Patin. Un nommé Pigé de Gouarride amassait coutises et un autre homme nommé Cabiro ...

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... du Patin lui a coupé l'un des bras. Oh ! grand malheur, et encore la femme de celui qui a le bras coupé, ladite femme a l'une des jambes de bois. Ces deux personnes sont fort à plaindre ; cela a été fait le 17 août 1654.

Et le 18 aoust 1654, à Montaut, passa grand nombre de gens de guerre, en telle sorte qu'ils burent trois barriques de vin de celui de M. de Ribes, curé de Montaut, et font toujours de grands désordres partout. Il est impossible de résister à tant de maux. Alors la mesure de froment vaut 32 s., barrique de vin 24 liv. Le temps était pour lors fort chaud ; la pluie tardait fort pour les fruits et fesait de grandes chaleurs, en telle sorte que le grand chaud estouffa un pauvre homme demeurant à Pebos, près de Brocas. Ce fut le 19 aoust 1654.

Je vous assure que les gens de guerre font de grands maux et de grands ravages par toute la Chalosse, et entr'autres ont demeuré en la paroisse de Brassempouy l'espace de quarante jours, et à Serresloux dix jours, et à Dume longtemps. En d'autres endroits dont ces pauvres habitants sont fort pauvres, et tout ce pays est réduit à grande pauvreté, et d'autre part il y a grande quantité de malades partout, et la plupart n'ont pas de quoi se faire traiter. A donc, par la grâce de Dieu, environ le 23 et 24 d'aoust, les gens de guerre sortirent tous de ce pays de Chalosse et s'en allèrent tous du cousté de haut ; Dieu les veuille conduire et éloigner de ce pays.

Je vous assure que pour lors le temps était fort chaud, car depuis environ St-Jean n'a point plu, et en tout ce pays le millet est quasi perdu et plusieurs arbres sont déjà mourts. Le paubre peuble ne peut guères trabailler à cause du grand chaud. La barrique de bin baut 24 liv. ; c'est à savoir le bon, car il y en a grande quantité de pourri. La mesure de froment baut 33 s.

A donc, environ le 20 septembre dudit an 1654, la pluspart du bin en Chalosse se truba pourri, et celui qui était bon balait 30 liv. la barrique. Mesure de froment balait 2 liv., mesure de blé 30 s., le bois de barrique ne balait alors que 40 s., à cause que aux vignes n'avait pas pour ...

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... lors que fort peu de raisin, et le bruit estant par toute la Chalosse que ce serait la plus paubre bendange qu'il y eut eu de longtemps, car tout le monde criait il n'y aura pas bin seulement pour la probision du pays en Chalosse. Alors on coupait quelques bignes, car partout alors les bignes étaient en fort paubre estat, à cause qu'elles avaient été mal travaillées, à cause de la guerre et de la mourt et maladie du pauvre peuple. Mais le millet estait demeuré fort bas à cause de la grande sécheresse, mais les terres des champs et laborables étaient bien coultivées et laborées pour lors, grâces à Dieu. Le beau temps continua jusques au mois d'octobre, et le millet meurit de force sans pluye, et on explia (récolta) avant de vendanger, mais il y en eut fort peu, mais il estait fort bon et bien fait. Au 10 dudit octobre 1654 on ne commençait pas encore de vendanger, parce qu'on attendait une pluie pour vendanger.

Alors, une bonne barrique de vin se vendait 36 liv., et ne s'en trouvait pas pour les malades du bon, et tout le monde criait qu'il y aurait bien peu du noubeau. Mesure de froment balait 35 s., mesure de blé 26 s., millet 18 s.

En la première semaine dudit octobre 1654, il arriba un bruit disant qu'à Hagetmau y avait maladie contagieuse, et que en six jours y était mort trois ou quatre personnes subitement, et que personne ne s'y approchait pour les ensebelir, en telle sorte qu'ils furent enterrés en un jardin et l'on s'y approchait que de fort loin, et quand un prestre y allait pour les confesser, il ne s'approchait pas à cent pas du malade. Et le 7 dudit octobre estait marché dudit Hagetmau. Ce matin, à Doazit, firent défense que personne de Doazit n'allât pas ce jour au marché de Hagetmau, ou qu'il ne retournerait pas à Doazit à cause du grand danger qu'il y avait de la contagion. Ce jour-là au château de Doazit, ne boulurent pas s'approcher jusqu'au chemin pour prendre le payage à ceux qui benaient du marché de Hagetmau, et entr'autres un homme menait un pourçon qu'il avait acheté audit marché de Hagetmau, et estant audit château de Doazit, il appela au payage, mais personne n'osa ...

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... y aller pour prendre argent, à cause de la contagion, et 1'homme qui menait le pourçon laissa ledit payage du pourçon au pied d'un chêne sur le chemin.

A donc, sur la fin dudit octobre 1654, on fit vendange, mais cela fut bientôt fait, car ce fut la plus petite vendange qu'il y eut de longtemps. Tout le monde, en Chalosse, criait la rareté du vin ; il n'y avait point de bin. Le temps était fort beau, et disait-on que le peu de vin qui estait serait fort bon. On fit aussi le froment à temps et fort bien, et le temps était toujours fort beau.

La maladie que nous avons dit de Hagetmau continua l'espace d'un mois et en y mourut quinze ou seize, et durant ce temps personne ne s'approchait de Hagetmau. A Doazit faisait toujours bonne garde, et n'en passait pas aucun de Haget ; les chanoines de St-Guirons fermèrent l'église, et n'y entrait personne de ceux de Hagetmau, et ceux qui moururent durant ce temps les enterrèrent aux jardins , et à la fin du mois d'octobre à Hagetmau, est arrivé un parfumeur qui parfumait les maisons pestiférées, pour, chasser la maladie. Donc ce mal s'apaisa, grâces à Dieu, mais quelques jours après il y eut encore quelques maladies, et il en mourut cinq ou six successivement, et principalement à Juanchicot, en y mourut quatre ; l'on fit brûler cette maison. Pour lors, personne ne s'osait approcher, de Haget de peur de danger de mort. Et estant au commencement de décembre, l'on dit que la maladie estait apaisée et qu'il n'y avait plus de danger, grâces à Dieu. Alors la barrique de vin se vendait 27 liv., mesure de froment 24 s., mesure de blé 25 s., mesure de millet 18 s. ; mais il n'y avait point argent, à cause que les impositions et gens de guerre en avait tout emporté. Cette année 1654, le négousse des marchands ne sont pas fort bons, car je crois qu'il n'y a guère de marchands en ce pays qu'ils ne fassent perte, comme aussi les fermiers n'y ont pas trubé leur counte . Cette année, j'étais clavier à la frairie du Mus, et fîmes marché, ladite année, de faire un tabernacle pour le mettre au grand autel de l'église du Mus, lequel tabernacle coustait 400 liv ; je fis aussi carreler...

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... l'église et y fis faire une croix et la fis mettre au cimetière du Mus, ce qui fut tout en ladite année 1654.

Nous finirons le discours de ladite année 1654, en bous disant que en ce pays de Chalosse n'y a point de gens de guerre à présent ; mais les arrérages des impositions ci-devant faites sont encore à payer, et n'y a point d'argent sur le pays, ce qui est cause que le grain est à bon counte, car la barrique de vin ne vaut que 24 liv., mesure froment 30 s., mesure blé 22 s., mesure millet 16 s., et n'y a point maladie grâces à Dieu.

Pour l'an 1655 et estant environ le 10 de janbier dudit an 1655, j'apprends que à Tartas estait arribé un régiment de gens de guerre, qui sont pour le roi, et au nombre de 1200, tous à pied, sauf les officiers, lesquels font grands désordres et maux et ravagent fort Tartas, et ce, à cause que Tartas avait été ci-devant du contraire parti contre le roi, comme nous l'avons dit ci-dessus. Lesdits gens de guerre ont demeuré à Tartas l'espace de seize jours, et après, la moitié desdits gens de guerre s'en sont allés du cousté de Mont-de-Marsan, et le 29 de janvier, tant ceux qui étaient à Tartas que ceux qui étaient à Mont-de-Marsan s'en sont allés en haut. Dieu les veuille conduire.

Estant au mi du mois de février 1655, le bon temps continue encore, car la mesure de froment estait à 25 s., mesure de blé à 20 s., et mesure de millet 16 s., et barrique de vin à 21 liv., et il n'y avait, pour le pays de Chalosse, de maladie ni gens de guerre, grâces à Dieu ; mais les marchandises estaient à bon compte à cause que en ce pays ne abaient point d'argent, car de mémoire de bibant, en ce pays de Chalosse, n'y avait point eu si grand manquement d'argent. Et estant en mars 1655, le bon temps continua, grâces à Dieu, car la barrique de vin est à 20 liv., mesure de froment à 20 s., mesure de blé à 16 s., mesure de millet estait à 16 s., mais c'était à cause de la grande manque d'argent qui estoit pour lors sur le pays. Et pour lors le temps estait fort beau pour la saison et le froment était fort beau par la campagne, grâces à Dieu.

Et estant à la fin de mars, il fit quelques gelées qui firent...

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... beaucoup de mal aux lieux bas, en plusieurs endroits, mais pour ce le bin n'enchérit point.

Mais le 14 avril 1655, il fit une grande gelée qui fit grand mal aux lieux bas partout le pays, et le bin enchérit un peu, car au 20 d'avril la barrique de bin balait 28 liv., mesure de froment 32 s., mesure blé 20 s., mesure millet 16 s.

En ce temps, le cartier d'hiver arriva sur le pays. Je bons assure qu'il eut bien de la peine à recoubrer cette partie, car le monde estait alors si paubre qu'il ne s'y trubait pas une pièce d'argent ; je ne saurai dire autre chose de noubeau sinon que le monde est fort paubre.

Au 15 juin 1655, la barrique de bin valait 33 liv., mesure froment 30 s., mesure blé 19 s., mesure millet 16 s. ; et aux bignes n'avait point de raisin que fort peu, et avait grelé en plusieurs endroits, et le temps était fort pluvieux, tellement qu'on ne pouvait pas travailler aux terres pour faire du millet car tous les jours plubait. Ce temps fâchait fort à cause du travail à faire le millet. Mais il fit après beau temps que le millet se fit assez bien, et fit aussi beau temps pour arecapter le blé et le froment. Estant au 20 de juillet 1655, le temps était encore assez beau et le millet avait beau semblant par la campagne. Alors mesure de froment valait 32 s., mesure de millet 16 s., mesure de blé 21 s., barrique de vin 36 liv. ; mais aux bignes n'avait point du raisin, ce qui était cause que tout le monde criait la rareté du bin. Et c'est partout, généralement, que tout le monde criait : n'y aura point de vin cette vandange, n'y aura point de bin.

Le beau temps continua toujours et fesait grande sècheresse, tant que le millet retardait fort à manquer d'une arrosée, car étant au 24 août 1655, on criait que le millet était casi mort par les champs, et on criait aussi partout généralement qu'il n'y aurait point de bin, et pour lors n'y avait point de gens de guerre en ce pays ni de maladies, grâces à Dieu.

Alors la barrique de bin balait 45 liv., mesure de froment 25 s., mesure de blé 18 s., mesure de millet 16 s.,

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...mesure aboine 12 s., et au 28 aoust 1655, il a grelé à Poyalé et en Doazit et à Castelnau de Bas, et grand dommage tout a fait, et étant au commencement de septembre il fit une bonne pluie fort profitable pour les fruits de la terre, ce qui réjouit fort le peuple. Et estant au commencement et mercredi du mois d'octobre 1655, la bendange était casi faite par toute la Chalosse et fut bientôt faite, car c'était la plus petite vendange que l'on eût vue, car chacune journade de bigne l'un pour l'autre ny avait pas un quart de barrique de vin, et disait-on qu'il serait fort cher. Alors le temps estoit fort beau pendant ladite bendange il pour faucher le millet ce qui réjouissait fort le peuple, mais tout le monde criait à la rareté du bin. Le froment se fit fort bien, sans aucune pluie ; il ne se parlait point de guerre en tout ce pays, ni de grandes maladies, loué soit Dieu ! Et estant au commencement de novembre 1655, la barrique de vin balait 36 liv , mesure de froment 30 s., mesure de blé 20 s., mesure de millet 15 s.

Je vous beux ors parler d'un bruit qui a été fait à l'église St-Aubin entre les prestres. Un nommé M. de Cafarre, fils de Bigourre, a esté curé et a joui du rebenu l'espace de trois ou quatre ans, sur la nomination que M. de Benacq avait faite en faveur dudit Cafarre, car ledit sieur de Benacq estait patron de ladite cure de Saint-Aubin, mais la seigneurie de ce lieu avait esté laissée par testament, par feu Madame de Poyalé, à une sienne fille nommée Mademoiselle de Navailles, et ladite Mademoiselle se disant maîtresse suivant le testament a nommé un autre curé nommé M. de Moncucq, lequel, par un arrêté de la Cour, en a tiré ledit Cafarre et y a demeuré quelque temps et a jui du bin et du millet l'an 1655 ; mais Cafarre boulant jouir par force y est allé un jour de dimanche, environ la fin d'octobre 1655, et a trubé que Moncucq voulait dire la messe parouchelle à Saint-Aubin. Ledit Cafarre avait mené des gens avec lui et en a chassé Moncucq par force, et a battu et maltraité Moncucq et ses gens jusqu'à ce qu'il y eut effusion de sang, dont l'église de Saint-Aubin a été entredite qu'il n'y a eu messe de huit jours,. jusqu'à ce que M. d'Aire...

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...y a envoyé un prêtre pour bénir l'église et a entredit Cafarre et Moncucq de ne dire messe à Saint-Aubin ni à Hauriet jusqu'à ce qu'il en soit dit autrement, et y a mis pour vicaire un prêtre nommé M. Dumartin de Montaut ; mais M. Moncucq en a fait infourmer et poursuivre à Cafarre en telle sorte, qu'il a esté remis par arresté de la Cour, curé dudit St-Aubin, et y est allé dire messe le 27 du mois de décembre 1655, et le premier jour après a fait faire prisonniers audit Cafarre et à deux de ses neveux et les a fait mener à Bourdeaux, et encore, dans trois jours après, il a envoyé saisir au lougis dudit Cafarre pour la dépense, mais le frère dudit Cafarre a payé ladite dépense qui estait de 52 escus. On ne peut encore dire qui sera le maître, d'autant que Monseigneur de Benacq a nommé à Cafarre comme se disant seigneur du lieu de Pouyallé, et d'autre cousté ladite demoiselle de Navailles se disant maîtresse suivant ledit testament, elle a nommé audit Moncucq. Ledit sieur de Benacq a aussi toujours proucès avec ladite demoiselle de Nabailles, sur la seigneurie et rentes dudit Poyalé, mais ladite demoiselle n'a point encore joui de rien, car M. de Benacq a toujours emporté les fruits par force.

Donc le château de Pouyalé a été prins plusieurs fois par force, tantôt par l'un tantôt par l'autre, mais les gens de M. de Bénacq sont encore demeurés maîtres et sont à présent audit Poyallé, et en ont chassé ladite damoiselle de Nabailles.

Et le 22 de mars1656, ledit Cafarre et ses deux neveux sont arrivés à Saint-Aubin, mais on ne peut savoir lequel des deux demeurera curé. M. de Moncucq est encore jouissant, et les gens que M. de Benacq avaient envoyés au château dit Pouyallé s'en sont retournés et ont laissé le château tout seul ; et après cela, ladite demoiselle de Navailles a affermé le moulin à un nommé Gassinet de Montaut, mais ce n'a pas été pour longtemps, car le 27 de juin 1656 est arrivée à Pouyallé Madame la marquise de Benac en voiture, laquelle dame a pris tous les fruits et droits seigneuriaux sans aucun contredit, et ledit Moncucq demeure curé dudit St-Aubin.

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Et étant au commencement de décembre 1655, il a fait une grande tourrade l'espace de huit jours ; au reste, le temps estait beau. Alors la barrique de bin valait 32 liv., mesure de froment 28 s., mesure de blé 20 s. , mesure de millet 15 s., et n'y avait point de gens de guerre en ce pays, grâces à Dieu, mais le monde estait, encore fort paubre à cause qu'il n'y avait pas eu de bin et ny avait point d'argent pour payer les deptes. Bous eussiez bu casi tous les débiteurs, ou la plus grande part, demander terme en justice et chicaner fort. Et estant au commencement de janvier 1656, la barrique de bin balait 35 liv. , mesure de froment 30 s., mesure de blé 21 s., mesure de millet 18 s.

Mais bientôt après il arriva des nouvelles maubaises, c'est que les gens de guerre s'en benaient en ce pays, ce qui fut bien bray, car le 22 de janvier 1656, à St-Sever, arriva trois compagnies de cabaliers, à Aire deux compagnies, à Dax deux compagnies, à Tartas deux compagnies, au Mont-de-Marsan deux compagnies et à Peyrehorade aussi deux compagnies, ce qui étonna fort le public, et ce, pour y rester trois mois ou davantage.

Mais, dans peu de jours, il arriba une autre noubelle qui estait encore plus maubaise, car le cri allait partout que l'une compagnie de Peyrehorade s'en Benait à Doazit, et l'autre allait à Montgaillard, ce qui estonna fort Doazit, et de fait, le 15 de février 1656, à Doazit les attendait pour les louger, mais pas la grâce de Dieu il en alla bien autrement, car le noble et baillant Monseigneur l'évêque d'Aire, qui estait pour lors à Paris, il sut en quelque façon que le deslogement des cabaliers à Peyrehorade estait baillé, et qu'ils avaient le logement à Doazit. Ledit Monseigneur fit tant avec ses amis qu'il obtint les deslougements de Doazit et de Montgaillard et l'envoya incontinent, qui arriba à St-Seber le 18 dudit février 1656, et par bonheur le baillant M. de Doazit fut à St-Seber qui pourta cette bonne nouvelle avant que les cabaliers fussent arribés. A donc, il envoya M. de Doazit incontinent à Peyrehorade pourter le deslogement aux cabaliers , et leur pourter, autre logement à Lahontang et à Magescq ; mais ils ne le boulurent prendre.....

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....jusqu'à ce que M. de Doazit les eût allé truber. Mais après que M. de Doazit les eût parlé et leur bailla 300 liv. pour les ustensiles, ils prirent le deslogement de Doazit et le logement de Magescq et de Lahontang. Certes, en cette occasion Messieurs de Doazit ont grande obligation à M. d'Aire.

Alors barrique de bin balait 40 liv., mesure de froment à 34 s., mesure de blé 33 s., mesure de millet 20 s.

Et estant au 15 de mars 1656, j'entends que les cabaliers fesaient grands ravages partout où ils étaient, et mesme autour de St-Sever, fesaient grandes bouleries à ceux qui allaient au marché le samedi ; il ne s'y parle pas encore que les paroisses du siége y contribuassent ; je ne sais ce qu'il en adviendra.

Alors la Barrique de bin balait 43 liv., mesure de froment 36 s., mesure de blé 23 s., mesure de millet 20 s., mesure de panis 16s. Les affaires du pauvre monde se fesaient autant mal que jamais à cause de la grande paubreté du puble, car il n'y avait point d'argent ni marchandises à prester en tout ce pays.

Et estant au 20 dudit mars 1656, à St-Sever ont obtenu d'imposer sur les paroisses du siège, à cause de la dépense qu'il avaient faite, et mesme à Doazit y ont pour leur côte part 1,000 liv. sur la taille, et encore, outre tout cela, font pourter grande quantité de fourrage à St-Sever pour payer les ustensiles qu'ils ont fourni aux gens de guerre, et si on ne porte pas ce qu'ils demandent ils emboient les cavaliers par les paroisses, et même à Doazit, le 26 dudit mars 1656 ,y est arribé quatre cabaliers et deux, desquels ont demeuré à Coudicanne un jour et une nuit. Nous sommes tous à la grande paubreté à cause que les gens de guerre ne nous laissent rien. J'apprends encore qu'une autre compagnie du pays de haut demande un présent à ceux de Doazit ; mais pour la considération de M. de Doazit n'y est pas benu ; certes il est impossible que le paubre puble puisse payer tant d'impositions. O la grande misère ! Au reste je bous dis que le temps est assez beau. Le monde réparent fort les biens, il n'y a point grandes maladies grâces à Dieu. Alors la mesure.....

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...de froment balait bien 36 s. , mesure de blé 27 s., millet 22 s.. et barrique de vin 45 liv.

Et estant au onzième d'avril 1656, tous les cabaliers sortirent de St-Seber et s'en allèrent par les paroisses, pour recoubrer les ustensiles, suibant le partage qui en a été fait par ceux de St-Sever, et allèrent premièrement à Montaut, puis à Larbey et à Mugron, et après, par toutes les paroisses du siège de St-Seber, jusques à ce qu'ils ont recoubré leur partage.

Mais en faisant ces courses, ils ont fait de grands rabages par les paroisses et partout où ils passaient. Et le 18 abril 1656, ils sont allés à Casalis et y ont mangé et emporté tout ce qu'ils y ont trubè ; tant, que la paroisse de Marquebielle, comme estant un membre de Cazalis, y ont eu de leur côte part de dépense la somme de 50 liv.

Et estant au 20 dudit avril 1656, j'apprends que les cabaliers qui estaient à Lahontang sont arribés à Brassempoy et qu'ils sont là jusqu'à nouveau ordre. O la grande misère du paubre puble ! Ces enragés cabaliers ruinent tout ce qu'ils trubent et n'ont point aucune pitié ni considération du pauvre monde qui murent de faim, car il s'y passe déjà grande famine et il ne s'y trube rien à prester ; le pays est fort paubre. Alors, barrique de bin baut 48 liv., mesure de froment 38 s., mesure de blé 28 s., mesure de millet 22 s., et c'était alors que à Doazit fesait le jubilé général qui se commença à Doazit le 16 avril 1656, jour de Pâques, et dura quinze jours. Et le 3 de may 1656, les cabaliers qui estaient à Brassempoy s'en sont allés debers Labatut, moyennant 1,300 liv. que ceux de Brassempoy leur ont promis. Et estant au 15 de may 1656, tous les gens de guerre qui estaient en Chalosse s'en sont allés du cousté de haut, comme aussi ceux qui estaient à Labatut s'en sont allés le 22 dudit may, tellement que en toute Chalosse ny aux enbirons n'en est point demeuré aucun grâces à Dieu.

Pour lors, il n'y a abait point de maladies grâces à Dieu, mais il y abait bien d'autres incommodités, car le grain abait haussé. La mesure de froment balait 45 s., mesure.....

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....de blé 32 s., barrique de vin 42 liv., mesure de millet 25 s. Alors s'y passait grande famine par tout le pays, le monde estait fort paubre, n'y abait point ni rien à prester, le paubre monde estait tout à la faim. Le temps estait fort beau, et les fruits avaient beaux semblans, surtout aux bignes, avec grande quantité de raisins qui commençaient à fleurir.

Et estant au 1er de juin 1656, il arriba noubelle que une compagnie de cabaliers s'en venait à Montaut et une autre compagnie à Brassempoy. Ce qui fut bien bray, car le 15 dudit juin 1656 ils arribèrent à Montaut et à Brassempouy. Ces gens estaient à M. de Conty et c'estait pour et à cause de quelques sommes d'argent que lesdits Montaut et Brassempoy debaient de quelque rançon, et les habitants de Montaut et Brassempoy ayant entendu que ces gens debaient arriber, ils quittèrent et bidèrent lesdites paroisses, et alors que lesdits cabaliers furent arribés, ils ne trubèrent rien ni personne pour les adresser, ce qui fut cause qu'ils firent de grands dommages, car ils faisaient tomber plusieurs maisons, couper et brûler les meubles, et faisaient prisonniers ceux qu'ils pubaient trouber, et ruiner et gaster les grains et les autres fruits, et les ont tout à fait perdus.

