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DOAZIT

ETYMOLOGIE

DONATI GARSIE DE DONAZELLO

 Ph.DUBEDOUT

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Le premier des Doazitiens, connu comme tel parce qu'à son nom est accolée la forme ancienne du mot "Doazit", se nommait Donati Garcie de Donazello, et vivait à la fin du Xème siècle.
Premier seigneur de Doazit, Donat-garcia serait un fils bâtard de Garcia-Donat (977-980), comte d'Agen en 992, et lui-même petit fils de Sanche IV-Garcia, duc de Gascogne.*1
Il vivait probablement dans un château en bois, construit sur la motte féodale appelée "lo Ram", ou "lo Tarrè", érigée à l'ouest du promontoire qui porte le bourg de Doazit.
La lignée des seigneurs dits "de Doazit" s'est éteinte en 1423, au décès sans postérité de Jean, baron de Doazit.

 

Rappelons tout d'abord, pour le plaisir, les origines fantaisistes qu'on a voulu donner au nom de notre village:

     "Dans les registres anciens, on lit indistinctement DOAZIT, DOUAZIT et même DOUASIT. C'est clair, dit quelqu'un en s'emparant de ce dernier mot, DOUASIT vient de DUOSITUS: deux sites. Pourquoi pas de DULCIS SITUS dit un autre, "Doux site". C'est un enfant du terroir. A défaut de l'histoire, la vérité et les gens de l'endroit lui donnent raison."*2

     "Le nom de Doazit pourrait venir encore de OASIS, en grec : o a z i s , lieu fertile et habité au milieu du désert. Ce mot grec vient lui-même de "ouassi", terme égyptien qui signifie habitation. Les Arabes auraient-ils surnommé ainsi notre village en passant dans le pays ??? Mais alors, où était le désert ? L'histoire du passé a des secrets que nous ne connaissons pas. Par leur cruauté et leurs ravages, les Maures ont pu faire de la région un désert laissant au milieu des ruines notre village comme un grenier d'abondance et un lieu d'habitation. En tout cas, on est frappé par la ressemblance de DOUAZIT et de OUASSI, terme égyptien, employé aussi par les Arabes."*3

                        Dans la même veine, on nous a aussi soufflé le Berbère DOUAR ZIT : Le village de l'huile.

 Propositions plus sérieuses :

= « DOAZIT. – Homme latin Donatius, plus ellum (formation rare). »
Deux petits dictionnaires landais ; René Cuzacq ; éd. Jean-Lacoste, Mont-de-Marsan, 1966, p.39.

 

= « DOAZIT, cant. Mugron (Donat Garcia de Donagelo ou Donasello, v. 993, donation Abb. St Sever, de Jaurgain, Vasconie, I, 15 ; G. de Diazid, 1242, RG, I, n° 1071 ; A. de Oazid, 1243, RG, I, n° 1606 ; de Doazito, 1289, RG, II, p. 296 ; Doazin, carte XVIIIe s.). – La finale ne peut s’expliquer que par le suffixe diminutif –ellum ( -et, -it, gascon) distinguant cette localité d’un homonyme, en l’espèce DOAZON, cant. Arthez, PA, situé à 30 km. »
Toponymie du Pays Basque français et des Pays de l’Adour ; Docteur Jacques Lemoine ; éd. A. et J. Picard, Paris, 1977 ; p. 136.

 

= « de *Donatiellum, du nom d’homme latin Donatius, avec suffixe –ellum (formation rare). Comparer avec Doazon (P.-A.), avec suffixe –onem. »
Albert Dauzat et Charles Rostaing ; Dictionnaire étymologique des noms de lieux en France, Librairie Guénégaud, Paris, 1978 ; p. 248.

 

= « Nom de personne roman Donatillus (Onomasticon du Thesaurus linguae latinae), traité comme *Donadillus ; chute du –n- intervocalique et passage de –ll final > t. »
Toponymie générale de la France ; Ernest Nègre ; éd. Droz, Genève, 1991, I, p. 652.

 

= « de Donatillus > Donadillus, sur donatus, « donné (à Dieu) ». »
Dictionnaire des noms de familles et des noms de lieux du midi de la France ; Jacques Astor ; éd. du Beffroi, 2002, p.925.

 

= « On ne peut expliquer la forme donnée en 933 [de Donagello] que par un changement d’occlusive intervocalique, phénomène qui n’est pas exceptionnel dans la phonétique régionale (exemple du Cartulaire de Dax donné par J.-B. Orpustan : « mardosus » pour « margosus »). Par ailleurs, il s’agirait bien d’un continuateur d’un type Donatillus (Donatillum) dérivé du cognomen Donatus (Onomasticon Provinciarum Europae Latinarum, Ita 27, His 12, Beg 13, Nar 6, Aqu 2, Lug 3). »
Dictionnaire toponymique des communes Landes et Bas-Adour ; Bénédicte Boyrie-Fénié ; éd. CAIRN ; 2005 ; p.92.

