Extrait du "Journal des Landes" no22, du 11 ventôse an 9, pages 3 et 4.
[Sommaire Doazit]
[Jean Darcet]
[Bibliographie Darcet]
NÉCROLOGIE.
Au Rédacteur du Journal des Landes.
Les nouvelles publiques nous annoncent la mort d'un homme célèbre, et dont le 2e arrondissement du département des Landes fut le berceau.
Le citoyen Darcet, plus connu dans la capitale et chez les nations amies des arts et des sciences, que dans le lieu de sa naissance, a rendu des services trop importans à la société, par des découvertes utiles et des travaux immenses, pour qu'un mince disciple de ce grand homme ne doive aujourd'hui jetter quelques fleurs sur sa tombe. Elève et bientôt le digne émule des frères Rouelle, il signala son entrée dans la carrière par des vues vastes et profondes sur le règne végétal et minéral ; bientôt il fixa l'attention du gouvernement ; et une place de professeur au ci-devant collège de France, qu'il obtint le 11 décembre 1775, le mit à portée de dévéloper toute la sagacité de son génie ; c'est dans ce laboratoire, que tous les hyvers, il réunissait tout ce que Paris comptait d'hommes distingués dans les sciences exactes. Souvent les Macquer, les Beaumé, les Monge, les Defontaines et autres, venaient s'asseoir à côté des plus jeunes disciples, pour profiter de ses leçons lumineuses. La manufacture de Sèvres lui doit une partie de ses succès, par le zèle infatigable qu'il a mis durant sa vie, à perfectionner l'art de la poterie en France : la métallurgie lui doit également des procédés nouveaux, et dont les arts et le commerce tirent de nos jours de si grands avantages.
La révolution ne pouvait que trouver dans le citoyen Darcet un sectateur zélé et désintéressé ; aussi, concurremment avec le citoyen Chaptal et autres chimistes modernes, il a fait prospérer les manufactures d'armes à feu, de poudre etc., et par là il a fixé souvent la victoire parmi nos armées. Il trouva une récompense d'une vie ainsi sémée en bienfaits, dans une place au sénat conservateur, qui honore également et le citoyen qui l'avait méritée et le gouvernement qui sait si bien apprécier le vrai mérite.
Le citoyen Darcet ne se contentait pas d'étudier la science dans les cabinets des naturalistes ; il a plus d'une fois, consulté la nature, dans ses immenses laboratoires, le lieu chéri de son enfance n'était jamais indifférent pour lui ; il se rappelait le village modeste qui l'avait vu naître et vint le visiter en l'année . . . . avec une épouse chérie. Ses amis se rappelent encore, avec attendrissement, l'époque de son voyage à Doazit, à Saint-Sever, où il fut accueilli avec le degré d'intérêt qu'inspirait une réputation si justement établie. Aussi, proche des Pyrénées, il voulut les aller observer de nouveau ; il en parcourut plusieurs chaînes, et fit des observations très-utiles sur les variations du baromètre, sur le thermomètre ; il étudia principalement l'atmosphère des montagnes les plus élevées ; il calcula jusqu'à un certain degré, les causes de leur dégradation. tous ces faits sont consignés dans un mémoire qu'il prononça, à son retour à Paris, devant la société de médecine ; mémoire que le citoyen Dufour, professeur à l'école centrale, a bien voulu me confier.
A. B*******, professeur à l'école centrale des Landes.