O grande misère de paubre puble de perdre tous les fruits et les meubles et maisons ruinées, et encore sont pribés de trabailler les biens, et qui plus est ne pubent semer le millet, car le paubre puble ne s'ose pas à retirer. Je vous laisse à penser comme ce paubre puble est fort à plaindre, car c'estait une saison bien maubaise, car la famine était presque par toutes les maisons, excepté quelques bonnes maisons, et n'y abait à prester, car alors la barrique de bin balait 45 liv., mais grâces à Dieu, dans l'huitaine après la mesure devint audit Mugron à 20s., ce qui réjouit le paubre puble, et pour lors on espérait de faire une bonne coueilhude de fruits, car le froment estait alors en bon estat et les millets estaient casi tous bien faits. Les bignes avaient aussi assez de raisins ; les bois de barrique balaient 50 s. tous comptant.

Lesdits cabaliers sont demeurés audit Montaut et....

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Brassempouy l'espace de bint jours, jusqu'au 7 du mois de juillet 1656. Le capitaine de cette compagnie s'appelait M. de Guillebagne, qui estait de Bourdox. Ils ont tout à fait ruiné ledit Montaut et Brassempouy, et rompu les meubles et plusieurs maisons et ruiné et gasté les fruits, et ledit jour de juillet, lesdits cabaliers s'en sont allés et ont passé l'Adour au port de Toulouzette.

Alors la barrique de vin se vendait 42 liv., mesure de froment ballait 25 s., et mesure de blé 20 s, et l'on esperait une bonne vendange Dieu aidant.

Et estant au 20 de juillet 1656, on m'a assuré que le roy d'Espagne estait demeuré maître dans la Catalogne, qu'il en avait chassé le roy de France et ses armées. On m'a aussi assuré que Balthazar y était pour le roi de France, mais qu'il s'était reboulté et rendu du côté de l'Espagnol. M. le prince de Conty y était aussi, lequel conduisait l'armée d'Espagne, car il y a longtemps que ledit prince a guerre avec le roy de France, comme nous avons dit ci-dessus en parlant de Tartas et dudit Balthazar.

Et estant au 24 juillet 1656, il est arribé en Chalosse une compagnie de cabaliers ; le capitaine s'appelait M. Lamon Castillon , lequel fit de grandes bouleries, car il abait poubouer d'aller par toutes les paroisses où bon lui semblait ; il alla premièrement à Amou, et lui baillèrent grande rançon, plus en plusieurs autres paroisses, casi par toutes les paroisses, et entr'autres M. de Bonnaguet traita pour ceux de Doazit à 25 pistoles. C'est une grande misère du paubre puble qui est si foulé, sans qu'il soit nécessaire que ces gens viennent en tout ce pays sinon pour bouler les paroisses. Et après qu'ils ont demeuré quelques jours en Chalosse, ils s'en sont allés par delà l'Adou, bers le Marancin.

Et étant au mois daoust 1656, la mesure de froment balait 25 s., mesure de blé à 20 s., barrique de bin 43 liv., bois de barrique 3 liv., car pour lors on espérait une bonne bandange. Le temps estait fort beau et fort chaud et la pluie tardait fort pour arrouser le millet ; il n'y avait de grandes maladies grâces à Dieu, et n'y avait point grêle du...

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... tout cette année, jusqu'alors, loué soit le bon Dieu, mais le monde estait fort paubre à cause des grands rabages que les gens de guerre ont fait par tout le pays de Chalosse. alors les gardes de M. le prince de Conty, goubernur de ce pays, arribèrent à Dax.

Et estant au commencement de septembre dudit an 1656, le bin debint fort cher et ne s'en trubait plus à bendre ; il se bendait pour lors à 70 liv. la barrique, et le 12 dudit septembre 1656, barrique de vin était bendue à Mugron à 72 liv. la barrique ; j'y étais présent, et pour lors, on commençait à vendanger quelque peu du piquepout, afin de pourvoir plusieurs lieux qui n'en avaient aucune goutte, et le 10 dudit septembre 1656, je en fis bendanger deux barriques à la place, et le fis pourter le lendemain à Ourtez, et les ai vendues à 27 liv. chacune barrique, et les charrois et payages et huilhages payés d'autre part.

Et le 16 dudit septembre 1656, plusieurs firent pourter grande quantité de bins mous à Dax pour le bendre, et en bendirent la plus grande partie à 24 liv. la barrique tout mous. Alors le temps était fort beau et l'on ne bendangeait pas encore, sinon lesdits piquepout. Alors, mesure de froment se vendait à 25 s., mesure de blé, à 17 s., bois de barrique 3 liv.. L'on espérait pour lors bonne bendange, et aussi assez de millet. Et estant près de la fin de septembre, la bandange a été faite par toute Chalosse ; il y a eu assez de bin partout, mais personne n'en achetait pas encore ; il a aussi fait beau temps pour faucher et espiquer le millet. Il s'est fort bien fait mais il n'y a pas eu grande quantité de millet. Pour lors, mesure de froment balait 26 s., mesure de blé à 18 s., mesure de millet à 15 s, et personne ne parle de acheter du bin à aucun prix, ce qui tarde fort au paubre puble. Et estant au novembre 1656, au Sabla à Dax se bendait communément la barrique de bin à 20 liv. Et estant au commencement de décembre 1656, barrique du bin se bendait à Dax à 16 liv. la barrique ; alors mesure de froment se bendait à 24 s., mesure de blé à 17 s., mesure de millet à 14 s ; plus au 15 mars 1657 la barrique de bin se bandait 12 liv., mesure de froment 25 s. ; à Mugron,...

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... mesure blé 16s., mesure de millet 12 s. Mais il n'y abait point d'argent pour lors, ce qui était cause que les marchandises estaient à bon compte, et il y abait pour lors quelque maladie. Et estant au dernier mars 1657, il fit une grande gelée, tant que aux bignes qui estaient aux lieux bas y eut grand dommage en plusieurs endroits, mais pour cela le bin n'enchérit point, car au 15 abvril 1657 la barrique du bin se bendait à 12 liv., et la mesure de froment à 25 s., mesure de blé 15 s., mesure de millet 12 s. ; il n'y abait point de gens de guerre en ce pays, grâces à Dieu, sinon pour recoubrer les tailles et le quartier d'hiber, et pour lors il fesait fort beau temps, tous les fruits étaient alors en bon estat grâces à Dieu.

Et estant au 15 may 1657, le beau temps continuait encore ; la barrique de bin se bendait à 12 liv., mesure de froment à 22 s., mesure de blé 14 s., mesure de millet à12 s. ; mais il n'y avait point d'argent non pas seulement pour payer les tailles du roy.

Et estant au 20 may 1657, jour de la Pentecouste, il fit grêle en plusieurs endroits, et entr'autres lieux il en a fait au bourg, de St-Cricq et a emporté casi tout le bin et aussi a fait grand domage au froment. Ces pauvres gens de St-Cricq sont fort affligés à cause de la perte de leurs fruits. Dieu par sa sainte grâce les veuille réparer !

Et estant an commencement de juin, il fesait encore fort beau temps, les fruits estaient en fort bon estat, le grain et bin estaient à bon counte, car mesure de froment estait à 20 s., mesure de blé 14 s., mesure de millet à 10 s., et y avait grande quantité de bin sur le pays à vendre, de sorte qu'on disait publiquement qu'il avait du grain sur le pays à bendre pour bibre six mois. Depuis St-Jean le bin estait aussi fort à boun counte, c'est-à-dire à 12 liv. la barrique, et tout le monde criait la rareté de l'argent.

Cette année 1657 il y. eut assez bien froment, il se bandait à l'aoust dudit an 1657 à 18 s., la mesure de blé à 12 s., et pour lors le millet estait fort beau par les campagnes, et pour lors le bin estait aussi fort à boun counte, car il y en abait, en ce pays, pour lors grande quantité de pourri.

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Le bin se vendait à 12 liv. la barrique et les bignes estaient assez belles et en bon estat pour y avoir bonne bendange. Toutes marchandises estaient alors assez à boun counte, à cause de la grande rareté d'argent ; les tailles et autres impositions estaient fort grandes, tellement que l'on abait bien de la peine à y remédier. Et estant à la fin de septembre 1657, la mesure de froment estait à 16 s., et pour lors la bendange estait presque achabée et y abait encore grande quantité du vieux.

Mais, pour lors, on fesait de l'eau de bie à Aulès , il donnait du bon bin à 12 liv. la barrique, rendue à Aulès, et du pourri à 8 liv. , et personne ne parlait encore d'en acheter du noubeau. Pour lors le bois de barrique se bendait à 3 liv. tout comptant, et le temps estait fort beau pour faucher le millet, grâces à Dieu. Mais estant au commencement de noubembre, audit an 1657, il se commença une pluie qui continua fort longtemps, et qui fut cause que l'on eut bien de la peine à semer le froment, car la pluie continuait casi toujours, dont le froment se fit fort mal.

Pour lors, le bin se bendait à 14 liv. la barrique sur le lieu, et estant au 15 décembre dudit an, personne n'achetait point du bin, ce qui estait cause que le paubre monde avait grande nécessité d'argent par toute la Chalosse, et pour lors il s'en fut trouvé à 13 liv. 10 s. la barrique, et il fesait toujours des pluies en abondance et encore on continuait toujours à faire de l'eau-de-vie à Aulès, et pour lors mesure de froment se bendait à 18 s., mesure de blé à 12 s., mesure millet à 10 s., et n'y abait point pour lors de guerre ni de maladie en Chalosse, grâces à Dieu. Et estant au 15 janvier de l'an 1658, il se commença un temps fort terrible, savoir pluie, bens, neige et de grandes tourrades si fortes que le bin glaçait dans le berre, et ce temps continua encore longtemps, car estant au 15 février dudit an 1658, il tomba grande quantité de neige, tellement que on disait que longtemps n'y avait pas eu autant de neige en une fois. Mais à moi me subien comme estant homme en âge, que en l'an 1615, en semblable temps, au mois de février, qu'il y abait une grande neige, plus grande ...

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... que n'est celle du présent, donc il fait à présent 43 ans, mais elle ne fit pas grand mal ni aux fruits ni aux arbres, grâces à Dieu ; mais du depuis, en l'an 1629, le jour de Noel et environ ces jours dont il y a eu la Noël dernier passé 28 ans. C'est pour lors que je puis vous dire qu'il tomba de grandes neiges et fit de grandes et si fortes tourrades qu'il fit mourir grandes quantités de bignes et d'arbres casi par tout le pays. Les figuiers et lauriers moururent tous autant qu'il en parut sur la terre. Mais du despuis ledit an 1629 il n'y avait pas eu si grandes neiges ni si grandes tourrades qu'il fait à présent. Je ne saurais encore dire si ces effets auront fait mal aux fruits. Au reste le temps est fort bon et les fruits à boun coumpte, mais il y a grandement manque d'argent, et à présent la barrique de bin se vend à 12 liv., mesure de froment 20 s., mesure de blé 12 s., mesure de millet 10 s. grâces à Dieu ; mais il n'y a pas grand mal au bignes, sinon en quelques lieux bas, mais pour les figuiers et lauriers en mourut grande quantité.

Estant au mois d'abril dudit an 1658, la barrique de bin se bendait à 13 liv., mesure de froment à 20 s., mesure de blé à 12 s., mesure de millet à 10 s.

Ce fut pour lors qu'on commença à parler de tout de bon de faire avec la grâce de Dieu une fort belle dévotion à l'église de Noustre-Dame de Meylis et, pour la feste de la Pentecouste dudit an 1658 toutes les paroisses circonvoisines y biendèrent en proucession, tellement qu'il y avait grande quantité de puble de toutes parts. Ce fut pour lors qu'on acheta la maison qui est auprès de ladite église de Meylis, et on la fit réparer et mettre en boun estat pour commencer à y louger lesdits MM. prestres. Un prestre, nommé M. Dufau, estait celui qui commenca ladite dévotion qui estait fort habile homme. C'est un missionnaire, fils de Gondrin, lequel résidait audit Meylis et faisait plusieurs sermons et catéchismes et enseignait fort bien le puble, et y en a beaucoup de bonnes personnes qui ont donné beaucoup d'argent et autres biens à ladite église pour l'augmentation d'icelle, et aussi aux fêtes de la ...

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... Pentecouste 1659 il est aussi venu plusieurs paroisses et proucessions. Et estant au commencement de l'aoust 1659, ledit sieur Dufau a fait faire à ladite église de Meylis un gros appentis du cousté du nourd, et a aussi fait faire une belle image de Nouste-Dame, et fait mettre devant le gros autel, et a fait bénir des indulgences pour Nouste Dame 15 aoust. Estant sur la fin de juin 1658 , le beau temps se commença en telle sorte que l'on sema for bien le millet cette dite année 1658. Les fruits estaient fort tardieux, car estait au jour de Saint-Jean les raisins n'estaient pas encore enfleuris, dont les brumes firent grand dommage, tellement que le 1er juillet 1658 barrique de bin balait 17 liv., mesure de froment 22 s., mesure de blé 13 s. mesure de millet 13 s. En cette moisson n'y eut guères froment ; il se bendait sur la fin d'aoust 1658 à 30 s. la mesure ; mais par la grâce de Dieu ne dura pas, car dans un mois, à la fin de septembre 1658, mesure de froment estait à 25 s., mesure de blé à 25 s., millet à 12 s., et la barrique de vin à 16 liv.

La bendange dudit an 1658 fut fort tard, car c'estait au milieu du mois d'octobre, mais elle fut bientôt faite car il n'y eut pas que peu de bin. Mais en cette année 1658 il y avait assez de millet en Chalosse grâces à Dieu. N'y avait point pour lors de gens de guerre en Chalosse. Et estant au 9 novembre, il commença à tomber des neiges, l'hiber commença assez à bonne heure, car au mois de décembre 1658 il tomba grande quantité de neige à Bordeaux.

Alors la barrique de bin se bendait à 19 liv., rendeu au port de Mugron, mesure de froment 28 s., mesure de blé 16 s., mesure de millet à 12 s. ; mais la pluye continua jusques en février, et faisait mauvais temps pour trabailler et bouyager. Et estant audit février 1659, il ne se bendait plus du bin à aucun prix. Je vous assure que pour lors il s'en fut trouvé grande quantité à 15 liv. la barrique, mais il n'y abait point d'argent. Mesure de froment balait pour lors 32 s., mesure de blé 17 s., mesure de millet 11 s. Et pour lors, en Armagnac, y avait grand ravage de gens de guerre, mais en Chalosse n'y en avait point, pour lors, ...

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... grâces à Dieu. Et estant à la fin dudit febvrier 1659, le grain haussa, de sorte que mesure de froment valait à Mugron 38 s., mesure de blé(*) 24 s. Mais ce n'a pas duré, car il s'en tourne peu à peu, car au 15 avril 1659 mesure de froment estait à 22 s., mesure de blé à 18 s., mesure de millet à 15 s ; et estant au 20 avril 1659, la mesure froment valait aussi 32 s., et la barrique de vin valait aussi 24 liv. Et estant au 15 juillet 1659, la barrique de bin balait 25 liv., et pour lors il y eut assez de froment, de blé, et le millet était assez beau par la campagne. Alors mesure de froment balait 30 s., mesure de blé 20 s. ; le temps estait fort beau.

En ce temps, on parlait partout journellement que la paix se contractait entre le roy de France et le roy d'Espagne, et aussi que ledit roy de France se mariait avec la fille du roy d'Espagne, et que Mr le Cardinal Mazarin, qui goubernait pour lors le roy de France, s'en benait pour Bayonne pour traiter toutes ces affaires, et de fait, ledit M. le Cardinal passa à Dax et y lougea le 19 juillet 1659, et tira debers Bidache, et puis s'en alla audit Bayonne, et plusieurs gentilhommes de ce pays et d'autres gens y allèrent pour penser boir ledit Mr le Cardinal en passant tous à Tartas, Dax et Bidache, mais leur boyage fut en vain, car ils s'en retournèrent presque tous sans le pouvoir voir à cause de la grande quantité des gens qui estaient avec lui, et il allait toujours en carrosse, et descendait, ou pour mieux dire se faisait descendre auprès de la porte du lougis qu'il devait louger, et estant dedans, il faisait fermer bien ledit lougis. On m'a dit qu'il estait incommodé de la goutte et estait âgé d'environ 60 ans. Dieu par sa sainte grâce le beuille conduire à exploiter bien son entreprise selon la boulonté de Dieu.

Et advenant le 19 aoust 1659, le roy estait arribé à Bourdeaux avec la reyne sa mère et Mgr le duc d'Anjou, frère dudit roy, et M. le prince de Conty, et l'on tient que le roy de France et le roy d'Espagne sont d'accord, tant pour ledit mariage que pour la paix, Dieu en soit loué Alors, on murmure contre les Huguenots ; je ne sais ce ...

(*) Blé, blad, c'est-à-dire seigle.

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... qu'il en adviendra, Dieu les beuille inspirer. En l'année 1659 il fit assez beau temps, alors qu'on bendangeait, mais la bendange de cette année ne fut pas fort grande, mais le bin vieux estait presque tout bendu.

Et estant au commencement d'octobre 1659, on m'a dit que le roy s'en estait parti de Bordeaux et s'en allait debers Toulouse. Alors mesure de froment balait 32 s., mesure de blé 34 s., mesure de millet 16 s., mais personne n'achète pas encore de bin.

Et estant au commencement de noubembre, le bin s'est bendu à 20 liv. la barrique, rendeu sur le port de Mugron, et ont bendu à ce prix tout ce qu'ils ont boulu bendre du bin. Et alors, mesure de froment balait 36 s., mesure de blé 25 s., mesure de millet 17 s.

Et estant au 16 dudit nouvembre 1659, M. le Cardinal Mazarin est passé à Dax et s'en allait debers Toulouse pour aller truber le roy, et en ce jour-là M. de Grammont est arrivé d'Espagne parce qu'il y avait été emboyé en ambassadeur debers le roy d'Espagne, et a esté receu du roy d'Espagne fort honorablement.

A la Fin dudit noubembre, barrique de bin balait à Montaut sur le tain 20 liv., mesure de froment 38 s., mesure de blé 27 s., mesure de millet 18 s., et le temps estait fort bon, et on avait bien semé, le froment grâces à Dieu.

Nous avons parlé ci-devant comme M. de Lacouture de Serresloux, et en l'an 1648 il avait été prins et accusé d'être faux monnoyeur. Mais je vous dirai que pour ce même cas il a été prins lui et son fils, le 26 octobre 1659, et mené à Dax, et les ont fort maltraités en ce voyage. Je prie Dieu qu'il lui beuille conserver. Estant au commencement du mois de décembre 1659, on parla de rabaler l'or et l'argent, ce qui ne fut pas fait, mais cette descride d'argent et le mauvais temps que fit cette saison, fut cause que le grain et le bin haussa un peu, comme nous dirons ci-après, car le 11ème dudit décembre il commença une pluie continuelle qui dura quatre jours sans cesser ; mais le 15 dudit décembre, et quelques jours tout de suite, tomba grande quantité de neige et fesait grand froid et grande ...

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... tourrade, en telle sorte que depuis ledit 15 décembre jusques durant vingt-quatre jours, il y avait 24 tourrades l'une sur l'autre, et fort grandes et profondes, tellement que longtemps y a on n'avait point eu si grand froid, mais ladite neige dura sur la terre l'espace de 60 jours, et y mourut fort de bétail tant grand que menu, et tous les chevaux moururent. Alors la barrique de bin balait sur le tin 22 liv. mesure de froment à Mugron balait 42 s., et pour lors, fesait fort mal bouyager, tant à pied qu'à cheval. Ce fut au temps de cette grande froidure, que M. de Justes d'Espaunic, archiprestre de Doazit tomba malade et mourut, car le mal le prend le 15 décembre de l'an 1659, et mourut, à ce qu'on m'a dit, le 10 janvier de l'an 1660. Ceste et grande et longue neige causa fort le tardibement des trabails, et comme nous abons dit, il y mourut grande quantité du bétail tant du grand que du menu, surtout à Lannegrand en mourut fort, mais il ne pleut depuis le commencement de ladite neige jusqu'en mars. Mais le froid fit grand mal en quelques endroits, aux bignes basses, et le 5 mars 1660, il tomba à Doazit et en d'autres endroits grande quantité de grêle grosse comme de gros noix, mais il ne fit point de mal à cause que les fruits n'étaient point encore en apparence. Alors la barrique de bin balait 26 liv., mesure de froment 42 s., mesure de blé 30 s., mesure de millet 31 s.

Et ce fut aussi en ce temps que l'on fit la procession générale pour la paix entre noustre roy de France et le roy d'Espagne, grâces à Dieu. Et estant au 1er. may 1660, le roy de France en compagnie de la reine sa mère, de M. son frère et de M. le Cardinal Mazarin passèrent tous à Dax et tirèrent devers Bayonne pour aller espouser la fille du roy d'Espagne. Ce dit jour, 1er may 1660, à Doazit, lougea une compagnie de cabaliers de la garde de notre roi de France, et chez nous, à Péboué, en lougea quatre cabaliers et deux baylets ; ils ne firent point de rabages sinon bonne chère.

Je vous veux à présent parler de M. de Lacouture. Comme nous avons dit ci-dessus qu'il a esté fait prisonnier le 26 d'octobre dernier passé ; mais, par la grâce de Dieu, comme notre bon roi est passé à Dax ledit 1er mai 1660, il ...

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... a fait délibrer tous les prisonniers qui estaient à Dax, et ce dit jour, 1er mai 1660, lesdits Lacouture père et fils se retirèrent à Serresloux, par la grâce de Dieu. Alors, la barrique de vin vaut 27 liv., mesure de froment 40 s., mesure de blé 27 s., et la mesure millet 22 s. Et advenant le 12 dudit may 1660, il tomba, il tomba de la grêle en plusieurs endroits de la Chalosse, savoir à Banous, à Audignon, Houssarrieu, Haget, Saint-Cricq et à Brassempoy, et même à Doazit, chez nous ; mais en Doazit ne fit pas mal noutable.

Et encore je beux vous dire que M. Bidart de Tartas debait prendre de la communauté de Doazit arrérages de taille 700 liv., et a fait plusieurs prisonniers en diverses fois sans pouvoir retirer son compte ; mais par malheur, ledit sieur Bidart bint chez nous à Péboué, le 21 may 1660, et fit prisonnier Jean de Laborde, mon neveu, l'aisné à Péboué, et le mena au château de Labatut dans les Landes ; mais il en sortit au bout de cinq jours, moyennant 500 liv. que en Doazit pourtèrent, et encore il en demande 300 liv.

Or, parlons de nostre roi de France qui a demeuré à Bayonne et à Saint-Jean de Luz l'espace d'un mois ou davantage, avant d'espouser, par Don Louis de Haro, espagnol, son procureur. Ce fut le 3 juin 1660, jour de l'ouctave du Corpus Christi, et le 6 dudit juin, notre roy et le roy d'Espagne s'en est fort émerveillé de boir si bien et en si bon estat la noublesse de France, fort bien habillée et en belle ordonnance, dont le roy d'Espagne s'entre visitèrent et aussi se bisitèrent la royne, tant de France que d'Espagne, et noste roy de France fit boir au roy d'Espagne la noblesse de France, fort bien habillée et en belle ordonnance, dont le roy d'Espagne s'en est fort émerveillé de boir si bien et en si bon estat la noublesse de France, et le 13 dudit juin 1660 l'on mena à nostre roy de France l'infante d'Espagne son épouse, et en ce jour furent faits entr'eux la cérémonie des éspousailles par M. l'ébesque de Bayonne et passa à Dax et y lougea ledit jour, et il estait à Tartas ledit jour de juin 1660 là où je fut exprès et présent, et j'eus l'honneur moi-même de boir le roy et la reyne sa ...