 

Commentaires sur les hypothèses avancées :

Tous les auteurs ci-dessus sont d’accord sur le radical : « Donat », et sur le suffixe « -ellum ».
« Donat » est un nom de personne, formé avec le participe passé (donatus) du verbe donare : « Donné (à Dieu) ».
Le suffixe –ellum est un diminutif, qui, selon M. Grosclaude*4, ne peut s’accoler à un nom de personne. Mais, comme le dit Lemoine, la finale de « Doazit » ne peut s’expliquer que par ce suffixe ; c’est pourquoi plusieurs des auteurs ci-dessus précisent qu’il s’agit d’une formation rare.

Les opinions divergent pour expliquer le « z ».
- Cuzacq, Dauzat & Rostaing, ainsi que Grosclaude (pour Doazon*5), partent de « Donatius », comme variante de « Donatus ». Le groupe -ti- devant une voyelle, donne régulièrement le son [z] en gascon (ex. potionem = poson) *6.
- Nègre, Astor et Boyrie-Fénié, supposent un passage de « t » à « d », puis à « z ». Mais le passage de « d » à « z » se produit en Armagnac ou Bigorre*7, mais pas dans la région de Doazit.

 

Nous privilégions donc l’explication :
« Donatius » (nom d’homme latin) + « -ellum » (diminutif).
Donatiellum, après chute du « -n- » intervocalique, passage de « -ti(+voyelle) à « -s- » [z], et passage du « -ll » latin à « -th » gascon, aboutit régulièrement à « Doasèth ». Les orthographes Donazello, Doaset, Doasetum,... attestent de cette ancienne prononciation.
Il reste à expliquer le passage de « Doasèth » à « Doasith ». Est-ce le même phénomène que pour le binôme « Albret / Labrit » ?

 

 

     Le premier seigneur de Doazit connu, cité parmi les témoins de l'acte par lequel Guillaume Sanche, duc et comte de Gascogne, prescrit en 993 la restauration du monastère de Saint-Sever, se nomme: Donati Garsie de DONAZELO (963 ?)*8, ou DONAZELLO (1030).
     On trouve ensuite les formes suivantes : DOAZID (1072), DOESET (1228), DOASSIDZ (1269), DOAZIT (1270), DOAZITO (1291), DOASET (1294), DOAZIC (1300), DOUZYT (1315), DONATZO (1328), DOASETUM (1335), DOAZIG (1376), ...
     La lettre "o", qui se prononce comme le "ou" français, et sous l'influence de ce dernier, a aussi donné plus tardivement, les formes DOUASIT, ou DOUAZIT.
     Les terminaisons en "d" traduisent une prononciation en "t sec", tandis que celle en "g" traduit un "t mouillé", utilisée dans le sud de la Chalosse et la région d'Orthez. Ces deux prononciations issues du double "l" latin (Donazello), sont transcrites dans l'écriture moderne par le groupe "th". On pourrait donc tout aussi bien écrire "DOASITH".

 

            Pour le colonnel Massie (Les origines du bourg de Doazit ; Bull. soc. Borda 1975) « C'est seulement en 1273, puis en 1338, que l'on connaît le nom de Doazit en tant qu'habitat ». Il en conclut donc que la seigneurie a pris le nom de son seigneur. Mais un acte transcrit à la fin du Beatus de St-Sever (fol. 287r°), porte « Donati Garsie in Donazello », ce qui lève le doute d’une éventuelle interprétation filiative de la préposition dans la formulation « Donati Garsie de Donazelo » (fol. 286r°-287r°). « Doazit » était donc déjà bien le nom de l’habitat au Xème siècle.

 

     Les habitants de Doazit portent le nom de DOAZITIENS (Doazitiennes). Cette syllabe en "t" est peu conforme à l'origine du nom : les deux "l" du mot latin auraient du nous donner une terminaison en « r » : "Doazir-". Cet adjectif est de création récente. On trouve "Doazitais(es)", en 1910, quand le mot se cherchait encore. - Les habitants sont désignés en gascon par "LOS DOASITS" (lous douazits).

Notons aussi qu'au début du siècle, Doazit était dénommée "La Perle de la Chalosse"*9, avant que Hagetmau ne lui subtilise cette appellation.