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... femme, et aussi la reyne sa mère, et M. le Frère du roy et toute la cour de France, et tous en ma présence ; et environ le midi s'en partirent vers le Mont-de Marsan. Je ne désire plus sinon boir le roy des roys, au ciel, Dieu m'en fasse la grâce ! alors fesait grand chaud.

Or, veux vous parler du noble M. de Lataulade, seigneur de la juridiction de Marquebielle. Mais avant passer outre, je beux vous dire l'estat dudit M. de Lataulade. Il vous faut croire que estait un fort grand gentilhomme et de fort noble extraction ; sa renommée estait si grande, qu'il estait cognu par toute la Franc, d'autant qu'il a demeuré à la cour du roy de France l'espace de 27 ans. Un sien domestique, qui a demeuré à son service l'espace de trente-deux ans, m'a assuré avoir esté présent pendant toutes ses belles actions de guerre. Ledit sieur estait capitaine au régiment de Picardie, en grande réputation, pendant le temps des belles occasions de guerre qui sont passées. Il faut remarquer que ledit sieur fit paraître son courage à Tonneins, où il fit de grands combats, et entr'autres, un jour le maréchal de la Force, qui tenait le parti de la religion, y bint avec 2,000 hommes pour secourir la bille. M. de Lataulade fit commandement de mener les enfants perdus du régiment de Picardie ; on lui donna quarante mousquetiers et trois régiments d'hommes tous choisis. Et en faisant son attaque dans un grand chemin où les ennemis estaient retirés estant soutenu de quatre cents hommes, il emporta le fort de ses ennemis, mais on lui tua vingt-deux sourdats et deux sergents, et ledit sieur Lataulade y fut blessé de trois mousquetades, l'une qui lui perça toute la jambe, et les deux autres fort légèrement blessé, et ladite ville de Tonneins se rendit le jour même, et ledit sieur de Lataulade se fit porter à Navarrenx dans un brancard, où il demeura deux mois dans le lit, et fut réduit de pourter les potences l'espace de deux ans entiers, et du depuis, il alla truber le roy qui estait à assiéger Montauban, et fut pris après six mois de siège. Ledit sieur de Lataulade s'est trouvé en fort d'autres occasions de guerre où il a eu plusieurs autres blessures fort légères et heureuses. Il s'est trubé pendant ...

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... la guerre en France contre ceux de la religion en cinquante-deux sièges ; il a esté en Italie, en Allemagne, en Flandre avec les armées, et aujourd'hui qu'il se porte fort bien et en bonne santé, et en grand repos d'esprit, il est en âge de 60 ans. Il a environ... auquel s'est retiré de la cour, mais il est devenu si gras et gros qu'il ne se peut pas truber en ce pays un cheval capable de le pourter, tant il est pesant, et surtout il a le ventre fort grand ; on m'a assuré qu'il pèse de quatre à cinq quintaux, mais avec tout cela il est homme de grand crédit ; mais d'autant qu'il est si pesant, il se fait conduire dans son carrosse par un bon et gros paires de bœufs ; il a deux de ses fils auprès du roy tellement qu'il est un grand seigneur. Il est parti de son beau château de Lataulade, le 15 dudit juin 1660, et alla entendre une messe à Meylis et passa à Hauriet et à Leyrit (Labeyrie) parce que tous ces messieurs estaient ses parents, et après, alla tout droit au Mont-de-Marsan, et toujours avec ses bœufs et carrosse, tellement qu'il s'y truba audit Mont-de-Marsan, ledit 18 juin 1660, lorsque le roy arribait là. Mais il est homme si puissant et en la bonne grâce du roy, qu'il entrait en la chambre où le roy estait lougé, audit Mont-de Marsan, à toute heure que bon lui semblait, tellement que l'on peut dire que M. de Lataulade est un grand gentilhomme et en grande estime. Il est fort bien reçu du roy et de tous les grands du royaume. Ledit domestique m'a aussi parlé de M. Donyson, son frère capdet, lequel a esté aussi durant les guerres que nous avons parlé ci-dessus, lequel M. de Donyson estait un des meilleurs mousquetaires de la France et des plus heureux ; c'estait un fort bon soldat, et en grande estime et en bonne réputation des plus assurées ; mais à présent ledit sieur Douysson se trube en grande incommodité à cause des grandes fatigues et peines qu'il a souffertes à la guerre. Il s'est battu plusieurs fois et a toujours eu du bon ; c'est un fort bon ami. A présent, lesdits MM. de Lataulade et Douysson demeurent tous deux ensemble, audit château de Lataulade, en bonne amitié.

Et advenant environ la fin du mois de juillet 1661, ...

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... ledit M. de Lataulade benant du cousté de Béarn tomba malade à Oloron, et dans peu de jours il est mort. Je prie Dieu qu'il lui fasse paix.

Et estant au 21 juin 1660, barrique de bin balait 26 liv., mesure de froment 30 s., et le quintal de foin balait à Bayonne, du temps que le roy y estait, audit juin 1660, 3 liv., et la boulaille y estait aussi fort chère.

Et estant au 21 juin 1660, il arriba à Doazit, et généralement par toute la Chalosse et embirons, un peu abant le soleil lebé, un grand tremblement de terre, tellement que tout le monde qui estaient dans les maisons avaient une grande peur, car toutes les maisons tremblaient ; mais, grâces à Dieu, en ce pays, je n'ai pas entendu dire que personne eût aucun mal. J'était ce jour-là à Serres et à Hagetmau où j'entendais partout crier le puble qui estait dans les maisons, disant qu'ils avaient eu grande peur que les maisons leur tombassent dessus ; pour moi, je n'en eus aucune connaissance, grâces à Dieu. Mais hélas ! Je me crois que noustre bon Dieu soit irrité contre nous à cause de nos péchés ; mais hélas, fesons la paix avec Dieu, s'il est possible, bibons mieux que nous n'abons pas fait le temps passé. Hélas ! Hélas ! faisons tous pénitence car Dieu est courroucé contre nous. Dieu nous menace, nous approchons de la mort, elle nous arribera à l'heure où nous y penserons le moins. Je me crains que nous serons alors mal disposés. Ah ! Mettons tous la main à l'œuvre, faisons donc pénitence, et bibons comme nous voudrions avoir biscu à l'heure de noustre mourt, et ayons bonne espérance en Dieu.

On m'a assuré qu'à Bagnères a fait grand dommage, le tremblement de terre, et a duré audit Bagnères l'espace de huit jours au plus ; il y est tombé audit Bagnères quantité de maisons et murailles, et y est mort grand nombre de personnes, et les habitants ont casi tous quitté la ville, de peur de mourir, et les capucins ont aussi quitté leur conban et ont dressé un autel dans leur jardin auprès de leur fontaine ; les montagnes dudit lieu sautaient haut en bas, et se sont enfoncé, lesdites montagnes, de en bas de ...

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... plus de dix piques à ce qu'on m'a dit, et les fontaines se sont changées en couleur de sang, et plusieurs autres ont perdu leurs sources, en telle fayçon que ceux de Bagnères ont couché plusieurs nuits par les bignes et campagnes. Je prie au bon Dieu qu'il lui plaise nous donner sa sainte bénédiction, et nous préserber de mourt subite ! Ainsi soit. Jésus Maria.

Et estant au 3 juillet 1660, il a grelé en plusieurs endroits savoir à Brassempoy, au Gaujeac, à Castelsarrazin à Bastennes et à Donzacq, et en plusieurs autres paroisses aux environs, et y a tout à fait grand mal, mais à Doazit n'a pas fait grand mal noutable, grâces à Dieu.

Et estant au commencement de l'aoust 1660, barrique de bin à 25 liv., mesure de froment 38 s., mesure de blé 22 s. L'on parlait, pour lors, que du cousté de Saint-Jean de Luz et à Bayonne y avait grandes maladies contagieuses et y est mourt grande quantité de personnes.

Et le 24 aoust, jour de saint Barthélemy, (Bertholomé), il tomba grêle en plusieurs endroits, et ent'autres lieux, aux environs du bout du bourg de Doazit fit grand mal.

Nous avons parlé ci-devant de la dévotion de Maylis, laquelle dévotion réussit et réussira avec l'aide de Dieu. Il arrive grande quantité de monde tous les jours, de toutes parts, et M. Dufau y réside toujours, et M. Dubernet de Toulouzette et un autre prestre du cousté de haut ; mais il y a longtemps que M. le curé dudit Maylis et M. Dufau ne sont pas bien ensemble. Je ne say pas leur dispute, pour moi je crois que cela est sur le profit du couban, tant y a que M. le curé n'y est pas entré long temps y a audit couban. Et advenant le 21 septembre 1660, jour de saint Matthieu, Messieurs les évesques, M. l'évesque d'Aire et M. l'évesque de Dax, le tout ensemble audit Meylis pour se rendre visite l'un à l'autre entr'eux, et aussi bisiter ledit Meylis, là où je fus présent et eus l'honneur d'entendre toutes deux les messes desdits évesques. M. le curé n'y a point paru de tout ce jour, mais il y avait un grand nombre de prestres, tant d'une part que d'autre, et plusieurs gentilshommes, entr'autres M. de Poyanne y ...

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... passa le matin, en s'enbvenant de Hagetmau, pour rendre visite à Mgr. l'évesque d'Aire ; M. de Doazit et M. de Lataulade y estaient aussi tout le jour et dinèrent audit comban avec lesdits évesques, et plusieurs autres, tant prestres que noublesse. Ledit M. de Lataulade s'y fesait conduire dans son carrosse avec bon paire de bœufs.

La bendange de l'an 1660 a esté bientôt faite, car il n'y eut que fort peu de bin, mais il y a eu assez de millet, mais il y a eu grande peine pour arecapter ledit millet parce qu'il plubait casi tous les jours. Alors la barrique de bin balait 20 liv., mesure de froment 35 s., mesure de blé 26 s, mesure de millet 17 s.

Et estant au mois de nouvembre 1660, tout le monde bendait du bin au prix de 20 et 21 liv. sur le ten, c'est-à-dire celui qui boulait bendre bendait audit prix. Alors, il a fait plusieurs jours de pluye, ce qui causa qu'on fit le froment à mal aise, et tarda fort à sourtir ; mais le grain ne haussa point grâces à Dieu.

Et estant au 29 dudit noubembre 1660, il tomba grande quantité de neige et fesait grand froid, et le 7 de décembre dudit an 1660 il tomba aussi grande quantité de neige, mais ni l'une ni l'autre ne demeura pas guères sur la terre. Mais ce mauvais temps causa que le froment ne put pas sortir de longtemps comme nous avons dit. Je vous dis encore, que environ le 14 de novembre, 1660 à St-Seber, arriba une compagnie de gens de guerre, et estant au 4 de décembre dudit an 1660, les gens de guerre sourtirent dudit St-Seber, s'en allant à Peyrehorade en garnison par malheur, le Lous fut si grand, qu'ils ne purent pas passer au moulin de Fescaus et se lougèrent au Biélé des Bosc de Lahibade, à Cambat, le lundi matin, passèrent ledit Lous ; Dieu les conduise ! Alors le bin et le grain est comme nous abons dit, grâces à Dieu.

Je bous beux parler d'un accident qui est arribé à Mugron car il y a un métadier dans une métairie de M. Lamoulié, juge de Mugron, un peu plus bas que du bourg de Mugron, appelé au Mouchon, lequel métadier avait une fille, qu'il a mariée avec un homme, et demeuraient tous deux dans ladite ...

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...métairie, et il est advenu que la fille, après avoir eu deux enfants dudit mariage, elle est morte, et les hommes tant beau-père que beau-fils estaient ensemble dans ladite métairie, mais ils ne bibaient pas bien ensemble, et fesaient souvent du bruits entr'eux ; et advient que le soir du 28 nouvembre de l'année 1660, le beau-père estant au lit, l'a estranglé et l'a chargé sur lui et l'a pourté à l'Adour, un peu plus bas du port de Mugron, là estant, il l'a dépouillé tout nud et l'a mis dans l'Adour. Ils avaient une chambrière qui estait à l'ore de ce meurtre couchée dans un autre lit avec lesdits deux enfants, qui entendaient crier l'homme qui morait. Elle se leva de bon matin, elle va dire qu'elle avait entendu crier l'homme. La justice alla prendre le meurtrier, et l'ayant mis en prison l'homme confessa son crime, et dit qu'il était bray qu'il l'avait tué et porté à l'Adour, et le 9 décembre 1660 le mort s'est trouvé dans l'Adour tout nud, comme le meurtrier l'avait dit, et a esté enterré dans le cimetière de Mugron, et le meurtrier est en prison. La justice de Mugron l'a condamné à être escouartéré ; il a été mené à Bourdeaux en appel et a esté roué à Mugron le 26 janvier 1661, a la place auprès d'oun venden les pourçons.

Et estant à la fin de janvier 1661, le temps estait fort beau et ne fesait point froid. Alors, les froments estaient fort beaux par les campagnes. Alors, la barrique de bin balait 18 liv., mesure de froment 32 s., mesure de blé 22 s., mesure de millet 15 s. Et depuis, et estant au 8e de mars 1661, on m'a dit et assuré que M. le Cardinal Mazarin estait mourt : je prie Dieu qu'il lui fasse paix.

Nous sommes bien tenus de prier Dieu pour lui, car c'est lui qui a fait la paix entre le roy de France et le roy d'Espagne, comme nous avons dit ci-dessus. On m'a aussi assuré que au faubourg de Pau, le 30 mars 1661, le feu a brûlé deux cent quinze maisons, qui est grand dommage et le 7 avril 1661, à Mugron y a eu grand désordre, car à ce qu'on m'a dit, il y a eu quelque dispute entre M. Lamoulié juge de Mugron et le fils de M. Darbo, ...

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... en telle sorte que M. Darbo et M. de Roy et aussi M. de Larrhède, avocat, s'y sont rencontrés, de façon que deux fils de M. Darbau sont esté tués en cette mauvaise rencontre et ledit Darbo blessé et mourt.

MM. de Doazit ont eu l'honneur d'avoir cette année pour leur prédicateur un des conseillers et prédicateur ordinaire du roy, appelé le Revérend Père Raphaël Dupuy, religieux de l'Observance de Saint-François, de la province de Guienne, lequel entretint leurs Majestés, par ses prédications à St-Jean de Luz, pendant le séjour qu'elles y firent pour la célébration des nouces qui durèrent environ six semaines. Et estant au mois d'abvril et de may, le temps estait fort pluvieux et dura jusqu'au huitième de juin, ce qui fut cause que le froment par les champs estait fort paubre, car en cette année 1661 il n'y eut pas que fort peu de froment, et se bendait au commencement à 35 s. la mesure, mais il fit beau temps pour faire le millet, car au 20 juillet les millas estaient fort beaux et avancés et grands, et pour lors les bignes estaient en bon estat, mais il n'y avait pas guères de raisin à cause que la brume y avait fait grand mal, et aussi avait gelé en plusieurs endroits.

La barrique de bin pour lors balait 20 liv., et estant au commencement de septembre 1661, la barrique de bin balait 24 liv., c'est-à-dire le bon, car il y en avait grande quantité de pourri. Mesure de froment balait 34 sols, mesure de blé 23 sols. Pour lors il y avait grande maladie, et surtout au Biellé du Mus où il estait mourt depuis le 15 d'aoust jusqu'au dernier de septembre dudit an 1661, en tout Doazit, près de 30 personnes. La bandange de l'an 1661 a été bientôt faite, car il n'y a eu que fort peu de bin, mais il y a eu assez de millet grâces à Dieu. La barrique de vin se bendait pour la St-Martin à 21 liv. Sur la fin, mesure de froment à 34 s., mesure de blé 23 s., mesure de millet à15 s., et depuis on m'a assuré nouvelle certaine, que noustre reine de France s'estait accouchée d'un Dauphin, c'estait le jour de Touts Saints entre l'une heure et les deux heures du matin. Dieu le veuille conserver par sainte grâce. Et estant en février 1662 le grain haussa un peu, ...

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... car le 23 dudit février la mesure de froment valait à Mugron 48 s., et mesure de blé 30 s., mesure de millet 20 s. La barrique de bon vin valait pour lors 23 liv. Et estant au 15 avril 1662, mesure de froment se bendait à 46 s., mesure de blé 26 s., mesure de millet à19 s., barrique de vin à 23 liv.

Et le 16 dudit avril 1662, il tomba grande quantité de grêle en plusieurs endroits, et surtout fit grand mal à Bergoey, à Labasquère, à Joanborde, et passe vers l'ou plan à Gaucharret, à Meylis, et fit aussi grand mal. Faut nouter que outre cela, aux vignes, partout, généralement partout il n'y avait que fort peu de raisin, de façon qu'on commença à crier partout qu'il n'y aurait pas cette année que fort peu de bin. Et estant au 15 mai 1662, la barrique de bin se bendait tout comptant 30 liv. sur le tain et la mesure de froment 45 s., mesure de blé 28 s., mesure de millet 20 s. C'était pour lors à l'abril et en mai 1662, que M. Bonnaguet(*) estait fort malade, et moi même y fut trois diverses fois, le pensant visiter, mais M. de Doazit ne me laissa point entrer. Je prie au bon Dieu qu'il lui emboie santé, et mourut le 16 juin 1662.

Et à la fin de juin 1662, barrique de bin balait 33 liv., mesure de froment 40 s., mesure de blé 28 s., mesure de millet 20 s., et pour lors aux bignes n'y abait que fort peu de raisin, et pour lors le temps estait fort beau pour assembler le blé et pour faire le millet. Et estant au 15 d'aoust 1662, barrique de bin vaut 34 liv., mesure de froment 38 s. mesure de millet 20 s., et pour lors le millet était fort beau par la campagne, et au 20 septembre 1662 la barrique de bin balait 40 liv. mesure de froment 42 s., mesure de blé 32 s., mesure de millet 22 s. Cette vendange dudit an 1662 feut fort petite, car il n'y eut pas que fort peu de bin. On craint qu'il ne soit fort cher, à cause qu'il n'y en a pas que fort peu. Alors, mesure de froment balait 44 s., mesure de blé 33 s., mesure de millet 22 s. Et estant au commencement de janvier 1663, la barrique de bin se bendait ...

(*) Gilles de Candalle, sieur de Bonnaguet, fils de noble François de Candalle et Louise de Vidart, damoiselle.

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... 24 liv., rendue au port de Mugron, mais le bin n'est pas fort assuré la présente année, car il n'a pas grande force. et pour- lors mesure de froment balait 42 s. mesure de blé 23 s., mesure millet 20 s.

Je bous beux à présent parler de loups qui ont fait grands dommages en ce pays depuis le mois de septembre dernier passé, car d'ordinaire. et casi tous les jours, on boet (voit) des loups en les paroisses d'environ du Lous, et ont déjà fait de grands ravages depuis Castelnau jusques à Cerreslous, et ont mangé ou tué des chebals et baches, brebis et chèvres et oies, et entr'autres choses ont tué un cheval qui estait d'Eyliot de Doazit, l'ayant trouvé sur le bout de la lande appelée de la Hourque ; ce fut le cinquième jour de janvier 1663, mais le plus gros de deux loups y est demeuré, car le 8 dudit janvier 1663, un homme de Poyalé, de la maison du Lon, lui lâcha un coup de serpe dont lui fit une grande blessure sur le dos, puis un autre homme dudit Poyalé lui lâcha un coup de fusil, et alors lui donnèrent la chasse et le firent mourir à Malabat ; et audit juillet 1663, les loups ont tué et mangé tout une cabale de M. Justes d'Espaunic, et dans la métairie de Gauchard de nuit.

Je vous beux parler des gabaleurs qui ont fait de grands dommages en ce pays, car environ le mois de mai 1661, ils ont fait des courses en ce pays, tantôt au chemin de Hagetmau et autrefois au chemin de Dax, en plusieurs diverses fois, à la dérobée, et biennent à troupes par lesdits chemins, bien armés, et mis à mourt grande quantité de chevals et cabales et asnes, de ceux qui portaient sel, et plusieurs paires de boeufs, tellement qu'ils tuent tout le bétail qu'ils trubent porter du sel. Lesdits gabaleurs se tiennent à la bile d'Aire et biennent tantôt au bout d'un mois, tantôt au bout de vingt jours et de quinze jours, et ne s'arrêtent guère, sinon qu'en prenant tout ce dit bétail, et se saubent à la fuite, parce qu'ils sont bien montés et bien armés.

Mais advient que le 22 janvier 1663, et un peu avant le jour, cinq ou six de ces dits gabaleurs allèrent, à ce que je crois, pour continuer de tuer le bétail au chemin de ...

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... Hagetmau ; mais estant près le bout de la lande que l'on appelle à Moundose, ils firent une rencontre de je ne sais quelles gens, en telle sorte y firent au plus fort, mais un des gabaleurs y demeura mourt, et un autre s'en alla fort blessé, je ne sais s'il est mourt ; on a ensebeli celui mourt sur le chemin. Mais quatre jours après, enbiron 29 ou 30 gabaleurs sont benus où estait ledit gabaleur mourt, et ont pris trois garçons du boisinage dudit lieu où le gabaleur estait mourt, et ont aussi trubé par rencontre un homme de Donzac nommé Lescudé, et ont mené par force tous quatre à Ayre. Mais après les avoir ouïs et interrogés du meurtre dudit mourt, ils les ont renboyés sans leur faire autre mal.

Je bous ai parlé ci-devant des désordres de la débotion de Maylis ; mais à présent, par la grâce de Dieu, M. Despouy, curé de Larbey et dudit Meylis, est fort bien d'accord avec M. Dufau et aussi avec les autres chapelains. La paix a esté faite le 15 janbier en 1663, par l'entremise de bons amis, et la débotion réussira avec la grâce de Dieu, grâces à Dieu.

Alors la barrique de bin balait 24 liv. sur les teins, mesure de froment 42 s., mesure de blé 32 s., mesure de millet 22 s.

Et estant au commencement de fébrier 1663, il faisait grandement froid, et estant au 13 du fébrier, il tomba grande quantité de neige, tellement qu'il y en abait jusque à la hauteur d'une grousse coudée et encore plus. Il faisait grandissime froid ; ce fut alors que M. de Banos(*) mourut et s'enterra le jour de la plus grandes neige qui était le jeudi 22 dudit fébrier 1663.

Cette neige dura quinze jours, et enfin elle en sourtit à cause qu'il fit une grosse pluie, et alors il y avait par les chemins si grande abondance d'eau et de neige tout en coup, qu'il n'y avait personne qui pouvait marcher ; car, le 24 dudit fébrier, jour de Saint-Mathias, moi-même et la plus part de nouste famille pensaient à aller à la messe au Mus. Mais estant sur le gros chemin et au-delà de la maison de Coudicanne, nous ne peumes plus marcher à cause ...

(*) Zacharie de Navailles écuyer, baron de Banos et Dume

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... du maubais chemin, et fumes contraints de nous en retourner, et cette grande neige et pluie feut cause de grand débordement des ribières qui ont fait grands dommages aux terres des embirons et aux ponts, et même on m'a assuré qu'une galuppe de Came s'est noyée près de Bayonne et noya vingt personnes, et encore on m'a dit qu'il s'y est noyé plusieurs autres bateaux et quantité de personnes.

Alors barrique de bin balait 25 liv., mesure de froment 44 s., mesure de blé 33 s., mesure de millet 24 s.

Et sur la fin du mois d'avril 1663, le temps estait pour lors fort beau et les fruits de la terre avaient pour lors belle apparence, et alors barrique de bin balait 30 liv., mesure de froment 42 s., mesure de blé 32 s., mesure de millet 25 s.

Le 19 mai 1663, tomba grande quantité de grêle en plusieurs endroits, savoir à Labatut, Habas, Misson, Estibaux, Tilh et Arsague, Castel-Sarrasin, Amou et à Momuy, à Hagetmau et en haut à plusieurs autres endroits, et encore par delà l'Adou on m'a dit qu'il avait fait grand mal surtout au grain, et aussi en quelques endroits à Doazit, et même à noustre bigne de Laboyrie a fait un peu de mal, grâces à Dieu.

Ceste grêle fut cause que le grain haussa un peu, car le 26 mai dudit an 1663, mesure de blé valait 29 s. à Saint-Sever, et alors la barrique de bin balait 25 liv., et pour lors l'argent estait fort rare ; et le 22 mai 1663,à Mugron, mesure de blé valait 39 s., mesure de froment 48 s., mesure de millet 30 s. ; et le 2 abril 1663, à Saint-Sever, mesure de blé balait 33 s. Le monde estait alors fort estonné car il n'y avait point d'argent ni de grain à prester ni autres marchandises.

Le 6 de juin 1663, à Hagetmau, fut fait grande étranglerie. Une fille estait accusée de s'avoir tué, un sien enfant, et pour lors il y avait dix neuf ans que audit Hagetmau avait aussi fait pendre une autre femme pour semblable crime de s'avoir aussi tué un enfant sien.

Le 21 juin 1663, mesure de blé valait à Mugron 33 s., mesure de millet 28 s.

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Nous abons parlé des gabaleurs, mais ils ne s'arrêtent pas encore ; car le 20 de juin 1663 lesdits gabaleurs allèrent au chemin de Hagetmau sur la lande près de Mondose et tuèrent un boeuf et quinze ou seize chevals et ânes qui pourtaient du sel. Je me crains qu'ils veuillent pouser le bureau de la gabelle, ce qui sera une grande charge pour le pauvre pays de Chalosse. Oh ! la grande misère. Je prie le bon Dieu qu'il lui plaise y mettre sa sainte bénédiction. Amen.

Or maintenant bous bus-je parler des choses que je ne bous ai jamais parlé. C'est à savoir des huguenots ; car, d'autant que j'ai bu plusieurs fois en Béarn pour rendre bisite à M. mon frère curé de Lanneplan, j'ai bu soubent le puble à grandes troupes en la bille d'Ourthez sortir et entrer au prêche des huguenots dont j'ai grand mal au cœur, car la pluspart du peuple du Béarn sont des huguenots, et comme j'étais à Sainte-Suzanne le 11 juin 1683, jour de la fête de saint Barnabé, et là estant je entendis que M. Dubourg, curé dudit Sainte-Suzanne, fesait procédure contre le sieur Magendi, ministre d'Orthez, à cause que ledit sieur ministre abait été prêcher audit Sainte-Suzanne le jour auparavant, contre les ordonnances de M. Tabié premier président de Pau, et cela m'a douné occasion de mettre la main à la plume pour écrire le sujet des huguenots. Il vous faut saboir que cette religion des huguenots n'est pas de fort longtemps ; car Luther et Calvin commencèrent cette religion prétendue réformée environ l'an 1540. Luther était allemand, et Calvin était français du près de Dijon en Bourgogne, et Luther était religieux en l'Ordre des Augustins, et de son temps il y eut un différend entre les Jacobins et entre les Augustins sur la prééminence de leurs ordres. Ce différend fut porté par devant le pape de Rome, et Luther fut député pour aller par devant sa sainteté pour soutenir la cause desdits Augustins. Mais Luther fut trompé en son opinion, car, le Pape prononça en faveur des Jacobins, ce qui fâcha si fort l'esprit de Luther qu'il tourna cazaque et se révolta, prêchant contre la braie religion catholique et contre l'autorité de l'Eglise et du Pape. Il quitta son habit ...

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... et se maria, fesant leçon publique de son hérésie de laquelle il infectait grandement l'Allemagne et tout le boisinage.

Calvin ne feut pas moins méchant que Luther, duquel il fut disciple. Mais ne pouvant pas s'accorder, ils firent à part ; car Luther accordait la réalité du Saint-Sacrement, c'est que Calvin ne faisait pas. Calvin était de Dijon en Bourgogne prestre séculier et recteur d'une fort bonne paroisse. Il se rébolta parce qu'il ne peut pas parbenir à estre archidiacre. Il se banda contre son évesque, quitta sa cure et s'en alla à Genève, où il prêcha sa fausse doctrine, de laquelle la république de Génève est tellement infectée, pour le jourd'hui, qu'il ne reste pas un seul catholique. De sorte que ceux de Genève ont chassé leur évesque de leur ville et le chapitre des chanoines et tous les ordres des religieux, tous tant curés et prêtres et finalement tous ceux qui faisaient profession de la braie religion catholique furent chassés et bannis de ladite république de Genève.

Depuis avoir escrit, on ma dit et assuré que Luther se révolta l'an 1518, et Calvin se rébolta en l'an 1536.

Ces deux hérésiarques furent donc grandement dissidans en leur fausse doctrine, aussi bien que ceux qui les ont suibis, puisqu'ils ne peubent s'accorder en rien, que seulement pour s'opposer à la bérité de la créance de la sainte Eglise catholique, apostolique, roumaine, et contre le Pape et contre ses adhérans.

Calvin après avoir establi sa fausse religion à Genève, il envoya de ses ministres de la religion prétendue réformée dans le pays de Béarn, de laquelle mauvaise religion tout le Béarn fut casi tout empoisonné, de telle façon que la sainte messe fut défendue dans le Béarn au mois de septembre 1569, par la reine Jeanne.

Ceste reyne était la mère du feu roi de France, c'est-à-dire mère du roy Henry IVme, qu'on dit Henri-le-Grand ; elle estait héritière du royaume de la Navarre et de la Bigorre et de Lavedan, et de la duché d'Albret et d'autres places ; elle estait veuve à feu Antoine de Bourbon et ledit Antoine était sourti de Louis de France comte de Clermont.

Et audit temps 1569, ladite reyne Jeanne fit saisir tous ...

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... les biens des églises et des ecclésiastiques et fit bannir les prestres, et les religieux et les chanoines, et généralement tous les Ordres ecclésiastiques, et il y en eut plusieurs qui furent mis à mort par la cruauté du comte de Montgommery, que ladite reyne fit benir du cousté de Genève. Ce comte estait fort maubais et tant cruel, qu'il fit brûler grande quantité des églises tant en Béarn qu'en Chalosse.

Ceste reyne laissait jouir aux prestres de leurs revenus durant leur bie, à la charge qu'ils se fissent huguenots, et leur donnait permission de se marier, et y en eut quelques uns qui se firent huguenots et se marièrent ; mais il y en eut bien de ceux qui souffrirent mort et martyre, car entr'autres il y eut un bon prêtre à Orthez qui fut pris par les huguenots, lequel fut ferme et constant en la religion catholique. Les huguenots le menèrent sur le pont du Gabe d'Ourthez qui estait un pont fort haut, de la hauteur d'environ 50 coudées ou plus. Le Gabe fort rapide est bourdé de roucher de part et d'autre et sur lequel pont y avait une fenêtre et y est encore aujourd'hui toute de pierres taillées au garde fou, par laquelle fenêtre le bon prêtre fut jetté de haut en bas par les huguenots, avec promesse qu'ils lui firent de lui laisser la bie s'il se poubait sauber.

Le paubre prestre alla au fond de l'eau qui est fort profonde, et en peu de temps y parut environ trente pas du précipice, et se prenant à grimper sur quelque rocher, il se feut saubé sur la promesse que lui abaient faite de lui laisser la bie s'il se poubait sauber. Mais comme ils n'ont point de foi ils ne lui tinrent point promesse ; mais ils l'allèrent couper les mains avec. leurs épées, si bien que le paubre prestre feut envoyé par une seconde fois au fond de l'eau et pourté par la rapidité du Gabe parmi les rochers où il mourut et fut mangé des poissons, et cette fenestre porte encore pour le jourd'hui la fenestre d'ous capérans et n'a autre nom que la fenestre d'ous capérans.

Un autre prestre, le curé de Départ et fils de la maison de Hargues de Castet-Tarbe, quitta sa cure et son pays quoiqu'il lui fut promis de jouir de sa cure et des revenus d'icelle durant sa bie par l'édit de ladite reyne, s'il eut boulu ...

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... quitter la religion, ce qu'il ne boulut pas faire, mais aima mieux quitter le pays et le bénéfice et s'en alla à Saint-Jean-de-Luz où il feut bien reçu des prêtres du lieu et l'associèrent en leur compagnie où il a biscu fort longtemps de sa messe, et estait encore bibant lorsque le roi Louis XIII bient dans le Béarn, qui estait l'an 1620, pour y remettre l'exercice de la sainte messe, et qu'ayant parvenu à la noutice de M. l'Evesque de Lescar, il lui escribit pour bénir prendre son bénéfice, ce qu'il refusa disant qu'il aimait mieux mourir en son exil que de voir tous ses parents s'étre rendus huguenots, et n'en boulut jamais boir aucun à Saint-Jean-de-Luz, et cette maison de Hargous est pour le jourd'hui maison des métayers de ce quartier, et les plus obstinés huguenots du Béarn. Quelques temps après, ce bon prestre est mort fort religieusement en la confession de la sainte foi catholique à Saint-Jean-de-Luz.

En ce temps de désordres, il y avait un chanoine à Lescar nommé Audigeos qui ne boulut point quitter la bille ni sa chambre canonicale, ni même obéir aux édits de ladite reyne Jeanne. Les huguenots le prindent et firent brûler l'église cathédrale de Lescar, et pendirent le beau chanoine au devant de ladite église à un l'orme qui est encore aujourd'hui devant ladite église, et ledit chanoine mourut saintement et martyrisé pour la foi de la religion catholique.

Un feu Monsieur de Bourre(*), grand'père de feu M. de Larroque qu'est ici bien cognu, c'est-à-dire ledit Larroque ; mais ledit feu grand'père dudit Larroque bon catholique qui ne boulut pas obéir aux ordonnances des huguenots, ils le firent brûler en effigie sur le canton de la bille d'Orthez.

Ladite reyne Jeanne avait fait une ordonnance que tous ceux qui allèrent à la messe aurait de loty mayou(**) pour chaque fois la somme de 10 fr. ; et advient qu'une bonne femme de la bille de Pau, bonne catholique, estait la grand'mère de M. de Capdeville de Pau qui est aujourd'hui seigneur de Brassempouy. Cette femme alla une fois à la ...

(*) De Navailles de Baure.

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(**) (Ph. Dubedout :) Voir note p. 603 : de loty mayou : d'amende.

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... messe, de quoi ladite reyne fâchée l'envoya à quérir. Cette bonne femme il alla et lui dit : Oui, madame, je y suis estée une fois et vous apporte 10 livres comme vous avez ordonné, et y veux encore retourner deux fois et vous apporte le payement de tout. Bah ! dit la reyne, n'en parle plus.

Pour lors il y avait un prestre qui estait prébendier d'une prébende de Belloc, nommé Jean de Laborde, lequel se fit huguenot et se maria et jouit de la prébende suivant l'édit de la reyne, et ses enfants en jouirent aussi pendant longtemps comme héritiers dudit prêtre leur père.

Mais de depuis comme M. mon frère le prestre demeurait en Béarn après le retour de la sainte messe, et ayant appris que ladite prébende venait de cette sorte, il impétra ladite prébende et l'emporta de haute lutte en parlement de Pau, et en jouit encore pour le jourd'hui qui baut environ 40 on 50 liv., et jusqu'à présent les héritiers du mauvais prestre ont joui du restant des autres biens ; mais à présent les héritiers des parents dudit prestre demandent les biens dudit prestre aussi que ladite prébende et beulent faire déclarer le mariage dudit prestre clandestin, et les enfants dudit prestre bastards.

En ce temps de ces grands désordres, les huguenots allaient en Chalosse faire de grands bruslements des églises et tuèrent grand nombre de personnes. En une matinée en tuèrent, à ce qu'on m'a dit, au Bielé de Marquebielle sept hommes, depuis la Hitte de Cerre jusqu'au plan ; et entr'autres en tuèrent un à la maison de Chose nommée le Priou de Chose, maistre de laditte maison. Une autre matinée les Huguenots et au temps dudit désordre rencontrèrent un bon prestre sur la lande Busquet, près la maison de Haza ; ce prestre se nommait de surnom Bernole, fils de la maison du Haydet de Doazit, ils le prindent et le boulurent faire renier la sainte foi catholique, c'est qu'il refusa et aima mieux mourir. Ils l'attachèrent à un chêne les mains croisées derrière le dos, et le firent mourir à coup d'arquebuse comme qui tire au blanc.

Laditte année 1620, comme le roy avait rétabli l'exercice de la sainte messe et remué la garnison de Navarrens , il y ...

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... mit des gens de France, d'autant qu'il ne se fiait point en les Béarnais, et boyant lesdits Béarnais que le roy les abait pribés de rentes et pribiléges qu'ils abaient auparabant, ils ourdissent une trahison entr'eux, c'est à faire mourir et tuer tous les chefs des souldats de la garnison de Nabarrenx ; mais Dieu permit qu'ils fussent descouverts et furent prins par les sourdats de la garnison et en pendirent quelques-uns. Les autres se sauvèrent tellement, que du depuis le roy ne s'est point fié en les Béarnais.

Environ le temps que ces désordres se faisaient, et comme le roy se feut retiré en France, les Béarnais firent une grande armée entr'eux, dont M. de Laforce était le général.

Ils allèrent poser le siège à Ayre et y demeurèrent environ deux mois. Mais l'ayant pris, M. de Gramont et M. de Poyanne les allèrent assiéger et en tuèrent une partie ; les autres se saubèrent en fuite, et les Français demeurent les maistres de la place d'Ayre, mais non pas sans peine ; car les canons de Bayonne où Dax marchaient par l'Adour pour abattre Ayre. M. le Biscomte d'Ourthe estait le conducteur desdits canons et estait à Saint-Sever lorsque Ayre fut prins par les Francais, et de là étant s'en tournèrent en bas, je m'en soubiens.

Et encore de plus, les Béarnais allèrent aussi prendre la bille de Sordes ; mais aussitôt les Français les en firent sourtir et encore s'en allèrent à Berenx, et tenaient le fort dans une tour appelée à Mongiscar, sur le bout d'une lande, dont il fallut que M. de Poyanne y amenât de grandes compagnies de gens de guerre pour les en tirer ; il les en fit sortir et fit raser ladite tour. J'y suis esté plusieurs fois depuis le rasement.

Il me souvient aussi je crois, que ce fut en l'an 1620, quand le roi fait poser le siège devant Montauban et y demeura longtemps, de sorte que le peuple de Montauban résistèrent longtemps, et le roi fit lever ledit siège ; mais après du depuis le roy fit couper tous les grains et fruits des environs de Montauban durant quelques années ; et par ce moyen ceux de Montauban furent fort paubres et ...

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... furent contraints d'avoir recours à la clémence de noustre bon roy et se rendirent à son obéissance, mais ils sont huguenots.

Et estant au mois de juillet 1663, le bin et grain rabala, grâces a Dieu ; car pour lors la barrique de bin estait à 27 liv., mesure de blé à 28 s. à Mugron ; mais pour lors y pleut et fit de si grandes pluies tellement, que à peine l'on assembla le froment, mais il y eut grande quantité de froment. Et estant à l'aoust, 1663, mesure de froment baut 28 s., mesure de blé à 26 s., la barrique de bin à 24 liv.

On m'a assuré que, estant au commencement de juillet 1663, que au Mont-de-Marsan estait arribé grand nombre de cabaliers gabaleurs qui boulaient pouser la gabelle tant audit Mont-de-Marsan qu'à Saint-Sever ; mais ceux de Saint-Sever sourtirent un beau nombre et les allèrent arrêter à l'Adou, et là firent quelques petits désordres entr'eux, ce qui feut mal pour ceux de Saint-Sever. Car sur la fin d'aoust 1663 à Saint-Sever, est arribé un grand nombre cabaliers par ordre du roy et ont dit qu'ils ont obtenu prise de corps contre ceux de Saint-Sever qui estaient sourtis contre les gabaleurs, tellement que ceux de Saint-Sever, sont en peine et une partie se cachent, et lesdits cabalier demeurent audit Saint-Sever et font de grands désordres.

La gabelle est déjà posée à Mont-de-Marsan, je ne sais ce qui arribera audit Saint-Seber.

Et advenant le 9 d'octobre 1663 en tout ce pays de Chalosse a fait un grand ban, en telle sorte qu'il a fait un grand dommage au millet en tout ce pays, de sorte que le grain a un peu haussé ; car, à Saint-Sever, le 13 d'octobre 1663, mesure de froment à 38 s., mesure de blé à 31 s. et mesure millet à 31 s.

Les gabaleurs ne sont pas encore las, car le 15 dudit octobre 1663 ils allèrent sept ou huit cabaliers gabaleurs au chemin de Hagetmau, tant sur lanne Meylis que sur lanne Mayon près de Mondose et en d'autres endroits par les chemins et tuèrent quinze ou seize chebals de ceux qui portaient du sel. Lesdits gabaleurs et gens de guerre sont démeurés audit St-Sever, jusques au mois de janvier 1664, ...

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... et ce, à l'intention de poser la gabelle à St-Sever, et à cause que ceux de Saint-Sever ne l'ont boulu prendre, je bous, assure qu'ils ont fait de grands désordres audit Saint-Sever, et avant d'en sourtir il a fallu que les quatre sièges, savoir, Saint-Seber, Dax, Tartas et Mont-de-Marsan leur ont donné 36,000 s., et après avoir reçu tant de ruines.

La bandange de l'an 1663 a esté fort tard, car elle a esté faite en octobre, et il n'y a eu que fort peu de bin ; il se bendait déjà au 15 dudit octobre 1663 à 20 fr. la b/que rendu sur le port de Mugron, et à ce prix poubait bendre tout ceux qui boulaient bendre ; il n'y eut que peu de millet à cause du bent et des pluies qu'il abait faites en l'esté.

Il estant à St-Martin 1663 la barrique de bin se bendait à Doazit sur les teins à 20 liv. comptant ; mesure froment ballait à Mugron 30 s., mesure blé 32 s. ; mesure millet 24 s. et pour lors fesait fort beau temps, de sorte que l'on sema fort bien le froment, grâces à Dieu.

Il estant en février 1664 la b/que de vin ballait à Doazit sur les teins 24 liv., mesure froment, 35 s. ; mesure blé à Mugron 28 s. ; mesure millet, 24 s. et en mars 1664 b/que de vin à 22 liv., mesure froment 35 s., mesure blé 26 s., mesure millet 23 s.

Et le matin du 1er avril 1664 il y eut une grande nébade qui avait un pan de hauteur ; pour lors les raisins commençaient à paraître aux vignes ; mais Dieu promit qu'il n'y fit point dommage.

Et estant au commencement de juillet 1664 la barrique de bin se bendait 25 liv. ; mesure froment 32 s. ; mesure millet 24 s. ; audit an 1664 il y eut fort peu de froment, mais il y eut grande quantité de blé. Le millet a esté l'an 1664 tout semencé depuis Saint-Jean, après estre semencé il n'a point plu de cinq semaines, ce qui a esté cause qu'il n'en est sourti que fort peu, et au 1er aoust 1664, mesure froment valait 32 s., mesure blé 27 s., barrique de bin balait 22 liv. ; il y avait alors fort pauvre apparence de millet, car je me crains qu'il sera cher cette année : je prie Dieu qu'il aye pitié du paubre puble.

Les gabaleurs ne s'arrêtent pas, car au commencement ...

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... de l'abril 1664, sont arribés à Hagetmau environ de 18 ou 20 gabaleurs, ils sont demeurés audit Hagetmau deux mois, sans qu'ils aient osé poser la gabelle, et se sont retirés. Mais quelques-uns tant des environs que de Hagetmau sont esté accusés d'être du parti des gabaleurs, et même il y a eu quelque bruit de nuit de sortes que deux hommes de Hagetmau sont estés tués, et ce par des gens inconnus et masqués ; les tués sont Labat, sa femme, son fils et leur maison boulée entièrement.

Mais le matin du 20 juillet 1664 une grande compagnie de gabaleurs sont arrivés audit Haget, et en arrivant ils ont tué trois on quatre hommes de ceux de Haget et ont pillé et volé casi tout le bourg de Haget et aux environs, et le 21 dudit juillet trois gabaleurs sourtirent pour aller vers Horsarieu et furent tués.

Le 22 juillet jour de Magdelaine, 17 gabaleurs sourtirent de Haget et s'en allèrent pour charger du pillage de Haget, mais le lendemain ils tournèrent à Haget, et menèrent avec eux plus grand nombre de gabaleurs, et en arribant pillèrent la maison du Moulié de Saint-Girons, et le 24 dudit juillet, menacèrent d'aller piller à Doazit, et le 25 dudit juillet il y eut quelque conférence, et fut dit qu'il y avait trêve pour trois jours. Cependant à Doazit se barricadèrent et disaient qu'ils se boulaient défendre ; mais ce fut bien le contre, car le 29 dudit juillet 1664 casi tous ceux de Doazit ou la plus grande part se cachèrent, tant les personnes que tous les meubles, et lesdits gabaleurs allèrent grand nombre au biélé du Mus, et boulèrent plusieurs maisons, entr'autres au château de Doazit : ils y prendirent les poules, les dindes et tous les harnais des chebals, et menèrent M. de Lacouture de Cerres prisonnier, qui trubèrent au château de Doazit, et passèrent au bourg de Doazit, mais ils n'y trubèrent pas grand cas ; ils se retournèrent audit Haget, et le 30 dudit juillet, sur la noeit, les gabaleurs allèrent à la maison de M. de Cerres, à Serres-Lous, et y trubèrent M. Julien Dutournier de Montaut et l'amenèrent prisonnier à Hagetmau, car ledit Tournier estait au contre d'un grand nombre de personnes qui ont prinse de corps parce que lesdits gabaleurs disent ...

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... que plusieurs personnes tant de Hagetmau que des environs, les ont attaqués et pour cette cause sont criminels et n'ose paraistre, et de plus les gabaleurs disent que lesdits criminels tant de Hagetmau que des environs, ont tués Labat, son fils et sa femme, et ont volé la maison dudit Labat. Je bous dis encore que lesdits gabaleurs ont mis à feu deux ou trois maisons, au bout du bourg de Haget, et ont fait brûler grande quantité de meubles, et entr'autres choses, huit ou neuf cents barriques, qui estaient de la Mourelle, et font tous les jours de grandes bouleries et prisonnier et plusieurs morts, tellement qu'il y a un très grand désordre au pays de Chalosse, à cause des gabaleurs, et personne ne les contredit. Je me crains qu'ils sont favourisés des grands ! Oh la grande misère, je prie le bon Dieu qu'il lui plaise appaiser son courroux, car je crois que tous ces malheurs sont à cause de nos péchés. Pensons donc à faire pénitence, mais qu'il plaise à Dieu y mettre quelque bon remède. De plus, j'apprends que ces gens de guerre ne beulent pas être appelés gabaleurs, mais ils se disent cabaliers du roy ; et le second jour d'aoust, ledit Tournier a esté mis en liberté, à cause qu'il s'est trubé innocent, et il s'en est retiré au Mus parce qu'il estait marié avec Mademoiselle du Mus ; et ledit Lacouture marchait toujours avec eux, parce que lesdits gabaleurs le menèrent avec eux par les paroisses, pour faire information contre ceux qui sont accusés d'avoir levé les armes contre lesdits cabaliers, et en tiennent déjà quelques-uns. Le pays parle de traiter la paix avec eux, mais cependant les paroisses du sièges de Saint-Sever les nourrit, jusqu'à ce qu'il y aye un accommodement, de sorte que l'on leur pourte tous les jours à Haget, pour leur entretien, tant biande que fourrage, pour 25 escus, chacun jour, et Doazit et Montaut ont commencé le dimanche 3 aoust 1664, et les autres paroisses continuent ; une partie de ces cabaliers se nomment dragons, mais ils sont hommes comme les autres ; et le 6 aoust 1664, M. l'intendant est arribé à Saint-Seber et a mené grandes troupes de cabaliers, et est arribé à Haget le 7 dudit aoust ; ils tiennent quelques prisonniers audit Haget et les menacent de les faire pendre. Ledit intendant ...