 

O O O OO O O O

 

1 - Colonel J.-F. Massie; Les Origines du Bourg de Doazit; Bulletin de la Société de Borda, 1975, d'après Jean de Jaurgain, La Vasconie, 1902, I, p.15.
2 - Le Bulletin paroissial de Doazit no1 , janvier 1929.
3 - Le Clocher de Doazit, no2 , février 1929.
4 - Michel Grosclaude ; Dictionnaire toponymique des communes Béarn ; éd. CAIRN, ed. Reclams ; 2006 ; p. 218.
5 - Michel Grosclaude ;
Dictionnaire toponymique des communes Béarn ; éd. CAIRN, ed. Reclams ; 2006 ; p. 61.
6 - Michel Grosclaude ;
70 clés pour la formation de l’occitan de Gascogne ; éd. Per Noste, La Civada ; 2000 ; p. 36.
7 - J. Bouzet, Th. Lalanne ;
Du Gascon au Latin ; Librairie Bénesse, St-Vincent-de-Paul ; 1937 ; p. 30.
8- Les documents transcrits à la fin du Beatus de St-Sever (voir Saint-Sever millénaire de l’abbaye, colloque international 1985 ; éd. CEHAG ; 1986 ; pp. 116, 117) donnent « Donazelo » et « Donazello ». La graphie « Donagelo » donnée par Du Buisson (Historiae monasterii S. Severi, libri X, auctor d. Petro du Buisson, O.S.B., Congreg. S. Mauri, Aire 1876, I, p.159 et II, p.132 ; cité par le Colonel J.-F. Massie in Les Origines du Bourg de Doazit; Bulletin de la Société de Borda, 1975.p.32), d’après un autre document que celui de la B.N., est mise en doute par A. Degert (bull. soc. Borda 1913 p.5).
9- La Course Landaise, no23; 4 septembre 1932.
10
- D'après J. Légé (Les Castelnau-Tursan) ; J.F. Massie (Le bourg de Doazit) ; J. Ferré (Doazit).

 

 Généalogie de la famille De DOAZIT*10

Garcia-Sanche le Courbé, duc de Gascogne et conte d'Agen ; 893, 920.
Marié vers 870 à Aminiane

ò

Sanche IV-Garcia, duc de Gascogne, conte d'Agen vers 930.
Marié vers 900.

Remarié vers 903.

ò

Donat-Sanche, marié vers 930.

ò

Garcia-Donat 977, 980, conte d'Agen en 992.

ò

Donat-Garcia, bâtard ; seigneur de Doazit (993).

? ø

Bernard de Doazit, 1072.

? ø

Raymond-Bernard de Doazit, 1225.

 ? ø

Odon de Doazit, 1228.

 ? ø

En Denot, seigneur de Doazit et de la caverie de Goesmes entre 1231 et 1287.

 ? ø

Monsgr Auger ou Augier de Doazit, 1243 (+ av. 1265).

De Nos de Doazit, 1265.

ò

En Denos, seigneur de Doazit, 1265.

 ? ø

Guilhem-Ramon de Doazit, 1256, 1286 ; sénéchal de Gascogne en 1273 ?

marié à Anne de Labarthe. 

Othon de Doazit (ou Ottho, Odon, Oddo), damoiseau, seigneur de Doazit et de Brassempouy, chevalier ; 1263, 1294.

ò

Mautien, seigneur de Doazit. Marié à Rigarde de Bats.

ò

ò

ò

Auger, seigneur de Doazit, chevalier ; valet du roi d'Angleterre, 1334, 1338, 1341. (-1373 ?).

marié en 1328 à Catherine de Caupenne, fille de Nardaud, seigneur de Caupenne et de Guiraute de Navailles. 

Arricarde.

mariée en 1334 à Maurin, seigneur de Viella.

Armengarde.

x Raymond, seigneur de Bezaudun.

ò

ò

ò

Denot, seigneur de Doazit, sire de Doazit et prévôt de St-Sever en 1368. 

 

Odet, seigneur de Viella.

x Guiraute d'Armagnac.

x N de Senlane 

 

Guilhaume.

ò

ò

ò

Jean, seigneur de Doazit, chevalier. Créé baron de Doazit en 1414, par Henri V d'Angleterre. (+ 1423).

x 1405 à Marguerite de Castelnau-Tursan.

x Jeanne de Pomès.

 

Maurin, seigneur de Viella.

marié à Louise de Villa-Rétère.

 

Jean-Denot, seigneur de Bezaudun.

 

 

       ò

 

 

Raymond, seigneur de Viella, seigneur de Doazit en 1423.

x Mondinotte de Gerderest

 

 

ò

 

 

Bertrand, seigneur de Viella, Doazit et Gerderest.

x Jeanne de Castelnau-Tursan.