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... a mené deux conseillers avec lui pour condamner les criminels, et a mené deux bourreaux. Ledit intendant se nomme M. Pellot ; ils font tous les jours des prisonniers et de grandes bouleries, même le matin du 9 aoust 1664, un nombre de cabaliers sont allés au bourg de Doazit, et ont prins deux hommes, savoir, lou Per Baylet et un sien frère, et tant d'autres maux, et personne n'ose demeurer en sa maison, et aussi chacun cache ses meubles tant qu'ils pubent, ils sont audit Haget et au château de Dumes.

Le 20 dudit aoust 1664, comme aussi une partie desdits cabaliers et dragons s'en sont allés, mais il en est demeuré à Haget environ trente ou quarante, et font toujours quelque désourdre. Je me crains encore qu'ils veuillent pouser le bureau de la gabelle, qui sera une grande charge pour le paubre puble.

Et advenant le mercredi, 27 dudit aoust 1664, et jour qui devait estre marché dudit Haget, selon la coustume, audit Haget avait encore douze, tant dragons que gabaleurs. Mais comme j'ai apprends qu'ils ne veulent pas être gabaleurs en aucune façon, parce que cela les échoque en quelque façon, mais ils se disent et nomment gens du comboi du roy, et pour ce je ne les nommerai plus que gens du comboi du roy.

Ce dit jour, 27 dudit aoust 1664, audit Haget un fort petit marché, car il n'y avait qu'un fort petit troupeau de pourceaux et aussi un petit troupeau de bétail, car tout le monde a peur à ces gens du comboi ; il est brai que pour lors ils ne faisaient aucun mal à personne, sauf qu'ils cherchaient encore ceux qui étaient criminels. Mais grâces à Dieu, ledit M. Decès juge de Doazit, comme baillant et habile homme a si bien et baillamment exploité et trabaillé qu'il ne s'y est point trubé en Doazit aucun criminel, mais ils ont fait de grands désordres audit Haget, et ce auparavant que M. l'Intendant ne fut arribé, de sorte que l'on dit que ledit Hagetmau ne saurai estre réparé tant la perte des meubles et bruslement des maisons de soixante ans ni jamais. Et estant en septembre 1664, la barrique de bin se bendait 30 liv., mesure de froment 30 s., mesure de blé 23 s. ; l'on espère cette année grande bendange.

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Je entends encore que les gens du comboi font toujours quelque désordre et cherchent les criminels tellement qu'on n'est pas en repos.

Je bous assure que du temps de ces désordres moi-même, sans être criminel en aucune façon, ni coupable, ni comprins en aucun de ces désordres, mais encore j'abais une grande peur parce qu'ils tuèrent du commencement tous ceux qu'ils pubaient attrapper ; de sorte que durant quinze jours je n'osais pas demeurer chez nous à Péboué, mais je lougais dans les cabanes des vignes et dans de paubres maisonnettes, et la plupart du temps je demeurais du cousté de Saint-Cricq et Marquebielle, car en ce lieu tout le monde m'honorait comme si j'eusse été leur supérieur, et pour lors ma neboude Anne estait à la Masquère et à Bergouey avec toute sa famille et avaient pour lors remué tous les meubles et grains et linges et vins et bétails.

Et advenant le 10 de septembre dudit an 1664, jour de marché à Hagetmau, le marché fut fort petit à Haget ; mais les gens du comboi et dragons allèrent au château de Dumes et commencèrent à desmoulir ledit château ; mais ayant commencé, ils firent quelque accommodement et y firent domage pour 200 ou 300 liv. ; comme aussi ils boulurent desmoulir la maison de M. Lartigue de Sainte-Colombe. Mais par le moyen de M. Dulau, ils firent accommodement avec de l'argent, et de plus ce dit jour de septembre 1664 ils firent pendre en effigie les susdits criminels, jusqu'au nombre de trente ou davantage au lieu de Hagetmau. Les gens du comboi sont encore quinze ou seize audit Haget, et la nuit du 14 septembre 1664, il allèrent à Mourgans et firent un prisonnier de ceux qui avaient été pendus et roués en efugie ; c'estait un nommé Laborde surnommé Balay de Haget, ils le menèrent à Mont-de-Marsan.

Je bous beux dire de plus que ce mois de septembre 1664, M. Lacourt, curé de Coudure et son bicaire sont estès tués de nuit au lieu de Coudure en deux diverses nuits, et ce par des gens incognus.

Et despuis avoir écrit, l'on m'a dit que ledit bicaire n'a pas esté tué mais oui bien ledit curé.

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On m'a dit aussi que le premier dudit octobre dudit 1664, deux des gens du convoi ont esté tués à Aubagnan aussi par des gens inconnus. Comme aussi la troisième nuit dudit octobre 1664, M. de Fescaux, noutaire royal de Larbey, a esté boulé, tant ses papiers que argent par des gens inconnus.

Or, parlons de la bandange de l'an 1664. Ceste bandange fort grande généralement partout Chalosse, il n'y eut un tiers de bin plus qu'on ne croyait. Cette bandage dura un mois ou dabantage, mais à peine trubait-on en quoi mettre le bin ; on en a mis grande quantité dans les tonneaux ou barriques de raspeöu ; je me crains qu'il en aye de mal accoumoudé.

Le bois de barrique se bendait 5 liv. tout couramment ; mais en ce pays de Chalosse il y a fort peu de millet, mais y a partout le pays grande abondance de glandage et en la lande il y a grande quantité de millet et autre grain comme est blé et panis, grâces à Dieu.

Nous abons dit ci-dessus que M. de Lacouture et deux hommes du bourg de Doazit ont été pris par ces gens du comboi, mais les ayant troubés du tout non coupables ont été mis en liberté.

Et advenant, ledit Laborde Balay a esté roué à Hagetmau le 14 d'octobre 1664.

Et en ce temps la maison de Bégué de Castel-Sarrazin a esté boulée entièrement par des gens incognus, et y celui Bégué est un de ceux dudit comboi, et de tous ces désordres à Haget n'a point eu marché ; mais ceux de Momuy ont commencé au 21 mois d'aoust 1664 à tenir un marché au lieu de Momuy, et ce le jeudi de quinze en quinze où il y assez un bon marché, comme des boeufs et baches, pourceaux, draps, grains et autres marchandises.

Je entends que les gens du comboi allèrent le 17 d'octobre 1664 à Toulouzette et tuèrent grande quantité de bétail de ceux qui portaient du sel et versèrent le sel. Et le 21 dudit octobre allèrent à Momuy bouler en trois maisons, et le lendemain ils allèrent bouler dans la maison de Joannin les poules.

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M. de Sanguinet, curé de Caupenne et fils de M. le baron de Doazit, a fait faire à Cames un moulin, et il a commencé à faire travailler au camieu dudit moulin le 5 mai 1664, et les bastiments et maison dudit moulin a esté levé et basti et massonné au mois d'octobre dudit an 1664.

Mais par malheur le 19 décembre commençant à moudre, tout l'empied dudit moulin tomba et roumpit l'arroudet, et le bastiment dudit moulin chancela un peu, mais l'on y fit incontinent un empied de bois, et retourna commencer de moudre le dernier dudit décembre 1664. Je le bis moudre tout de bon et faire bonne farine pourbu qu'il aye bon grain. On tient qu'il sera un bon moulin. Et advenant le 28 octobre 1664, les gens du comboi qui sont à Hagetmau s'en allèrent à la messe à Saint-Guirons ; mais à leur retour ils trubèrent, entre Haget et Saint-Girons, une compagnie ou escadron de gens inconnus, de sorte qu'ils attaquèrent auxdits gens dudit comboi et tuèrent le commandant Boisier et un autre homme, de sorte que ceux deux hommes du comboi demeurèrent mourts sur la place et les incognus empourtèrent leurs habits et de plus allèrent au bourg de Haget prendre huit chebals de ceux du comboi et s'en allèrent je ne say en quelle part.

Et alors mesure de froment valait, à Mugron, 31 s., mesure de blé 21 s., mesure de millet 16 s., mais personne n'achetait point encore du vin.

De l'arrasin (du larcin) de Labourdette. - Je vous dirai de plus que la nuit du samedi du 8 octobre 1664, moi-même estant couché dans moun lit en la chambre de Labourdette, je entendis quelque petit bruit dans ladite maison, et croyant que ce fut le chat et me croyant qu'il ne fit quelque désourdre, je me lève et ayant trubé que mes armoires estaient fermées et croyant que ce ne fut rien, je m'en retourne couché et m'enferme dans la chambre ; et cependant que j'ai esté sourti, un larron avait rompu une parois et entré dans la maison et même dans ma chambre ; et moi croyant qu'il n'y eut personne que moi, me mis dans le lit et demeurai longtemps sans dourmir. Mais cependant le larron m'a prins deux demi-louis ...

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... dans mon pouchet, et oubrant la porte pour s'en bouloir sourtir, je l'entendis et me lève bitement tout en chemise et attrappe ledit larron et le fis prisonnier corps à corps, et appelai au secours à mon frère Ramond et à ceux de Peboué et de Peyran et de Coudicanne et Coudassot, et tous y biendairent sur l'hure embiron la minuit pour boir le larron, lequel déclara, sans aucune contrainte, ce qui s'ensuit : Pierre Dupouy a confessé avoir desrobé de nuist à Henry de Laborde dans sa chambre de Labourdette, en premier lieu 26 louis lorsqu'il demeurait Baylet en la maison de Péboué qui estait enbiron les fêtes de Noël de l'an 1663, plus environ un mois aussi de nuit en rompant une parois, lui a prins 42 liv. argent, une paire de souliers tout neufs et un bonnet aussi tout neuf qui balait 50 s., plus une pièce de drap de l'atrama qu'il porta à un homme nommé Jean-chinon, métadier de M. Darricau, plus a prins quatre rabats et 4 sous de clous de sabots, plus 7 sous de clabets et sept muscades et un pain noir un peu commencé et 2 sous de pain blanc et une cuisse d'oie cuite et bu du bin tant qu'il en boulut ; de plus, ladite nuit au 8me novembre 1664, il confesse avoir rompu la même paroi et entrant dans la maison de Labourdette et dans la chambre de Henry de Laborde, aurait pris deux demi-louis, dans le pouchet dudit Laborde et le pain et un couteau qu'il a trubé dans l'armoire et boulant sourtir de ladite chambre et oubrant la porte, ledit Laborde a entendu et s'est lebé tout en chemise, la print prisonnier, et de plus dit que quand il avait desrobé les vingt-six louis, il demeurait dans la maison de Péboué, et que ledit larron fit cela par l'indication de Jean d'Angoumeau lors baylet de la maison de Péboué, et que ledit Angoumeau estait allé plusieurs fois prendre les choses et clefs dudit Henry de Laborde pour lors couché dans la maison de Péboué, et allèrent tous deux chercher plusieurs fois dans la maison de Labourdette pour desrober l'argent dudit Laborde ; et quelques, nuits après, ledit Dupouy y alla tout seul et truba et emporta ledit argent et le communiqua audit Angoumeau, et lui donna deux louis parce qu'il était complice avec lui, et dit qu'il a ...

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... demeuré dans le grenier de la paille de Labourdette depuis jeudi soir, et que l'autre coup y avait demeuré deux jours et deux nuits, et dit qu'il estait parti le jeudi de Cazalis. Présents à ce : M. de Bic de Coudicane et Jean de Laborde son baylet, et Pierre et Benjamin de Laborde de Peyran, et François d'Angoumeau demeurant à Péboué, et Ramond de Tounartigue dit de Camezat, Jean de Dezès de Coudaçot, et après l'aboir mené au château de Doazit en prison.

Et advenant le 13 novembre 1664, ledit larron s'est échappé et a droumi deux nuits, est benu à Labourdette rompre la même paroi, mais il n'a point pu entrer à cause que j'avais attaché des lattes par dedans, et s'en est allé je ne sais en quelle part.

Je puis bien dire comme disait le roi Charlemagne quand il avait prins Maugis et s'échappa, lors le roy lui dit : ha ! larron Maugis, je n'ai guerre gagné à t'attraper, car il empourtait la couronne du roy et les épées des douze pairs de France. J'en puis dire de même de mon larron : il m'est échappé, je n'y ai rien gagné, j'y ai eu des frais et despenses ; je prie Dieu qu'il soit homme de bien.

Le trois décembre 1664, Soubagné de Joannin de Segarret a esté prins prisonnier par les gens du comboi et mené au Mont-de-Marsan ; mais dans peu de jours il a esté mis en liberté.

Le 8 décembre 1664, les gens incognus et invisibles sont allés de nuit au-dessus de la bille d'Ayre et ont tué un lieutenant des gens du comboi nommé Casanche et ont bruslé et pillé la maison.

Les gens du comboi demeurent encore à Hagetmau, et logent au château dudit Haget et sont encore 15 ou 16 qui font toujours quelque désordre ; car le 26 décembre 1664, ils sont allés prendre d'autorité du foin et du grain à Horsarieu et tant d'autres désordres qu'il y a toujours, car à Coudures à une compagnie de dragons qui bibent aux dépens du pays et même les paroisses du siège de Saint-Sever contribuent, et entr'autres à Doazit pour leur cote part sont coutisés d'y pourter chaque jour un quintal de foin, et de plus nous sommes menacés de gens de guerre ; certes, ...

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... le pays de Chalosse est fort paubre. Il est bray qu'il y a eu cette bendange passée grande quantité de bin, mais personne n'en achette encore une pièce ; c'est cause que le paubre pâtit grandement ; il est bray le grain est encore à bon compte, car la mesure froment est à 30 s., mesure blé à 21 s., mesure millet est à 17 s., mais personne n'a point d'argent pour en acheter, ce qui est cause que plusieurs personnes sont nécessiteux et passent déjà famine, tellement qu'il y a grande misère sur le pays. Je vous dirai au plus que durant tout le mois de décembre 1664, il y a une estelle au ciel du cousté du midi, laquelle mounstre grands signes, car elle a devant elle une longue lance qui est fort luisante, tellement que l'on se craint de quelques grands désordres ; cette estelle se lève environ la minuit et ne va fort haut Et advenant et estant au commencement de l'année 1665 ladite estoile n'a plus paru, mais il a paru une autre estoile qui se lève le soir ; elle ba beaucoup plus que l'autre et quelques-uns l'appellent la comète. Ceste estoile a aussi une longue lance qu'elle mêne au derrière d'elle ; je me crains de quelque grand désordre.

Pour lors je entends que les gens du comboi qui sont à Hagetmau font plusieurs désordres, car ils sont allés à Horsarrieu et à Segarret et à Momuy de leur autorité et ont prins du fourrage et ce qui bon leur a semblé, et de plus les dragons qui sont à Coudures y demeurent encore, et, les paroisses leur portent probision, et à Doazit y portent chacun jour un quintal de foin ; comme aussi à Saut de Nabailles, à aussi une autre compagnie de dragons qui font aussi de grands désordres Alors on parle de faire eaux de bie à Aulez, mais on n'en beut donner que 10 liv. la barrique Et le 17 janbier 1665 à Montaut, il est arribé une compagnie de cabaliers ou gens de guerre et y sont jusqu'à noubeau ordre.

Et de plus les gens du comboi font de grands désordres, car ils allèrent à Saint-Cricq le 20 de janvier 1665 et pensèrent faire prisonniers Labat et autres criminels de Saint-Cricq, mais ils ne les trubèrent point et y firent plusieurs rabages dans les maisons desdits criminels, et en outre ...

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... nous sommes menacés des gens de guerre. Oh! la grande misère du paubre puble, car il n'y a point d'argent ni grain ; il est bray qu'il y a grande quantité de bin, mais personne n'en achète aucune pièce sinon pour faire de l'eau-de-bie et n'en donnent que 10 liv. rendu à Aulèz, et encore n'en peut-on bendre à ce prix que rarement.

Alors mesure de froment se bendait, au marché de Mugron, 32 s., mesure de blé à 22 s., mesure de millet à 18 s.

Le 4 fébrier 1665, il y a eu un tremblement de terre partout Chalosse durant un petit espace de temps, ce fut embiron le point du jour.

J'entends aussi que les gens du comboi font toujours quelque désordre, car ils bont chercher du fourrage où bon leur semble.

Alors la barrique de bin baut 10 liv. rendu à Aulez, mesure froment 32 s., mesure blé 22 s., mesure millet 18 s.

Les gens du convoi font toujours des courses et font des prisonniers tant à Hagetmau qu'aux paroisses aux environs et mènent tout à Mont-de-Marsan et en tiennent déjà, à ce qu'on m'a dit, plus de soixante prisonniers et en est mort quelques-uns en la prison, de sorte qu'il y a de grands désordres en toute Chalosse.

A Saut de Navailles a demeuré une compagnie de dragons l'espace de deux mois, de sorte que ledit Saut est tout ruiné.

Et à Coudures a aussi une autre compagnie de dragons qui ont aussi demeuré audit Coutures plus de dix mois et sont entretenus aux dépens des paroisses, et à Doazit y ont de leur côte-part chacun jour un quintal de foin, et de plus à Dax et à Saint-Sever a des compagnies de cabaliers de gens de guerre, et encore à Montaut et une autre compagnie de cabalerie qui ont ruiné tout Montaut.

Et le 17 février 1665, jour de mardi-gras, les gens du comboi allèrent à Doazit et firent prisonnier Man le métayer et le menèrent à Mont-de-Marsan. Et encore ce qui me fâche de plus, ce que le soir du 22 de février 1665, les gens du comboi est prins prisonnier le fils de Jean, de Bic, noustre nebeu qui est un enfant de quatorze ou quinze ans ...

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... et le tiennent à Hagetmau sans qu'il aye jamais fait aucun mal, et en tiennent aussi d'autres qui ne sont pas criminels.

Le 1er mars 1665, on m'a assuré que M. l'intendant est arrivé au Mont-de-Marsan pour juger lesdits prisonniers et qu'il doit benir, bientôt à Saint-Sever et à Hagetmau, et M. de Saint-Luc bient aussi. O la grande misère ! car personne ne ose demeurer en sa maison, et de plus nous sommes à la faim, car il n'y a point d'argent ni de grain ; il est brai qu'il y a bin, mais on n'en peut aboir que 10 livres rendu à Aulez pour brûler, et encore les marchands n'ont pas encore que fort peu d'argent.

Alors la mesure de froment balait à Mugron 36 s., mesure de blé 24 s., mesure de millet 18 s.

Le 26 février 1665, une compagnie de gens de guerre à pied sont lougés à Caupenne et à Bergoey, et le matin après s'en sont allés à Saint-Sever.

Et moi-même, voyant tous ces désordres et me craignant d'être prins prisonnier sans avoir fait aucun mal, et entendant les mauvais traitements qu'on fait aux prisonniers, moi, comme estant vieux, âgé de soixante trois ans et tout incommodé, et jugeant que si j'étais prins je serais ou fatigué, on mal couché ou mal nourri.

Alors je m'en suis allé en Béarn, devers M. mon frère, le prestre et le curé de Lanneplan, et suis arrivé au lougis dudit M. mon frère le dimanche second dimanche de Carème et premiers jour de mars 1665.

Et estant eu Béarn, j'entendis dire que M. de Saint-Luc et M. l'Intendant estait à Lourdes avec leurs troupes, et là estant ceux de Lourdes se mirent en armes et ne boulaient pas être obéissans audit M. de Saint-Luc et M. l'Intendant et ils demeurèrent là environ vingt jours, et ils s'accordèrent avec ceux de Lourdes, et ceux de Lourdes furent pardonnés, mais cela fut par l'entremise du comte de Toulongeon qui les accorda ; et après cela M. de Saint-Luc s'en alla du cousté de Dax et de Bayonne, et M. l'Intendant s'en est allé à Pau et y a demeuré huit jours pour régler ceux de la religion prétendue réfourmée à ce qu'on m'a dit ; et après, cela, M. de Saint-Luc s'en est allé du cousté de Bourdeaux, ...

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... et M. l'intendant s'en est allé à Saint-Sever et y a demeuré un mois ou davantage, et durant ce temps ledit M. l'Intendant en a condamné à mourt plusieurs et sont estés pendus à Saint-Sever, et d'autres roués, et d'autres condamnés aux galères, et d'autres sont estés élargis ; mais entr'autres un nommé M. Bourit a esté pendu, c'estait le prévost de la ville de Saint-Sever ; puis M. l'intendant s'en est allé à Agen, et les troupes des gens de guerre sont demeurées à Saint-Sever en Chalosse et y ont fait de grandes dépenses.

Et estant au commencement de juillet 1665, les gens de guerre et gens incognus ont fait rencontre entr'eux à Ste-Colombe et à Cerres de dessus, et se sont battus et en y est mourt de chaque cousté cinq ou six et plusieurs de blessés. Pour lors il y avait garnison à Saint-Sever et à Momuy et Cazalis et à Brassempouy et à Bonnut et à Lahosse et en d'autres paroisses du siége, en sorte que le paubre puble ne peut plus résister à si grandes dépenses, et si passe déjà grande faim en Chalosse et n'y a point argent, ni grain ; il y a du bin, on le bend à 7 liv. et le bois rendu, et ce pour le faire brûler. Alors mesure de froment baut à Mugron 45 s., mesure de blé 25 s., mesure de millet 21 s. Le quintal de foin partout Chalosse se bend 40 s., la mesure aboine 20 s., et les paroisses qui n'ont pas de logement sont aydés des autres, de sorte que tout le monde est réduit à la grande misère. Je prie Dieu qu'il lui plaise y donner sa sainte bénédiction.

Je vous peux bien dire que pour lors, ceux de Doazit n'estaient pas encore bien à leur aise, d'autant que ci-devant ils avaient estés accusés d'avoir esté à Hagetmau du temps de la mort de Labat, et d'une attaque que les invisibles avaient donné aux gens du comboi dans une maison du bourg de Hagetmau et entr'autres au temps des rogations en l'an 1664.

Il se truba un homme de Doazit un matin tout mourt sur la lande, entre Doazit et Haget, à Lannehoussat. L'homme se nommait lou Bourdet, sergent ordinaire dudit Doazit, et pour ces grands désordres la jeunesse de Doazit n'est pas bien en repos. Je ne puis pas savoir qui estaient ces gens ...

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... invisibles, mais les gens de guerre et les gens du comboi disaient que les gens imbisibles estaient un nommé Audigeos fils de la maison de Hareou de Coudures(*) qui estait un capdet, lequel je n'ai ni bu ni connu ; c'était un homme fort adret, je bous assure qu'il lui a bien serbi, car premièrement, il a esté cherché par tous les endroits depuis Saint Sever jusqu'aux montagnes. Défendu de par le roy par toutes les billes de ne lui aboir à bailler ni pain, ni bin, ni logement, ni munition.

Je ne sabais pas ce que cela boulait dire. Je croyais que c'estait quelques dragons soubages ou infernals ; mais estant benus louger chez nous à Peboué, j'ai bu que c'étaient hommes comme les autres, et les ay fait boire de mon bin dans ma maison de Labourdette.

Et ledit 20 dudit juillet à Doazit a lougé une compagnie des gens de guerre à pied, et le lendemain s'en sont allés et ont lougé une nuit à Poyalé.

Le 27 de juillet 1665, à Doazit est arribé une compagnie de dragons bien montés, et nous en avons deux à Peboué, et alors j'entends que partout casi le siège de Saint-Sever avait gens de guerre et fesaient de grandes dépenses, et la monde estait fort paubre en ce pays de Chalosse.

O la grande misère de ce paubre pays de Chalosse ! ...

(*) Antonin de Laborde Peboué, petit neveu de Henri, épousa en 1711 Marguerite de Lassalle de Bordes, fille de M. le baron d'Ossages et de Jeanne Dubourdieu. Cette Jeanne de Dubourdieu avait épousé en premières noces feu M. d'Audigeos dont elle n'eut point d'enfants. D'Audigeos fut très renommé dans le royaume et principalement dans cette province à cause de sa révolte contre le roi qui voulait introduire de nouvelles impositions sous le nom de gabelle, ce à quoi M. d'Audigeos s'opposa, tuant avec sa troupe et les receveurs et ceux qui les protégeaient ; puis il passa en Espagne avec les siens, mais il en fut rappelé, fit un traité de paix avec le roi comme un autre souverain, en reçut un régiment qu'on envoya à Messine où il mourut. - (Généalogie de Peboué.)

Jean-François de Bourrousse, officier de dragons, né en 1655 lorsque son régiment dont M. d'Audigeos était colonel, voulut tourner ses armes contre Louis XIV et s'embarqua pour l'Espagne. Jean-François de Bourrousse de Laffore fut du petit nombre de ceux qui ne suivirent pas cet entraînement. - (Nobiliaire de Guienne, t. II.)

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... Hélas ! il n'y a cette année que fort peu de froment à cause d'une grande sécheresse, car il n'y a point plu depuis le mois de février. La barrique de bin se bend à présent 10 liv., mesure de froment 32 s., mesure de blé 21 s., mesure aboine 31 s., le quintal de foin 40 s., le bin ne se bend que 10 liv. pour le faire brûler.

Un homme nommé Jean Duplanté surnommé Lébraut, boucher, du bourg de Doazit, estait celui qui achetait le bin pour les marchands de l'eau-de-bie, mais tout cet argent s'en allait pour les gens de guerre, car il fallait porter tous les matins à Doazit la somme de 90 liv., et ce dura tout autant que les gens de guerre y demeurèrent Et un homme nommé M. de Montauzé estait celui qui prenait l'argent de tous les habitants de Doazit, et chacun matin le distribuait aux gens de guerre. Je bous assure qu'il y abait bien de la peine à faire le compte, car il prenait, chacun matin argent de quatre cent maisons, et le distribuait par bon ordre tout aux dragons.

Cette année 1665, les gens de guerre empourtèrent à Doazit, tant en dépenses qu'en argent, plus de 10,000 liv. Et si les habitants manquaient de pourter chacun matin leurs coutises, les dragons allaient par les billages et empourtaient tout ce qu'ils trubaient de bon dans les maisons, car ils lougoient tous dans le bourg, et durant ce temps ils faisaient toute semaine quelque course pour prendre Audigeos et quelques autres criminels, et le 2 de septembre 1665 à Hagetmau en a esté trois de criminels de pendus, et deux de roués, et un autre a esté estranglé, lequel estait mourt près de quinze jours auparavant et se nommait Pilate.

Et environ le demi septembre, les dragons ont fait une course jusqu'aux montagnes pour chercher Audigeos et autres criminels(*), et après avoir fait cette grande justice ...

(*) Du mois de may 1665, lettre du roy Louis-le-Grand pour M. le vicomte de Poudenx, dans laquelle est l'ordre d'arrêter Audigeos.
A Monsieur le vicomte de Poudenx (suscription en marge), du 31 mars 1665. Ordre du Roy au vicomte Bernard de Poudenx de s'assurer pour Sa Majesté du nommé Audijos et de ses complices rebelles.
Monsieur le vicomte de Poudenx, désirant m'assurer de la personne du nommé Audijeos et de ses complices accusés du soulèvement excité dans le pays de Chalosse, et de s'estre opposés à l'establissement des bureaux de mes fermes dans ledit pays et lieux voisins. Or, sçachant que luy et ses complices pour la plus part sont présentement en mon pays de Béarn et que personne ne peut s'employer avec plus de succès que vous à l'arrêt de leurs personnes, par le pouvoir et le crédit que vous avez parmy la noblesse et dans le pays, que pour l'affection que vous avez pour mon service et aux choses qui regardent le maintien de mon autorité, je vous adresse un ordre que i'ay faict expédier pour arrester ledit Audijos et ses complices on quelque part qu'ils se trouvent, et j'ay bien voulu l'accompagner de ceste lettre pour vous dire que mon intention est que vous ayez à jetter les yeux sur un prevost des maréchaux ou à un officier de robe courte que vous cognoistrez fidèlle, et le plus capable de bien exécuter ledict ordre, que vous remplissiez son nom dans le blanc que j'y ay faict laisser, et que vos amis l'appuyent pour ceste fin, en sorte qu'il n'y rencontre aucune difficulté, vous recommandant de me donner compte de ce que vous aurez faict en exécution de ce qui est en cela de ma volonté, et vous asseurant que vous ne sçauriez me rendre ung service ny me donner des marques de votre affection en chose que j'aye plus à coeur.
Sur ce, je prie Dieu qu'il vous aye, Monsieur le vicomte de Poudenx, en sa sainte garde.
Escrit à Saint-Germain-en-Laye, le XXXIe may 1665.
LOUIS.
Contre-signé plus bas (original) :
LE TELLIER.

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... à Hagetmau, M. l'Intendant s'en est allé à Dax. On dit que là il fait pouser le bureau de la Gabelle et a demeuré à Dax environ vingt jours, et jusques à la fin de septembre et s'en est tourné à Saint-Seber et y a demeuré quelques jours ; s'en est allé vers le cousté de Montauban, mais les. gens de guerre sont demeurés en Chalosse et font de grande dépenses.

La bendange de l'an 1665 feut assez grande, encore plus que celle de l'année passée. Le bois de barrique ballait 4 liv., mais il y eut fort peu de millet, de sorte que au 15 d'octobre 1665, mesure de froment ballait 36 s., mesure de blé 26 s., mesure millet 26 s., le quintal de foin 3 liv., mesure aboine 30 s., de sorte que le monde estait alors si ...

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... paubre qu'il n'y abait pas de froment pour ensemencer la terre.

Oh ! la grande paubreté partout la Chalosse !

Et advenant le 21 octobre 1665, les cabaliers dragons s'en sont allés, mais par malheur au bout de dix jours qui est le 1er novembre 1665, une autre compagnie de dragons sont arribés à Doazit pour y demeurer jusqu'à noubeau ordre. Je puis bous assurer que Doazit ne peut plus résister à une si grande dépense, et ne se bend point de bin en aucun prix et n'y a point de grain ; le paubre monde est déjà à la faim.

Et advenant le 3 de septembre 1665, les dragons de Doazit s'en sont allés, grâces à Dieu. Mais ça esté après avoir fait une grande despense, tant à Doazit qu'en d'autres paroisses ; car en même jour tous les gens de guerre sont tous sourtis à tout Chalosse. Durant le temps que les dragons sont demeurés à Doazit, ledit Montauzé leur baillait tous les matins à chacun 15 sous, mais sur la fin ils sont estés réglés à 11 sous, et le fourrage venait d'autre cousté, sinon que au commencement qu'à Doazit fournit le tout.

Durant ce temps, les dragons fesaient tous les jours des courses pour prendre Audigeos et autres criminels, et tous les prisonniers qu'ils attrapaient menaient à Mont-de-Marsan, mais il fallait aussi bien payer les jours absents comme les présents.

Je bous assure que ledit Montauzé avait grande peine à leur faire le compte, et si le puble manquait à leur pourter la coutise, eux-mêmes y allaient et leur faisait bien payer le vouyage ; ils désiraient de prendre toujours ledit Audigeos, car il leur était le plus contraire, et qui s'opposait à l'establissement de la gabelle, mais il leur feut impossible de le prendre. On dit qu'il est passé en Espagne.(*)

(*) D'Audijeos ne fut jamais pris. Pendant plusieurs années il lutta avec son escadron invisible contre quatre régiments de dragons, détruisant les troupes qui lui étaient opposées, allant braver le convoi jusques dans la ville de St-Sever, monté sur un cheval ferré devant derrière, enfin il fallut traiter avec ce terrible adversaire (On lit en effet dans la préface des sermons de monseigneur de Fromentières, que d'Audijeos, ramené par cet évêque d'Aire, fit une retraite au séminaire de son diocèse et que le roy lui rendit ses places et un régiment). La tradition ajoute que Audigeos nommé colonel fut présenté au roi dans une galerie du Louvre, et quelques années après, une armée française ayant fait une expédition à Messine, ordre fut donné au maréchal de France qui commandait d'exposer Audigeos à l'attaque la plus périlleuse, où ce fameux personnage trouva la mort (1674) La famille d'Audijeos s'est perpétuée jusqu'à nos jours, sous le nom de Bourdeau d'Audijeos de Castera (Voir l'Armorial de 1865).

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Je vous dis aussi que sur la fin de novembre 1665, les dragons sont allés du cousté d'Arzacq et ont prins un nommé M. Lugon et son frère, disant qu'ils étaient faux-monnoyeurs et les ont menés à Montauban, et le 17 de décembre 1665, depuis que les dragons sont estés partis de Chalosse, une brigade de gens masqués et incognus sont allés de nuit à Samadet et ont tué le boucher dudit Samadet, et s'en sont allés je ne sais en quelle part.

Au premier jour de l'année 1666, il est arribé un rabas d'argent, saboir : la pistole a rabaissé de 5 sous et les louis de 2 sous.

Le jour de la Purification de Noustre-Dame 1666, à Saint-Aubin, fesait de l'eau-de-vie avec six chaudières qui bruslaient sans cesse ; et advient ledit jour de la Purification, l'eau-de-bie debient fort maubaise et fort amère et ce dura trois jours, durant ces trois jours ils ne firent pas la besogne d'un jour seul, et ne fesaient rien qui ballut. Le maistre n'y estait point. Ah donc les baylets boyant le désordre, ils eurent recours à M. le curé de Saint-aubin, il y alla et là estant aux garçons savoir s'il y avait de la manque de leur coûté ; ils répondirent que non, mais qu'ils étaient bien assurés que la manque ne venait pas de leur défaut. Ah ! donc le curé y alla bénir la maison et le bin et puis fit une autre exorcisme comme si la maison estait poussédée du démon. Après tout cela il alla dire messe, et après tout cela l'eau-de-bie devient fort bonne et firent autant de besogne comme à la coustume, grâces à Dieu.

Et estant au premier de mars 1666, la barrique de bin ne ballait en Chalosse que 6 livres et le bois rendu, et ce pour faire de l'eau-de-bie, car pour lors il n'y abait point ...

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... autre bente de bin, mais je bous puis assurer que pour lors il y avait en Chalosse soixante chaudières pour brûler le bin pour faire d'eau-de-vie, et brûlait chacun jour cent barriques. Mais avec tout cela le monde estait réduit en grande paubreté, d'autant que les gens de guerre avaient mangé et empourté tout ce qu'ils abaient trubé. Mesure froment balait 40 s., mesure de blé 32 s., et mesure de millet 33 s. Tout le monde estait à la faim, et la plus grande partie du puble mendiait le pain, mais il n'en trubait que fort peu, et c'estait une grande misère que de boir tant de puble réduit à si grande misère ; et alors moi-même voyant une si grande paubreté sur le pays de Chalosse, et ne pouvant ni supporter, ni remédier à une si grande nécessité, pour lors je m'en suis allé demeurer en Béarn avec M. mon frère le curé de Lanneplan, et y ai demeuré depuis le 3 mars 1666 jusqu'au 16 de juin 1666 que je me suis retiré à mon petit lougis de Labourdette.

Je vous dirai aussi que en Béarn y a eu de grands désordres entr'autres choses le jour de Saint-Barnabé de l'an 1665. Il y arriba une sédition entre le public à cause, de la gabelle, de sorte qu'à Salies, aux Geous de Lanneplan et en plusieurs autres bielages, le menu puble se leva l'un contre l'autre, en accusant plusieurs personnes d'être du parti des gabeleurs, et entr'autres à Salies accusèrent un homme nommé..... et l'assiégèrent dans sa maison. Mais ne le trubant pas, prendirent tout ce qu'ils trubèrent dans ladite maison et la pillèrent tout entièrement. Ces nouvelles furent pourtées à M. l'Intendant qui estait en Chalosse, de sorte qu'il fit informer contre ceux qui avaient fait cette sédition, et pour faire la paix avec M. l'Intendant, fallut que le pays de Béarn donnât audit M. l'Intendant 50,000 liv. et encore ne furent-ils pas en repos, car les officiers du lieu de Béarn en ont décrété plusieurs et en ont tiré beaucoup d'argent du menu puble, de sorte que les actions dudit jour de Saint-Barnabé 1665 coustent dans le Béarn plus de 150,000 livres.

Toute cette année 1666 jusqu'à Saint-Jean, la disette estait grande partout Chalosse. Pour lors mesure de froment ...

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ballait 42 s., mesure de blé 32 s,. mesure de millet 34 s., le quintal du foin 40 s., la barrique de bin ne ballait que 6 liv. et le bois rendu, de sorte que tout le pays de Chalosse estait à la grande paubreté. La gabelle estait sur le sel et celui qui achetait une conque de sel à Dax il en payait de gabelle 55 s.

Pour lors les gens du comboi se tenaient une partie à Dax et une partie à Saut de Navailles, une autre partie à Habas, et la grande compagnie estait à Mont-de-Marsan et à Ayre. Il n'y avait autres gens de guerre sur le pays de Chalosse, mais il y avait d'autres désordres ; car le 27 avril mardi de Pâques 1666, les gens invisibles incognus allèrent de nuit à la maison de Lacourt de Coudures et la brûlèrent tout à fait, entr'autres choses trente barriques de bin, et le pain, chair et tout ce qu'ils y trubèrent et empourtèrent le tout, et je ne say en quelle part.

Et de plus, le 18 juin 1666, les gens incognus le nombre de plus de cent tant à pied qu'à cheval, allèrent de noeit au bourg de Hagetmau à la maison d'un marchand riche et roumpirent la porte à coup de destrauc et prindent tout ce qui estait dans la boutique qui ballait plus de mille escus et prindent tout les meubles et le linge et argent de ladite maison, de sorte on dit qu'ils ont prins dans ceste maison qui baut plus de 2,000 escus, et ont pris et amené ledit Larrieu tout en chemise et l'ont mené et empourté le tout je ne say en quelle part. On craint qu'il ne soit mourt après esté boulé et ruiné.

Et estant au 24 juin 1666, jour du Saint-Sacrement et de Saint-Jean tout en un même jour, le prévost de Bayonne est arrivé audit Hagetmau pour informer de ces désordres. On m'a dit qu'il avait à sa suite quatorze personnes, tout à pied et bonnet rouge.

Et de plus le 25 juillet 1666, les gens incognus allèrent de nuit en une maison de Castelnau en Tursan et boulèrent ladite maison et amenèrent le maistre et s'en allèrent je ne say en quelle part.

Et encore en ce même jour, les gens incognus ont mis le feu à une maison près d'Arzacq nommée au Chalabar, et ...

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... ladite maison est brûlée. Ah ! que je me crains que ce désordre nous causeront de plus grands désordres en ce pays de Chalosse.

Pour lors la barrique de bin ballait 9 liv., mesure de froment 28 s., mesure de blé 20 s., le quintal de foin 16 s.

C'était au temps que l'on commençait à faucher le froment, et on espère qu'il y aura ceste année assez bonne coueillude de froment, mais il ne fait guère beau temps pour l'assembler.

Et advenant ledit juillet 1666 à Saint-Sever est arribé grande quantité de gens de guerre tous à pied, et sont allés louger à Coudures ; on dit qu'ils biennent prendre Audigeos.

Et le 23 juillet à Brassempouy y est arribé deux compagnies de gens de guerre à pied pour y demeurer jusqu'à noubeau ordre, et au bout de huit jours l'une compagnie s'en est allée à Montgaillard et l'autre compagnie à Cazalis et à Marquebielle et y a demeuré dix-sept jours, puis s'en sont allés en Tursan. Et environ la mi-juillet 1666, M. de Poyanne est arribé à Saint-Sever avec un commissaire qui se nomme M. Dubourg et ils ont fait plusieurs prisonniers, les accusant d'être participants aux susdites bouleries et autres maubaises actions, et entr'autre le 10 d'août 1666 en a esté pendu un d'iceux nommé lou pourqué de Samadet.

Et le 17 dudit aoust 1666, M. de Poyanne et M. Dubourg ont fait prendre la mère d'Audigeos et une soeur dudit Audigeos et ont aussi prins des prestres savoir : M. le curé et M. le bicaire de Montgaillard et le curé de Bahus, et ont tout mené à Saint-Sever et aussi plusieurs autres prisonniers qui sont bien tous gardés audit Saint-Sever par des gens de guerre.

On dit que Audigeos est passé en Espagne et qu'il n'était pas à la boulerie de Larrieu de Hagetmau.

Et la présente année 1666, il y a grande quantité de froment, grâces à Dieu ; il se vend au marché de Mugron 24 s et pour lors il y a bonne apparence de millet et de bin. Le bin se vend à présent à 6 liv. la barrique et le bois rendu pour le faire brûler ; mais l'argent est aussi rare sur ce pays de Chalosse qu'il fut esté depuis longtemps, car il ...

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... n'en y a point du tout seulement pour acheter de l'huile.

La bendange de l'année 1666 s'est commencée enbiron vers la mi-septembre et a duré quinze jours au plus ; mais durant toute cette vendange, il fit de grandes pluyes, de sorte que à peine pouvait-on vendanger ni moins assembler le millet, car les raisins estaient touts pourris par les bignes et le millet gasté sur les champs. Il y eut encore assez de bin, mais personne ne parlait point d'en acheter d'autant qu'il y a deux années ou plus qu'il y a une grande guerre sur la mer entre la France et l'Angleterre, et cette guerre a esté cause que le bin ne s'est pas bendu à cause du passage, d'autant que la plus grande partie du bin en Chalosse s'en ba par mer en Flandre et ailleurs .Alors la barrique de bin bieux se bendait à 10 liv., la mesure de froment à 25 s., et ceste année 1666 il y eut encore assez de millet quoique un peu gâté. Il fit encore assez beau temps sur la fin de septembre et octobre pour assembler et espiquer ledit millet, et aussi ensemencer le froment, et au 20 octobre 1666 mesure de froment valait à Mugron 23 s., mesure de blé 18 s., mesure aboine 16 s. à cause des gens de guerre, et mesure millet à 11 s.

Je bous dirai de plus que le 15 de septembre à Doazit une grande compagnie de cabalerie de gens de guerre où il y a 60 chevals et environ 70 hommes, qui font grande despense à Doazit et ce jusqu'à noubeau ordre. Nous nourrissons le lieutenant au bourg, au logis de M. de Montauzé ou Sartou, et avons pour aider Peyran, Coudicanne et Lescamps. Il y a trois chevals et trois hommes, mais il est vrai que Castelnau et Donzacq sont aydés de Doazit et font de grandes despenses.

Et le 20 septembre 1666, un homme des prisons de St-Seber, a esté roué au lieu nommé à La Loubère de Saint-Seber, et le même jour le baylet de M. de Justes de Mariotte de Doazit allait avec une paire de bœufs et la charrette, charger du blé audit Saint-Sever, faisant pour son maistre, on le contraint étant arribé audit Saint-Sever, de traîner ledit criminel sur sa charrette jusqu'au supplice, et en outre l'on le fit attendre jusques au lendemain pour le ...

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... pourter à Hagetmau auquel lieu il a esté mis sur une roue sur un champ ensemencé de millet qui estait de M. Lagrueller ; c'était tout auprès de l'auspital de Haget. Ledit criminel avait le nom Ballet fils de Vielle, et a demeuré sur la roue deux jours et puis a esté enterré de nuit dans ledit champ de millet, et ledit boubier qui avait pourté ledit Ballet s'en retourna de Haget à Saint-Seber pour charger ledit blé.

Et le 4 octobre 1666, M. de Poudenx a pris un homme prisonnier et la mené à Saint-Cricq, auquel lieu de Saint-Cricq 13 carabiniers de ceux qui estaient à Doazit l'ont allé prendre et l'ont mené le même jour à Saint-Seber, et sont passés debant notre maison de Peboué avec le prisonnier, mais ils ne nous ont rien touché.

On m'a dit aussi que les prestres qui estaient prisonniers dudit Saint-Seber sont estés mis en liberté, et aussi la mère et soeur dudit Audigeos ont été mis en liberté, mais huit hommes de ceux qui estaient prisonniers sont estés condamnés aux galères.

Mais de ces huit, les six se sont échappés de la prison et s'en sont allés je ne say en quelle part. Ce esté fait le 1er octobre 1666, et de nuit et ont battu la geolière.

Et le 5 dudit octobre 1666, M. le capitaine des gens de guerre qui se nomme M. Lavaissière, s'en est benu louger à nouste maison de Péboué, qui estaient 7 hommes et 9 chevals et 3 lévriers et 2 chiens ; et le 11 dudit octobre 1666, M. ledit capitaine s'en est allé à Bordeaux, ( je prie Dieu qu'il le conduise ) avec un sien homme, et tout le reste hommes, chabals et chiens est demeuré à Péboué, lesquels nous font une grande despense.

Et en ce temps les louis sont retournés à trois liv. chacun, et la pistole à 11 liv.

Et le 19 d'octobre 1666, M. de Pondenx s'en venant du cousté du Béarn avec son

homme de chambre et estant auprès de Garos sur la frontière de Béarn, il fit rencontre d'un homme incognu et armé. Je ne say qu'elle dispute ils eurent entr'eux, de sorte que l'homme de M. de Poudenx et l'homme incognu sont demeurés tous deux mourt sur la place.

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Et le 25 d'octobre, ledit M. Lavaissière s'en est parti pour Bayonne où il a demeuré huit jours, et il a fait l'achapt de 50 beufles pour les caballiers pour 2,400 liv.

Et le 7 novembre dudit an 1666 et du temps que M. de Lavaissière, capitaine de gens de guerre estait à nouste maison, noustre neboude Anne et maistresse de ladite maison s'est accouchée d'un enfant mâle, d'un heureux accouchement, grâces à Dieu ; et le lendemain a esté baptisé, et furent parrain et marraine Jean-Pierre et Jeanne de Laborde, frère et sur du petit né.

Et le 9 novembre 1666, M. ledit capitaine m'a fait l'honneur à moi d'entrer dans mon petit lougis de Labourdette et est allé jusqu'à la porte du jardin et y a fait collation en compagnie de M. de Ladou et m'a donné deux morceaux de buffle pour une paire de gants.

Et le 10 dudit noubembre 1666, M. Labezières m'a fait l'honneur de me faire souper avec lui à sa table, et me servait lui-même des viandes le premier.

Et le 12 dudit noubembre 1666 le dit M. Labezières a quitté noustre maison de Peboué avec tout son trein, et s'en est allé au bourg de Doazit, au lougis de M. Juste de Mariotte, là où il avait demeuré debant que bénir à Péboué, l'espace de vingt jours ; et nous lui abons fait pourter toutes ces hardes et les 50 just'aucorps de beufle avec deux paires de boeufs sur des charrettes. Lesdits just'aucorps ont été coupés par un homme nommé Pascal de Saint-Martin, maistre tailleur de Castelnau de Bas.

Je vous puis assurer que ledit M. Labezière est fort honnête homme ; il est de religion prétendue réformée, et est de noblesse, frère à M. de Raysaq seigneur d'Ebjabmont en Languedoc ; il a demeuré à Péboué trente-huit jours.

Nous avons fort parlé ci-dessus des baillances de M. de Doazit comme il a toujours soulagé la paroisse de Doazit en la préservant des gens de guerre, mais à présent je bous beux parler du baron de Doazit son petit-fils, qui est fort genti jeune homme, il n'a pas encore vingt-ans, il a demeuré depuis quelques temps à Bordeaux, toujours parmi ses parents et amics qui en fond grand cas, et lorsque ...

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... M. de Labezières, capitaine d'une compagnie de cabalerie est arribé à Doazit. M. notre baron estait encore à Bordeaux, et comme il a entendu que cette companie estait à Doazit jusqu'à noubel ordre et en apparence pour tout cet hiber. Il parla à M. de Saint-Luc pour avoir le deslogement, mais M. de Saint-Luc le renvoya à M. le marquis de Poyanne.

M. le baron de Doazit se retire d'abord de Bordeaux et ba trouber M. le marquis de Poyanne pour avoir le deslougement, mais M. le marquis de Poyanne s'excuse et lui fait connaître que la chose dépendait absolument de M. de Saint-Luc, de sorte que le nouble et baillant baron de Doazit, après trois boyages à Poyanne et Clermont, s'en est parti de Doazit le dernier d'octobre 1666.

Je vous assure que pour lors il fait un fort maubais temps de pluie, tempêtes et ribières estaient débourdées. Mais le noble jeune homme fait paraître en ce boyage un bon esprit et hardi courage ; car le premier de noubembre audit an 1666, il a pris la poste par la petite lande au lieu nommé de Labouheyre et s'est rendu à Bordeaux en toute diligence, et n'y ayant pas trubé M. de Saint-Luc, sans perdre de temps il partit soudain vers Montauban où ledit M. de Saint-Luc estait, pour lui demander encore le deslougement de la companie de M. Labezière ; et ne l'ayant point obtenu, il s'en retourna à Bordeaux sans perdre courage, où le même seigneur se debait rendre en deux ou trois jours. M. de Saint-Luc à son retour de Montauban alla aux Jaubertes qui est un lieu de plaisance des héritiers de feu M. Du Besle à six lieues de Bordeaux où noustre généreux gentilhomme fut le truber pour obtenir le deslougement des gens de guerre de sa paroisse. Alors M. de Saint-Luc lui donna quelqu'espérance, mais il arriba sur le soir un paquet de Mgr l'évêque d'Agen à M. de Saint-Luc qui fut cause qu'il partit bon matin pour Agen, ce qui obligea le noble jeune gentilhomme de le suivre a Agen, où enfin ledit seigneur de Saint-Luc lui accorda de bonne grâce le deslougement ; il fut de retour à Doazit de ce fâcheux et long voyage le 15 noubembre dudit an 1666. Il ...

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... fut le lendemain bon matin truber M. le marquis de Poyanne pour lui pourter ledit deslogement que M. de Saint-Luc lui avait fait la grâce de lui donner, afin que M. ledit marquis de Poyanne plaçât la compagnie de M. Labezière selon l'ordre de M. de Saint-Luc, à la campagne en quelque endroit que ledit M. marquis jugerait. De sorte que M. le marquis de Poyanne lui bailla le deslogement de Doazit pour aller louger à Gaujacq jusqu'à noubel ordre.

M. le baron de Doazit fit signifier le deslogement à M. de Labezière, capitaine, le 17 septembre dudit 1666.Mais à cause du maubais temps et du desbordement des ribières, ils prièrent M. notre baron de leur permettre de arrester à Doazit, en payant, un ou deux jours. Et le 19 dudit novembre 1666, ils s'en sont allés audit Gaujac et ont passé la rivière du Lous aux ponts de Saint-Cricq, encore avec grande peine, à cause que ladite arribière du Lous estait desbourdée. Ils sont passés chez nous à Péboué, et quelques-uns ont fait collation ; ils estaient 70 cabaliers bien montés. C'estait une compagnie de chebals légers, ils ont demeuré à Doazit 65 jours et y ont fait une grande despense. Je vous assure que la paroisse de Doazit a une grande obligation à M. nostre baron de Doazit.

Le 20, jour de novembre 1666, Larroture de Brassempouy, chirurgien, rasant la barbe à M. le curé dudit Brassempouy, dans la maison dudit Larroture, mais malheur arriba, car en même temps une grande partie tomba sur eux, dont ledit Larroture mourut subitement, et M. ledit curé fut blessé et demeura quelques jours malade sans danger de mourt.

Et advenant, le 2 dudit septembre 1666, lesdits gens de guerre sortirent tous dudit Gaujacq et s'en sont allés au Mont-de-Marsan pour quartier de cet hiber, et sont tous passés près de notre maison de Peboué, et 5 ou 6 cabaliers y ont fait collation sans descendre de leurs chebals, et c'estait le jour que noustre dite Anne faisait sa levée, et à cette même heure que lesdits cabaliers passaient audit Péboué, à cette même heure tous les prestres de Doazit disnaient à table dans ladite maison de Péboué.

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Alors la mesure froment ballait à Mugron 22 s., mesure de blé 18 s., mesure millet 11 s., mesure aboine à cause des gens de guerre ballait 15 s., mais personne n'achetait point de bin sinon seulement quelque barrique pour la faire brusler à 6 fr. la barrique rendue.

Et en ce temps la noublesse de Chalosse a esté assignée de par du roy pour produire leurs titres de noublesse valablement, et a, faute de produire titres valables, il y en a eu plusieurs de déclarés roturiers et condamnés à de grandes amendes.

Je vous dis de plus qu'à Coudures et à Samadet y a encore des gens de guerre ; ils sont à pied mais ils font de grandes despenses.

Je bous dis aussi que le 27 de décembre 1666, un homme nommé Duplantier qui avait esté ci-devant agent de M. l'Evesque d'Aire, fils d'Aire et marié à Cerres de dessus, lequel avait esté longtemps y a décrété à cause qu'il avait esté ci-devant compagnon dudit Audigeos, et estant retiré audit Cerres de dessus, ledit 27 décembre 1666, il a esté prins et tué par des gens que je ne say point, et a esté pourté tout mort à Saint-Sever ; et quelques-uns disent qu'il s'est tué lui-même. Mais enfin le 3 de janvier 1667, il a esté mis et pourté sur une poutence par la main d'un bourreoü.

Je vous dis de plus que en ce temps en environ la Noël 1666, il a fait de et fâcheuses tourrades durant environ dix-huit ou vingt jours ; je vous assure que ce temps a fort incommodé les biux et les mal bestus.

Pour lors la barrique de vin se bendait à 6 fr. et le bois rendu, et c'est pour le faire brusler ; car il n'y avait pour lors autre bente de vin, et la mesure de froment se bendait pour lors à Mugron 22 s., mesure de blé 15 s., mesure millet 11 s., mesure aboine 15 s., mesure panis 9 s. ; mais il n'y abait point argent, non pas seulement pour faire un petit payement et même pour acheter de l'huile. Pour lors on payait d'une conque de sel à Dax 35 s. primachat et 3 francs de gabelle. Et la livre de pèbe ( poivre ?) vallait aussi 3 francs.

Nous abons parlé dans plusieurs endroits de ce M. le ...

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... marquis de Poyanne, lequel estait un grand seigneur et fort puissant. Il s'en est demeuré dans la bille de Saint-Seber et y est arribé sur la fin de noubembre 1666, mais il est devenu malade et est mort audit Saint-Sever, le 3 fébrier 1667 ; son corps a esté pourté à Pouyanne le lendemain, pour l'enterrer.

Dieu lui fasse paix ! Il avait de grandes charges, car il estait lieutenant du Béarn et gouverneur de Navarrenx et sénéchal des Landes, gouberneur dudit Saint-Seber et Dax.

Au commencement de febrier 1667, partout Chalosse est benu un mandement de par le roy qu'il fallait faire accoumouder les chemins par toutes les paroisses du siège de Saint-Sever, de sorte que l'on y a fort trabaillé, mais à cause d'une pluye et maubais temps, ils ne peuvent pas encore estre en bon estat ; car le 18, le 19 et le 20 mars de l'an 1667, durant ces trois jours, je bous assure qu'il tomba une grande quantité de neige, de l'espaisseur d'un gros pam. Ce temps estoit fort fâcheux, mais il ne fit pas grand mal, grâces à Dieu !

Alors la barrique de bin se bendait à 6 liv. et le bois rendu pour le faire brûler. Le maistre qui faisait l'eau-de-bie estait un marchand de Bayonne nommé Matthieu de Laffond.

Pour lors mesure de froment se vendait à Mugron 21 s., mesure de blé 15 s., mesure de millet 15 s., mais il n'y avait pas d'argent, grâces à Dieu.

Et estant au premier de may 1667, à Doazit est arribé une compagnie de gens de guerre d'environ 55 hommes pour demeurer à Doazit jusqu'à nouvel ordre. Le capitaine se nomme M. de Cabalepge. En cette compagnie il y a..... chebals, le reste est à pied.

A Doazit lui baillent chacun jour 25 liv. ; c'est une grande misère et grande dépense pour la pauvre paroisse de Doazit, grâces à Dieu.

Au commencement du mois de juin 1667, un homme nommé Bégué de Castel-Sarrazin a esté tué par des gens incognus. Ce Bégué estait un des gens du comboi.

Et le 22 dudit juin 1667, un homme nommé Laforcade, fils de Tursan, a esté roué à Hagetmau, lequel estait accusé ...

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... d'avoir esté à la boulerie et meurtre de Larrieu de Hagetmau.

Lesdits gens de guerre ont demeuré à Doazit depuis le 1er de may jusques au 5 de juillet qui est en tout 66 jours, et durant ce temps, un des souldats a tué un homme à Perras, à la couste d'Aulez , et le meurtrier s'est saubé. Cette companie, outre le meurtre, en a fait à Doazit plus de 2,000 liv. et en sont sortis par le moyen de M. le baron de Doazit ; car il est allé pour ceste affaire deux fois à Bordeaux et à Montauban pour parler à M. l'lntendant, afin d'avoir le deslougement, ce que à la fin il a obtenu avec grande peine et s'en sont allés louger à Monségur. Alors le temps estait fort beau et bon, grâces à Dieu. La charrette de blé se vendait à ce jour à Mont-de-Marsan 23 liv., la barrique de bin se bend 9 liv., mesure froment 23 s., mesure millet 11 s., et il y a belle apparence de millet aux champs.

Mais au commencement dudit juillet 1667, il a grelé casi partout Doazit, non pas pour lors grand mal, grâces à Dieu.

Mais dans peu de temps après a grelé par deux fois savoir : le 26 dudit juillet 1667, il a grelé en Doazit et Horsarrieu et en autres paroisses qui a fait grand mal en plusieurs endroits surtout à la Barrère et aux environs. Mais encore le plus grand mal est que le 12 aoust 1667 y tomba tant de grêle à Doazit, Saint-Cricq, Cerres et Horsarieu, à Dumes, à Coudures et en Tursan qui en a empourté en plusieurs lieux casi toute la vendange, et en Doazit plus de la moitié ; et en outre la grêle, le ban et la grande pluye ont fait plus grand mal que la grêle, et jamais homme bibant n'abait jamais bu tomber tant d'eau en si peu de temps, car les ruisseaux sont debenus si grands que personne n'abait jamais bu ; à L'arresenon(*) et à la Guaougue, s'y est noyé grande quantité de bétail et même dans nouste aouga de Péboué s'y nouyèrent deux cabales qui estaient de Chose ; cet orage a tiré des champs et bignes tant de terre, que les hommes bibants ne les répareront jamais. En un mout il est impoussible et incrouyable ...

(*) Voir carte d'état-major.

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... de dire le grand dommage fait en Chalosse ; et même à noustre pré de Larrieu qui est près du Barrouilhet y avait à l'heure de ce mauvais temps environ de 20 quintals de foin tout sec et accluqué. Cet ourage et débourdement de ruisseaux en empourta tout ledit foin, et n'y laissa pas dans ledit pré ni peu ni fort.

Et estant au demi-septembre 1667, le bin a un peu haussé, car sur la fin dudit septembre 1667, la barrique de bon bin se bendait 20 liv., c'est-à-dire celui qui estait bon, car il en y abait fort de pourri. Pour lors il n'y avait point de gens de guerre en Chalosse, grâces à Dieu.

Je bous dirai aussi qu'audit septembre 1667 il est benu un mandement de part noustre roy de France de bailler le dénombrement de tout le bétail grand et menu partout Chalosse, je ne say a quel dessein.

Pour lors noustre dit roy avait grande guerre avec le roy d'Espagne ; les armades estaient pour lors du cousté de Flandre. Mais on m'a assuré que noustre roy en abait eu du bon contre les Espagnols, et cette guerre feut cause, à ce qu'on m'a dit, que le roy d'Espagne a chassé tous les hommes français qui estaient fils de France et qui habitaient pour lors en Espagne, et plusieurs sont estés au passage mai traités en sourtant d'Espagne. Alors le grain estait, comme nous l'avons dit, à bon conte.

La bendange de l'année 1667 feut fort petite au lieu grelé ; mais où il n'y abait pas grelé, il y abait tant de bin que jamais.

Il estait au commencement de noubembre 1667, personne n'achetait point encore de bin, et on commençait déjà à parler de faire de l'eau-de-bie, car il n'y abait point d'argent du tout sur le pays de Chalosse ; et à cause de la rareté d'argent le grain estait : la mesure froment 20 s., mesure blé 14 s., mesure millet 10 s., le tout au marché de Mugron.

Et M. de Pellot intendant estait à Pau, et M. de Gramont y estait aussi, et M. de Cazelon ; je ne sais pour qu'elle affaire.

La gabelle de sel persiste toujours. Noustre roy de France abait, pour lors, grandes guerres avec les Espagnols ...

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... et aussi avec les Hollandais ; niais on m'a assuré que la paix entre le roy de France et le roy d'Angleterre estait faite, grâces à Dieu. Et noustre dit roy de France depuis la mourt de M. le cardinal Mazarin, estait conseillé par un certain nommé M. Cazebert (Colbert), fils de France à ce qu'on m'a dit.

Et en ce temps la pluie a duré et continué si longtemps, que à grande peine on a ensemencé le froment. Et estant à la Noël dudit an 1667, il y en abait encore en plusieurs endroits qui n'estait pas encore sourti, et pour lors personne n'achetait point du bin sinon seulement 7 liv. la barrique pour faire de l'eau-de-bie et le bois rendu, mais il fallait rendre le bin à la chaudière à ce prix ; l'eau-de-bie se faisait à Laysit et au Balen. La mesure froment se bendait 20 s., mesure blé à 14 s., mesure millet à 14 s., mesure blé à Saint-Sever à 9 s., et barrique de bin, bois et bin à 8 liv., en février 1668, grâces à Dieu.

Et estant à l'abril dudit an 1668, il rit quelques gelées ; mais, par la grâce de Dieu, il ne fit pas grand mal, et pour lors le temps estait fort beau pour la saison. Barrique de bin se bendait à 6 liv. 10 sols le bois rendu, et personne n'achetait du bin sinon seulement pour faire eau-de-bie, la mesure de froment se bendait pour lors à Mugron 22 s., mesure blé 15 s., mesure millet 10 s.

Nous avons ci-dessus parlé de ceux de la religion prétendue réformée, et à présent on m'a assuré de 43 temples qui ci-devant avaient dans le Béarn, à présent il n'en y a que 10 et noustre roy et le Parlement les a réduits à cela.

Et de plus M. Dufau de Castetis m'a dit, estant à Péboué le 16 avril 1668, qu'à Pau y avait un homme de Saint-Jean-Pied-de-Port qui estait accusé d'estre faux monnoyeur et estait condamné à Pau à estre pendu et estranglé. C'estait au commencement du Carême 1668, et estant mis entre les mains du bourreoü pour le pendre, un Père exhortait le criminel. Le criminel dit au Père qui l'exhortait : Mon Père, j'ai sur moi l'habit de l'escapulaire. Eh bien, dit le Père, cela te serbira pour mieux mourir. Et après estant monté sur l'échelle avec le bourreoü, l'échelle ...

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... se rompit et tombèrent tous deux à terre ; ils eurent une autre échelle, et comme le bourreoü attachait la corde à la potence, il donna la boulade au pauvre criminel pour le pendre et l'estrangler. Mais d'aussitôt la corde se rompit et le criminel tomba à terre sans avoir aucun mal, de sorte que les amis du criminel lui délièrent les mains et se sauva heureusement, et donnèrent quelques bastonnades au bourreoü qui feut bien ayse de s'en fuir. Et on attribue cela à un miracle, à cause de la vertu de l'habit du scapulaire, grâces à Dieu.

Et estant en juillet 1668, la barrique de bin se bend à 6 liv. et le bois rendu, mesure froment à 24 s., mesure blé à 15 s., mesure millet à 11 s. ; il n'y eut pas cette année que fort peu de froment. Au commencement de l'aoust 1668, la mesure de froment se vendait 24 s., mesure blé 15 s. ; pour lors le millet n'estait pas fort beau par les champs, le vin comme nous avons dit.

Et estant à demi aoust 1668, il se commença un fort beau temps et se continua jusques à la fin du mois d'octobre. La bendange de cette année se fit au commencement dudit octobre de fort bonne façon ; car le temps estait fort beau. et les raisins n'estaient point gastés, comme aussi le millet s'assembla fort bien ; mais il en y eut fort peu. Et estant à la fin dudit octobre 1668, mesure froment vallait à Mugron 27 s. et mesure de blé 20 s., mesure millet 13 s.

Et estant en novembre dudit an 1668, il fit un temps fort pluvieux et dura jusques en février 1669. Pour lors la barrique de bin se bendait à 10 liv., mesure froment à 28 s., mesure blé à 17 s., et pour lors il y abait tant de boue par les chemins que à grand peine pouvait-on vouyager.

Je bous beux encore parler de M. de Doazit et vous dire que le 10 d'avril 1669 il est mourt, (*) après avoir demeuré l'espace de six ans ou environ estroupié dans son lit, et le lendemain il a esté enterré dans l'église d'Aulez, fort honorablement. J'estais à ses honneurs, grâces à Dieu.

Je prie Dieu qu'il lui fasse paix ; et pour lors il faisait fort beau temps ; et la barrique de bin se bendait 10 liv., ...

(*) Jean-François de Foix(**).

(**) (Ph. Dubedout :) Contrairement à ce qu'indique la note du Baron de Cauna, ce "M. de Doazit" ne peut pas désigner Jean-François de Foix qui était déjà décédé lors de la naissance de son fils Joseph-Sarran le 24 avril 1652. « M. de Doazit » décédé le 10 avril 1669 ne peut être que Sarran de Candale (père de Jean-François), dont on sait qu'il vivait encore en 1667, maintenu dans sa noblesse par le jugement de 1667.

p.569

*****

... la mesure de froment 32 s., la mesure blé 18 s., la mesure millet 14 s.

La présente année 1669, à Doazit, eurent l'honneur de avoir pour prédicateur un Révérend Père Bénoit de Cassiet, cordelier, natif de la bille de Mont-de-Marsan, et conventuel depuis deux 2 ans, s'est démis à Bayonne ; il est âgé d'environ 32 ans. Je bous dis qu'après plusieurs personnes savantes que ce Révérend Père a esté estimé un rare prédicateur en Doazit ; on reste tout-à-fait content et satisfait, et désirait l'avoir pour d'autres années de tant qu'ils en sont satisfaits.

Et estant à l'aoust 1669, il n'y eut en Chalosse que fort peu de froment, ce qui fut cause que le grain haussa un peu, car au 15 dudit aoust 1669, mesure, de froment vallait 36 s., mesure de blé 25 s., et alors le millet estait fort beau aux champs. Et pour lors il fit de grandes chaleurs, car le juillet ne l'aoust ni jusqu'à la fin de septembre dudit 1669, il n'a guères plu, de sorte que le temps estait si chaud et surtout audit aoust, que. ce grand chaud causa grandes maladies partout le pays, et en y mourut grande quantité, et moi-même j'ai demeuré longtemps malade, grâces à Dieu.

Je vous dis encore que ces grandes chaleurs bruslèrent les raisins par les vignes, de sorte qu'il y avait grand dommage à cause du grand chaud ; mais durant ces chaleurs, il fit quelques arrousets qui furent profitables pour le millet. On commença à vendanger sur la fin de septembre 1669, et le millet était pour lors la plus grande partie assemblé, et audit septembre 1669 le bin bieux se bendit tout ; et se bendait sur la fin de septembre 1669 à 14 liv. la barrique, mais il y en avait de pourri qui se bendait à 6 liv. les bois rendus, et on fesait de l'eau-de-vie de ce bin pourri. En cette saison, il y eut assez bonne quantité de millet et se bendait à 15 s. la mesure, comme aussi il y eut assez bonne bandange de bin ; mais estant encore au commencement de nouvembre 1669, personne n'achetait point de bin ; seulement on m'a dit qu'au marché de Dax se bendait le doux à 16 liv. la barrique. Et estant au commencement ...

p.570

*****

... de l'année 1670, la barrique de bin se vendait à 12 liv., mesure de froment à 34 s., mesure de blé à 24 s., mesure de millet à 15 s. ; et on m'a dit que pour lors que la île de Candie a esté prise et rendue à l'oubéissance du Turcq.

Nous avons ci-dessus parlé du grand chaud de l'esté passé. Maintenant je vous beux parler des grands froids qui s'est fait au commencement de l'année 1670.

Je vous assure, en vérité, que au commencement de janvier 1670, il tomba si grande quantité de neige et fit si grande froidure et si grande tourrade que la plus grande partie des vignes se tourrèrent surtout aux lieux bas et du cousté de la pente du nord, comme au lamon de Nerbis, Mugron et Pouyalé et Montaut et au bas de Saint-Aubin, et même dans le Béarn ; et on dit généralement partout qu'il n'y avait jamais eu si grande froidure, et on m'a dit que tout le Tursan est gelé et ailleurs aussi, de sorte qu'en le pays ne se parle autre chose que du grand dommage que cette grande gelée a causé aux bignes et mêmes beaucoup de personnes en sont malades ; grande quantité de figuiers et lauriers sont morts. Cette grande froidure continua encore le mois de febrier et aussi tomba grande quantité de neige, de sorte que tout le monde criait et se plaignait de ceste grande et dommageable froidure, car il n'y avait jamais eu aucune grêle ni même aucune guerre qui eut tant fait tant de dommage que cette gelée a fait, et même à Doazit, il y a trente-neuf ans qu'il avait fait grande tourrade mais non pas comme à présent. Mais je vous dis que pour cela le bin n'enchérit pas guères ; car au 20 dudit février 1670, le bin se vendait sur les lieux à 13 liv. la barrique, mesure de froment 40 s., mesure de blé 26 s., mesure de millet 19 s. Tout cet hyver fut fort froid et beau sans guères pluie ; mais le monde voyant que les fruits des bignes estaient perdus, ils firent grande quantité de millouc. Et estant au commencement du mois de may 1670, le bin haussa, car au 8 de may 1670, la barrique de bin se bendait sur les lieux à 18 liv., et pour lors mesure de froment ne ballait que 35 s., mesure blé 24 s., mesure millet 16 s., et pour lors le froment et blé estaient fort ...

p.571

*****

... beau par les champs, de sorte qu'on espérait bonne coeillette de grain gros la présente année 1670. Je veux. vous présentement parler de nouste maison de Peboué ; il y a longtemps qu'il y a trois prestres, savoir : un mien frère et deux de mes nebeux ; mais par la grâce de Dieu, il y en a présent quatre, car un autre mien neveu, le plus jeune nommé Laborde de Chinon, a dit sa première messe à Maylis le lundi de la Pentecouste, 26 du mois de may 1670, où il y avait grand peuple. M. Decès et archiprestre de Doazit estait le maistre des cérémonies, et un mien neveu surnommé, M. le Gouverneur estait diacre et M. de Ribes frère de nouste neboude Anne et curé d'Arcoucabe estait sous-diacre ; et M. Despouys curé dudit Maylis fils de Cassiet, et noustre confils fit alors un beau sermon. Et tous ces Messieurs avec nos parents et amis après avoir entendu la messe, allèrent tous dîner à Peboué où nous fîmes assez bonne chère, là où il y avait 50 personnes ou d'avantage. Mon frère Ramond et mon cadet estaient le parrain, et ma neboude qui est mariée à Bic estait la marraine ; et mon neveu le premier et maître de Peboué avec sa femme noustre Jeanne de Ribes se mirent au lieu de père et de mère, et tous ceux que mon dit frère et moi offendimes les premiers après que les prestres eurent offert, et nous tous ceux dits de Peboué avons mis à l'offrande chacun un louis blanc de trois livres et chacun un flambeau, et nous rejouimes tout le jour à Peboué, grâces à Dieu. Et estant au commencement de juillet 1670, on coueillit le froment Je bous assure qu'il y en eut grande quantité, grâces à Dieu. Et aussi en la lande y eut grande quantité de blé et aussi le millet se fit fort bien, de sorte que au commencement de l'aoust 1670, la mesure de froment estait à 20 s., mesure de blé 13 s., et la barrique de vin se vendait 24 livres.

Je bous dit aussi que mon frère prestre le curé de Lanneplan mourut audit Lanneplan sans demeurer malade que environ 22 heures. Car le dimanche 3 aoust 1670, il célébra messe à Lanneplan et fait sermon, il dîna audit Lanneplan en companie de M. de Candau seigneur dudit lieu, mais ...

p.572

*****

... après avoir dîné une mauvaise coulique lui prend, de sorte qu'il en mourut le lendemain et fut enterré audit Lanneplan le 5 dudit aoust 1670. Je prie à mon Dieu qu'il lui fasse paix ; il avait dit sa première messe en l'année 1613.

Et advenant le dimanche 22 juillet 1670, M. de Monqucq curé de Saint-Aubin voulut publier quelque mandement de la part de M. l'Evêque d'Aire, et la plupart du puble de Saint-Aubin qui estait alors à la sainte messe, crurent fermement qu'il boulut publier tout à fait la gabelle, et par ce moyen estre perdus. Le peuble et surtout les femmes et filles qui estaient là, commencèrent a crier contre ledit curé et lui tirèrent plusieurs coups de pierre en fesant son prosne de sorte qu'il quitta et fut contraint de se mettre dans la sacristie ; et s'il n'eut été M. de Saint-Germain de Labeyrie qui estait là et qui empêcha, il y aurait eu plus grand désordre. Et de fait le curé n'acheva point la sainte messe et demeurèrent là en cette counteste jusqu'à ce qu'il fut fort bespe, et dans peu de jours après le prévost de Dax y bient, et en fit huit de prisonniers qui estaient la plupart de d'iceux innocents dudit désordre, lesquels prisonniers en sourtirent dans deux mois. Mais c'est après avoir fait grandes dépenses et du depuis il y en a eu plusieurs qui ont eu assignation. Je ne say ce qu'il en arribera, et en ladite église ne fut point dit de messe depuis longtemps, ni donné aucun coup de cloche, de sorte que au 15 d'octobre dudit an 1670, on ne sait point encore quand cette église sera remise et ceux qui murent en la paroisse dudit Saint-Aubin, on les ba enterrer à Hauriet, et à Larbey, et à Meylis.

On m'a dit aussi que à Saubrigues au diocèse d'Ax, il y a eu désordres pour le même cas, et en y a dudit Saubrigues deux ou trois d'enfermés.

FIN.

p.573

*****

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[Sommaire]

[Henry de Laborde]

 


TABLE DES MATIÈRES ET TABLE SUPPLÉMENTAIRE RÉUNIES

DU MANUSCRIT DE HENRI DE LABORDE PEBOUÉ DE DOAZIT

Le siége de Fontarabie

455

Les raisins brûlés

456

L'argent se trouve rogné

id.

Le vin fort cher

id.

Mort du Cardinal de Richelieu

457

Débordement des rivières ; Marché à Montaut en 1643

id.

Mort du roi Louis XIII

457

Trahison de Lavalette

458

Emprisonnement des sorciers

id.

Grêle à Doazit

459

Grande grêle à Doazit

id.

Bon marché du vin

id.

Grand chaud

id.

Longue pluie

460

Le grand et gros vent

id.

Pourriture du vin

id.

Grand chaud

id.

Accusation de faux monnoyeurs

461

Désaccord du Roi et du Parlement

id.

M. d'Épernon et le Parlement de Bordeaux

id.

Grand chaud en 1649

id.

Siège de Libourne (1649)

id.

Régiment de Navailles ; Siège de Dax (1650)

462

Maladie à Doazit (mai 1650).

id.

Guerre des Bordelais avec M. d'Epernon (1650.)

id.

Arrivée du roi Louis XIV, âgé de douze ans, à Bordeaux.

id.

Liberté des princes (1651)

id.

Desbordement du Gave (17 août 1651)

462

Le roi âgé de treize ans (1651)

463

Pillage de la maison d'Espaunic

464

Cabaliers de M. le Prince a Doazit (1651)

id.

M. de Justes , archiprestre (1651)

id.

M. de Poyanne (janvier 1652)

id.

Garnison de M. le Prince à Tartas (1652)

id.

M. de Poyanne devant Mont-de-Marsan (1652)

id.

Combat à Poyallé (2 mars 1652)

464

Départ des cavaliers de M. le Prince pour Bordeaux

id.

Arrivée du comte d'Harcourt

465

Composition de M. de Doazit avec le comte d'Harcourt

id.

Eau-de-vie à Doazit (1652)

id.

Grêle à Saint-Cricq (1652)

id.

Pluie et faim en Chalosse

id.

Cabaliers de M. de Poyanne en Chalosse (1652)

id.

Balthazar à Tartas (décembre 1652)

id.

Prise du château de Cauna (1652)

466

M. de Candalle, fils de M. d'Epernon à Mont-de-Marsan

id.

M. de Doazit prisonnier

id.

Misère en Chalosse, faim et voleurs (1653)

id.

Misère du pays

467

Cavaliers de M. de Poyanne à Serresloux

id.

Balthazar battu à Saint-Justin (11 janvier 1653)

468

Cavaliers de Balthazar à Nerbis

id.

Cavaliers de M. de Poyanne au port d'Ounard

id.

Prise de M. de Lugat, juge à Montaut

id.

Combat entre les gens de Balthazar et ceux de Mugron (16 janvier)

469

Ravages des cavaliers de Balthazar

id.

Pauvreté en Chalosse (1653)

id.

M. de Doazit se rend prisonnier (1653)

id.

Cavaliers de M. de Candalle à Montaut (1er févr. 1653).

470

Voleries à Montaut

id.

Vol du château de Castillon par les gens de Balthazar (1653)

id.

Retour de M. de Bonnaguet à Doazit

id.

Encore M. de Doazit (1653)

id.

Voleurs au pays (1653)

id.

Cavaliers de Balthazar à Grenade (1653)

id.

Cavaliers à Castillon

471

Arrivée de M. d'Aubeterre (fin de février 1653)

id.

Incendie du château de Lamothe par Balthazar (1er mars 1653)

471

p.598

*****

Bataille près Mugron (1er mars 1653)

471

M. de Doazit

472

Demande d'une grande somme par la ville de Saint-Sever

id.

Permission de manger de la viande dans le diocèse d'Aire (1653)

id.

Garnison à Mugron, Saint-Sever et Gaujacq

id.

Garnison à Doazit, Hagetmau, Nerbis, Pouyalé

id.

Famine, misère et pauvreté (1653)

473

Portrait de Balthazar

id.

Balthazar et d'Aubeterre à Grenade (1653)

id.

Cavaliers de d'Aubeterre à Montaut (1653)

id.

Abondance de grain

474

MM. de Poyanne et d'Aubeterre rencontrent Balthazar à la lande du Cauteré (1653)

id.

Cavaliers de MM. de Poyanne et d'Aubeterre à Montant, Gaujacq, Segarret et Sault de Navailles

id.

Peboué ravagé

id.

Cruauté de Balthazar (22 mars 1653)

475

M. de Vidart de Tartas (1653)

id.

M. d'Aubeterre envoye au château de Doazit prendre M. de Vidart (2 juin 1653)

id.

Cavaliers de Balthazar à Hinx (27 mars 1653)

id.

M. de Doazit mandé à Tartas par Balthazar (29 mars 1653)

476

Frayeur qu'inspire Balthazar (1653)

id.

Passage et ravages des cavaliers de la garnison de Gaujacq

id.

Passage des cavaliers de M. d'Aubeterre (1653)

id.

Cavaliers de Balthazar au cap du Pouy de Saint-Sever

id.

Blé coupé par Balthazar

477

Cavaliers de M. de Poyanne et d'Aubeterre à Serresloux (1653)

id.

M. d'Aubeterre à Cauna (8 avril 1653)

id.

Menaces de Balthazar, à ceux de Doazit

id.

Grande guerre a Saint-Cricq (10 avril 1653)

477

Irlandais

478

340 Irlandais à Doazit (11 avril 1653)

id.

Irlandais menaçant de se retirer à Doazit

id.

Prise par M. d'Aubeterre de 40 cavaliers à Castillon (1653)

id.

Cavaliers de M. de Poyanne à Serresloux (16 avril 1653)

id.

Cavaliers de M. d'Aubeterre à Montaut (23 avril 1653)

479

M. Cabiro et Laborde (de Montaut), prisonniers (1653)

id.

Irlandais à Doazit (4 mai 1653 )

id.

Cavaliers de Balthazar au chemin de Saint-Sever

id.

Assemblée de la noblesse à Hagetmau (7 mai 1653)

id.

Combat à Toulousette entre les cavaliers des deux partis (7 mai 1653)

id.

Maison de Galipau incendiée

id.

Ravages à la coste d'Aulez, à la maison de Puts, Banos, Montaut

480

Balthazar fait prisonniers deux prêtres de Doazit : Maîtres Raymond de Justes et de Cès

id.

Femme de Galipau maltraitée (10 mai 1653)

id.

Grêle à Momuy, Hagetmau (11 mai 1653)

id.

Départ des cavaliers de Gaujacq ; - ravages (12 mai 1653)

id.

Voleurs, saumon enlevé à Brassempouy par Camescasse (1653)

id.

Irlandais à Doazit, Larbey, Saint-Aubin

id.

Ravages de Saint-Aubin et Poyalé (1653)

481

Ravages en Doazit par les gens de M. d'Aubeterre

id.

Grande peur en Doazit

482

Ravages de guerre à Dax

id.

Larbey

483

M. le grand Maître

id.

Ravages de Balthazar

484

Armée de M. d'Aubeterre à Saint-Justin

id.

Ravages de Balthazar à Saint-Sever

485

p.599

*****

Ravages des cavaliers de Balthazar au faubourg de Saint-Sever

485

Corps de M. d'Aubeterre

id.

Siège de Cauna

id.

Prise de Cauna

486

Condition de Lartot

487

Cavaliers de Balthazar aux métayries de M. de Poyanne

id.

M. d'Aubeterre dans les landes (8 juillet 1653)

id.

Départ de Balthazar

id.

Débordement du Gave d'Orthez

id.

Ravages de guerre

488

Mort de ceux de Martin

id.

Ravages de guerre Brocas

id.

Bordeaux rendu au roi

489

Balthazar s'est rendu au roi

id.

Mort des gens de ce pays

490

Deslogement des gens de guerre

id.

Grande maladie et mort

id.

Cherté des grains

491

Grande maladie et mourt

id.

M. de Poudenx (15 septembre 1653)

id.

Baillance de M. de Doazit

492

Desmouliment des tours et murailles de Tartas

id.

Cherté de la volaille

id.

Maladie

493

Rebas d'argent

id.

Cherté du grain

id.

Les terres demeurent sans travail, surtout à Toulousette et à Montaut

id.

Mort par toutes les paroisses

id.

Grêle à Doazit et Saint-Cricq (1654)

494

Logement des gens de guerre de M. de Tricon

id.

Ravages de guerre chez nous à Peboué

id.

Ravages de guerre (1654)

495

De l'éclipse de soleil (12 août 1654)

496

Passage des gens de guerre (aoust)

497

Belle prière du chroniqueur

id.

Ravages de guerre

498

Accident de Poy-Patin

id.

Ravages de guerre (Montaut)

499

Ravages à Dume, etc

id.

Pourriture du vin

id.

Cherté du vin (octobre 1654)

500

Maladie contagieuse à Hagetmau

id.

Grande cherté et grande disette de vin

501

Maladie de Hagetmau

id.

Peu de profit des marchands

id.

Eglise du Mus

id.

Ravages des gens de guerre à Tartas (1655)

562

Bon temps du grain (février)

id.

Grande cherté du vin (24 août)

503

Bruit en l'église de Saint-Aubin

504

Château de Poyallé (1656)

id.

Ravages des gens de guerre

506

Grande peur en Doazit aux gens de guerre

id.

Grande baillance de M. de Doazit

id.

Ravages des gens de guerre

507

Le vin cher (mars 1656)

id.

Ravages des gens de guerre

id.

Ravages de guerre (avril 1656)

508

Ravages de guerre et cherté du vin

id.

Ravages de guerre (1656)

509

Ravages à Montaut

id.

Boulerie de guerre

510

Cherté du vin

511

Grêle à Saint-Cricq

512

Le vin à boun counte

id.

Eau-de-vie à Aulès (1657)

513

Neiges (1658)

514

Maylis (1658)

id.

Neiges (1658)

id.

Le roi

516

M. le cardinal Mazarin

id.

Le roi (1659)

id.

Le roi de France

517

M. le cardinal Mazarin à Dax

id.

M. de Lacouture (1659)

id.

Grande neige

id.

Grêles (mars 1660)

id.

La paix

id.

M. de Lacouture (1er mai 1659)

518

Le roi de France

519

M. de Vidart

id.

Mariage du roi de France (juin 1660)

id.

M. de Lataulade (18 juin 1660)

520

M. Donyson

521

Tremblement de terre

522

Grêle à Brassempouy, Gaujacq, Castelsarrazin, Donzacq

523

Meylis

id.

Justice de Mugron

524

Raphaël Dupouy, prédicateur à Doazit (1661)

526

Grêle à Bergouey (16 avril 1662)

527

p.600

*****

Maladie de M. Bonnaguet (may 1662)

527

Du loup

528

Gabaleurs

id.

La paix de Meylis

529

Neiges

id.

M. de Banos (22 févr. 1663)

id.

Grêles

530

Justice de Hagetmau

id.

Gabaleurs (20 juin 1663)

531

Des Huguenots

id.

Luther (1518)

id.

Calvin (1536)

532

La messe détruite au Béarn, l'an 1569

id.

La reine Jeanne

533

De la mort d'un prêtre en la maison de Haydet

534

La messe est retournée en Béarn, en 1620

535

La trahison de Navarrenx

536

Siège d'Ayre, de Sordes

id.

Prinse et rasement des tours de Mongiscar (1620)

id.

Des gabaleurs

537

Neiges du 1er avril 1664

538

Gabaleurs

id.

Assassinat de Labat de Hagetmau (juillet 1664)

539

Vaillance de M. de Cès, juge de Doazit

541

Abandon de Péboué par l'auteur (septembre 1664)

542

Gens du convoi au château de Dume (16 septembre 1664)

id.

Gens du convoi à Morgans (24 septembre 1664)

id.

Assassinat du curé de Coudures (septembre 1664)

id.

Gens du convoi tués à Aubaignan (1er octobre 1664)

543

Vol chez Fescaux, notaire (3 octobre 1664)

id.

Prise de M. de Lacouture (octobre 1664)

id.

Laborde Balay roué à Hagetmau (14 octobre 1664)

id.

Marché à Momuy (1664)

id.

Vol de la maison de Begué de Castelsarrasin (14 octobre 1664)

id.

Gens du convoi à Toulouzette (17 octobre 1664)

id.

Moulin de Cames (19 octobre 1664)

544

Choc entre les gens du convoi se retirant de la messe de Saint-Girons (28 octobre)

id.

Du larcin de Labourdette

544

Evasion du voleur (13 novembre 1664)

546

Soubaigné de Segarret, prisonnier (3 décembre 1664)

id.

Assassinat d'un homme du convoi près de la ville d'Aire (8 décembre 1664)

id.

Vol à Horsarrieu (26 décembre 1664)

id.

Etoile ou comète

547

Arrivée des gens du convoi à Horsarrieu, Segarret, Momuy (décembre 1664)

id.

Cavaliers à Montaut (16 janvier 1665)

id.

Gens du convoi à Saint-Cricq

id.

Tremblement de terre (4 février 1665)

id.

Soixante prisonniers par les gens du convoi

548

Ruine de Sault de Navailles et de Coudures

id.

Montaut ruiné par la cavalerie

id.

Prise de Man à Doazit, le 17 février 1665

id.

Prise par les gens du convoi du fils de Jean de Bic

id.

M. l'intendant à Mont-de-Marsan (1er mars 1665)

549

Henry de Laborde Peboué en fuite (26 avril 1665)

id.

Henry de Laborde chez son frère à Lanneplan (1665)

id.

Pendaison de M. de Borit (juin 1665)

550

Rencontre à Sainte-Colombe de gens de guerre et gens inconnus (juin 1665)

id.

Crainte et peur à Doazit

551

Audigeos

id.

Note sur le même

id.

Gens de guerre à Doazit (20 juillet 1665)

id.

Jean Duplantier à Doazit

552

Montausé payeur des gens de guerre

id.

Trois criminels pendus et roués à Hayet (2 septembre 1665)

id.

Lettre du roi Louis XIV à M. de Poudenx

id.

Dragons à Doazit (21 octobre 1665)

554

Deuxième note sur Audigeos

id.

Gens masqués à Samadet (17 décembre 1665)

555

p.601

*****

Eau-de-vie à Saint-Aubin. Purification (1666)

555

Sédition à Salies entre le peuple à cause de la gabelle (St-Barnabé 1665)

556

Gens du convoi à Dax, Saut de Navailles, Habas, Mont-de-Marsan et Aire (avril 1666)

557

Vol à Hagetmau chez M. de Larrieu (18 juillet 1666)

id.

Vol à Castelnau en Tursan (25 juillet 1666)

id.

Gens de guerre à Coudures (10 juillet 1666)

id.

Prévôt de Bayonne à Hagetmau (24 juin 1666)

id.

M. de Poyanne à Saint-Sever (juillet 1666)

558

Prise de la mère et sœur à Audigeos, du curé et du vicaire de Montgaillard (17 août 1666)

id.

Cavaliers à Doazit (15 septembre 1666)

559

Criminel roué à Laloubère de Saint-Sever (20 septembre 1666)

id.

Baylet de M. de Justes de Doazit porte un criminel à Hagetmau

560

M. de Poudenx (4 octobre 1666)

id.

Liberté du curé et vicaire de Montgaillard

id.

Labaissière, capitaine à Peboué (5 octobre 1666)

id.

M. de Poudenx à Garros (19 octobre 1666)

id.

M. de Labessières part de Péboué (27 octobre 1666)

561

Accouchement d'Anne de Péboué (7 novembre 1666)

id.

Invitation d'Henry de Laborde par le capitaine Labessières (9 novembre 1666)

id.

Labessières part de Péboué (12 novembre 1666)

id.

M. le jeune baron de Doazit

561

M. de Saint-Luc aux Jaubertes

562

Départ des gens de guerre de Gaugeacq (décembre 1666)

563

Cavaliers de Gaugeacq entrant à Mont-de-Marsan, passant à Péboué

id.

Noblesse de Chalosse et ordre du roi de produire leurs titres de noblesse

564

Gens de guerre à Coudures et Samadet

id.

Duplantier de Serres de Dessus, prisonnier (1666)

id.

Grand froid (Noël 1666)

id.

Sel à Dax 35 sols la mesure et 3 livres de gabelle

id.

Mourt de M. de Poyanne (3 février 1667)

id.

Ordre du roi de réparer les chemins de Chalosse (1667)

567

Gens de guerre à Doazit (1er mai 1667)

id.

Bégué de Castelsarrasin assassiné (juin 1667)

id.

Lafourcade de Tursan roué à Hagetmau (22 juin 1667)

id.

Mort d'un homme de Doazit, coste d'Aulès

566

Gens de guerre ont quitté Doazit et sont allés à Monségur

id.

Grêle à Doazit et à St-Cricq (juillet 1667)

id.

Serres, Horsarieu, Dumes, Coudures

id.

Desbordement de Larresenon, Lagouague, bétail noyé et une jument de Chose s'est noyé au Gua de Péboué

id.

Trente quintaux foin enlevés au pré de Larrieu

567

Dénombrement de bétail en Chalosse (septembre 1667)

id.

Guerre entre la France et l'Espagne

id.

MM. de Pellot, de Gramont, de Cazalon à Pau

id.

Mort du Cardinal Mazarin ; M. de Colbert

id.

Miracle opéré par le scapulaire

568

M. de Doazit mort (avril 1669)

id.

Du Cassiet, Cordelier, prédicateur à Doazit (1669)

570

Maladie de Henry de Laborde

id.

Grand froid (janvier 1670)

571

Maison de Péboué (1670)

572

Mort du curé de Lanneplan (4 août 1670)

id.

Un grand désordre à Saint-Aubin et à Saubrigues (22 juillet 1670 - 15 octobre 1670)

573

Saubrigues

id.

p.602

*****

 


ERRATA et NOTES.

 

Page 456, ligne 9 : bien des cris d'argent ; lisez : descri. L'argent décrié, discrédité, descridé, abaissé de titre.

Page 496, ligne 36 : provision d'eau pour ce jour ; à l'original : provision d'ou. Nous pensons que c'est de l'eau, de peur que l'éclipse tarisse les sources.

Page 534, ligne 32 : aurait d'amende pour chaque fois ; l'original porte : aurait de loty mayou pour chaque fois la somme de 10 livres. Loty mayou, sorte d'amende.

P. S. - La chronique de Henry de Laborde Peboué faisait partie des archives de cette maison ancienne a Doazit, et dont les titres filiatif développés dans un autre document, s'étendent de 1400 à 1789. La généalogie de famille est écrite dans la langue claire et trop châtiée de la première moitié du XVIIIe siècle. La relation de Henri de Peboué appartient encore à la langue du XVIe siècle ; l'auteur s'exprimait dans l'idiome de son père, singulier mélange du langage français et gascon. La forme seule de ce document démontre son originalité et son caractère authentique, et les divers épisodes qui remplissent les dates de 1638 à 1670 sont exposés conformément aux données historiques reçues. L'abbé Monlezun a puisé dans Peboué une partie de ses récits de la campagne de Balthazar, et le lecteur désire-t-il d'autres détails, il les trouvera dans la Guerre de Guienne du célèbre colonel et dans la Chronique de Dax de M. Dompnier de Sauviac.

La correspondance administrative de M. Depping contient des éclaircissements sur le traité du capitaine Audijeos ; nous y renvoyons.

Les poursuites contre les sorciers ne sont que trop véridiques.

Les tremblements de terre de 1660 et autres appartiennent à l'histoire. Henri de Peboué les décrit fidèlement, et les faits qu'il rapporte ont été relevés par les historiens du mariage de Louis XIV, les Mémoires de la grande Mademoiselle et les Essais sur la Minéralogie des Pyrénées, par l'abbé Palassou. - Une autre remarque d'un intérêt plus local et agricole, c'est le haut prix du vin de Chalosse au XVII siècle. En évaluant l'argent en 1640-1660 à quatre fois le taux de 1869, la barrique de vin 6 liv. (vil prix) fait 24 liv. ; à 24 liv. en 1663, elle. vaudrait aujourd'hui 116 liv. ; à 30 fr., 120 fr. ; à 44 liv. en 1640 (fort cher) 176 fr.

Nous présentons avec confiance cette chronique aux ecclésiastiques du diocèse, sachant qu'elle renferme de précieux matériaux pour l'histoire, de leurs paroisses.

p.603

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